Intervention de Didier Migaud

Réunion du 24 juillet 2013 à 9h45
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes :

Je vous remercie, monsieur le président, d'avoir organisé cette audition qui me permet de présenter à votre commission l'enquête que la Cour des comptes a réalisée à votre demande, en application du 2° de l'article 58 de la LOLF ; celle-ci porte sur les relations entre l'État et les sociétés concessionnaires d'autoroutes.

Je suis accompagné de Mme Évelyne Ratte, présidente de la septième chambre, et sont également présents M. François-Roger Cazala, conseiller maître, président de la section des transports à la septième chambre et contre-rapporteur, et Mme Claire Aldigé, auditrice et rapporteure de cette enquête.

Je tiens à préciser que ce rapport n'est pas le résultat d'un contrôle des concessions, ni davantage des sociétés concessionnaires d'autoroutes, car la Cour n'est pas compétente pour mener de tels travaux. Ce sont donc les services de l'État chargés des relations avec ces sociétés qui ont été contrôlés. Les chiffres qui figurent dans les tableaux du rapport proviennent du ministère de l'Écologie, du développement durable et de l'énergie, et non des sociétés.

Ce travail a suivi les procédures traditionnelles – collégialité et contradiction – encadrant la production des travaux de la Cour et qui forment la garantie de leur neutralité et de leur rigueur. La Cour a adressé le rapport provisoire aux administrations et aux sept sociétés concessionnaires historiques qui ont été concernées par l'enquête – pour les extraits les concernant – et elle a reçu de volumineuses réponses écrites de leur part. Ces sociétés ont également pu faire valoir leurs arguments à l'occasion d'auditions, organisées pour les cinq d'entre elles qui en ont fait la demande. C'est après une analyse approfondie de ces éléments que la Cour a forgé sa propre opinion et a établi les éléments factuels qui figurent dans le rapport. Pour répondre aux inquiétudes que les sociétés ont exprimées sur le contenu des constats et des recommandations retenus par la Cour, j'ai suggéré à la présidente de la septième chambre de leur transmettre les extraits du rapport définitif qui les concernaient avant qu'ait lieu la présente audition, ce qu'elle a accepté de faire.

Afin de financer le développement rapide d'un réseau autoroutier moderne, l'État a mis en place des concessions grâce auxquelles la construction et l'entretien des infrastructures sont financés par les usagers – à travers le paiement d'une redevance –, et non par le contribuable comme pour le reste du réseau routier. Cette dérogation au principe de gratuité de l'usage des voies de circulation vise à permettre de financer par des péages l'amortissement des constructions déjà réalisées, ainsi que l'exploitation, l'entretien et l'extension du réseau existant. Ce système transfère au concessionnaire les risques liés aux travaux et au trafic.

Les opérateurs qui ont assuré la construction et l'exploitation du réseau étaient pour l'essentiel des entreprises publiques. La privatisation des six sociétés historiques, mise en oeuvre en 2006, a modifié la relation entre l'État et celles-ci. Elles ont été regroupées au sein de trois groupes : le premier est Vinci Autoroutes, qui comprend Cofiroute, Autoroutes du Sud de la France – ASF – et les Autoroutes Esterel-Côte d'Azur – ESCOTA –, le deuxième, contrôlé par Eiffage, rassemble APRR et la société des Autoroutes Rhône-Alpes – AREA –, et le troisième réunit la SANEF et la SAPN. C'est sur les relations entre l'État et ces sept sociétés – qui réalisent 95 % du chiffre d'affaires du secteur – que l'enquête s'est concentrée.

La France dispose aujourd'hui d'un réseau autoroutier de 11 000 kilomètres, dont 8 800 sont concédés. La partie la plus ancienne est amortie, mais, même pour cette portion du réseau, les coûts d'exploitation et d'entretien sont importants : en effet, 25 % du trafic routier passe par le réseau autoroutier, alors que celui-ci ne représente que 6 % du réseau. La qualité et la sécurité des infrastructures autoroutières sont unanimement reconnues et participent de l'attractivité économique du territoire ; il convient toutefois de s'assurer que le rapport entre le coût et l'efficacité soit le meilleur possible, ce qui est le rôle de la puissance publique lorsqu'elle négocie les concessions autoroutières et fixe l'évolution des péages.

La Cour a déjà eu l'occasion de s'exprimer sur le sujet des péages autoroutiers, notamment dans un chapitre du rapport public annuel de 2008. Elle avait critiqué l'inadaptation des règles de négociation et de fixation des péages aux enjeux actuels, la déconnexion de ces péages par rapport à la mesure des coûts, l'insuffisante répercussion de la fin de l'amortissement du réseau le plus ancien par une baisse des péages dans les sections concernées, l'incohérence des tarifs dans différents tronçons et, dans l'ensemble, un système devenu trop favorable aux concessionnaires.

La Cour a constaté dans la présente enquête que les recommandations qu'elle avait formulées en 2008 avaient été assez largement suivies, mais que beaucoup restait à faire pour améliorer la maîtrise des concessions autoroutières. Elle s'est concentrée, pour répondre à la demande de votre Commission, sur une analyse de l'évolution des péages depuis dix ans et sur le contrôle par l'État du respect par les sociétés concessionnaires des obligations qu'elles ont contractées en contrepartie des hausses tarifaires obtenues ces dernières années.

Plus généralement, l'analyse se porte sur le cadre de négociation entre les services de l'État et les sociétés concessionnaires, et en particulier sur la deuxième génération de contrats de plan discutés depuis 2009. Ces documents ne sont pas publics et sont conclus dans des conditions peu transparentes ; c'est le rôle de la Cour de faire la lumière sur l'équilibre de ces négociations et sur leur contenu, et de formuler des recommandations pour renforcer l'efficacité du système des concessions autoroutières dans l'intérêt du contribuable et de l'usager du service public.

Les principaux constats et recommandations figurant dans ce rapport peuvent être résumés en trois messages : le ministère assure un meilleur suivi du respect des obligations par les concessionnaires, mais sans toujours tirer les conséquences du non-respect de cellesci ; la négociation tarifaire ne permet pas de protéger les intérêts de l'État et ceux des usagers ; enfin, cette insuffisante maîtrise du cadre contractuel par l'État résulte d'un déséquilibre dans la négociation au profit des concessionnaires autoroutiers. La Cour formule des propositions afin que l'État s'organise mieux pour négocier et dispose d'informations plus nombreuses de la part des sociétés.

S'agissant des progrès dans le suivi des obligations des concessionnaires qui ne débouchent pas assez sur des évolutions, il faut tout d'abord constater que l'administration bénéficie d'une expertise reconnue ; elle a mis en place une série d'indicateurs de performance qui servent à rendre compte de son action devant le Parlement dans le cadre de la LOLF. Ces indicateurs concernent tant la qualité des routes et des ouvrages d'art que celle des aires ou le délai d'intervention après un événement ou pour un dépannage. Ils ont été repris dans les contrats de performance avec les sociétés concessionnaires et ont été associés à des objectifs modulés selon les concessions.

Ce système est novateur et constitue une évolution positive. Il souffre cependant de deux défauts : le premier réside dans l'absence de contre-expertise par les services du ministère de l'Écologie, du développement durable et de l'énergie des données transmises par les sociétés et une démarche d'audit pourrait être mise en place pour assurer leur évaluation ; la seconde faiblesse a trait au fait que les indicateurs n'ont de réelle importance que si le non-respect des engagements qui y sont associés trouve une concrétisation – que ce soit par le déclenchement de pénalités ou par l'insertion de nouvelles dispositions dans le contrat de plan suivant. Or, cette traduction s'avère encore insuffisante ; un régime de pénalités a bien été mis en place pour certains indicateurs, mais ses effets financiers restent modestes : le plafond des pénalités ne représente que quelques centaines de milliers d'euros, soit, selon les concessions, entre 0,029 et 0,055 % du chiffre d'affaires.

Le système d'indicateurs est donc prometteur, mais il doit être pérennisé et consolidé pour mieux contribuer au suivi du respect des obligations contractuelles par les sociétés.

La Cour a examiné les autres aspects du suivi du respect de ces engagements. Les cahiers des charges des contrats de plan prévoient, en contrepartie des hausses tarifaires, des travaux d'entretien et la réalisation de nouveaux investissements. Ces mêmes contrats donnent à l'État la faculté de mettre en demeure puis d'exiger des pénalités en cas de non-respect de ces obligations.

L'administration a effectué 503 visites de chantier en 2011 ; la Cour a constaté que celles-ci se concentraient excessivement sur les ouvrages d'art et les constructions nouvelles, au détriment de la vérification de l'état des chaussées et des ouvrages en terre existants. Seuls deux audits ont été consacrés à l'état des chaussées en 2010 et en 2011, dont l'un a constaté une dégradation suffisamment grave pour justifier une mise en demeure. Le contrôle des obligations environnementales est également très limité. La Cour recommande que la politique de contrôle soit mieux formalisée et qu'elle donne davantage de place à la vérification de l'état des chaussées et au respect des obligations environnementales.

Le maintien du bon état des ouvrages d'art fait partie des obligations à la charge des concessionnaires – donc non rémunérées par des hausses de péage supplémentaires à la hausse de 70 % de l'inflation prévue par le décret de 1995. La Cour a constaté que la plupart des sociétés – notamment Cofiroute – fournissent des informations trop limitées sur les opérations menées et sur leur coût. Même si les sommes consacrées sont croissantes et que le réseau autoroutier est plus sûr et mieux entretenu que les autres réseaux routiers nationaux, les moyens consacrés par les concessionnaires se situent encore à un niveau insuffisant compte tenu du vieillissement et de la dégradation du patrimoine. L'analyse des campagnes d'audit révèle pour plusieurs sociétés – en particulier ASF et la SAPN – le mauvais état des ouvrages et la faiblesse des moyens consacrés à leur maintenance. Ces constats particulièrement défavorables n'ont pas conduit l'État à mettre en demeure le concessionnaire, ni a fortiori de lui infliger des pénalités ; ils n'ont pas même eu d'impact sur la négociation du contrat de plan suivant.

La Cour recommande à l'État d'avoir bien davantage recours aux dispositions contraignantes, le défaut d'action pouvant engager sa responsabilité en cas d'accident ; elle conseille également qu'une plus grande importance soit accordée, dans le renouvellement des contrats de plan, au respect par les concessionnaires de leurs obligations de base, en particulier pour ce qui concerne la sécurité des routes et des ouvrages d'art.

Dans l'ensemble, l'administration se refuse à établir un bilan de la situation financière de chaque société, au motif que celle-ci assume le risque d'exploitation de la concession. Cependant, l'évolution de la situation des entreprises constitue un paramètre important pour la négociation du contrat suivant et la Cour invite donc l'État à dresser un bilan de l'exécution de chaque contrat de plan, en exploitant toutes les données permettant de le faire ; elle recommande que les données transmises sur la nature et le coût des investissements réalisés soient plus précises, notamment s'agissant de ceux donnant droit à augmenter les péages.

Le deuxième message du rapport est que la négociation tarifaire ne permet pas de protéger les intérêts de l'État et ceux des usagers. La règle d'évolution des tarifs figure dans un décret de 1995 ; elle garantit une hausse annuelle minimale du tarif kilométrique moyen à hauteur de 70 % de l'inflation. Si un concessionnaire s'engage à réaliser des investissements dans un contrat de plan, cette augmentation peut être supérieure, sans qu'aucun plafond ne soit défini. En pratique, le contrat de plan fixe presque systématiquement la tarification, et la revalorisation est nettement supérieure au plancher. Ainsi, les contrats de plan, qui devaient demeurer l'exception compte tenu de l'état presque achevé du réseau autoroutier, sont, à la demande des sociétés concessionnaires, devenus la règle. On peut en outre s'interroger sur la notion de plancher garanti de hausse, qui interdit toute baisse ou tout gel des péages. Le système repose sur le principe que tous les investissements doivent être compensés par des hausses de tarifs ; par conséquent, les bénéfices des sociétés n'ont pas vocation à être réinvestis ou à permettre une diminution des tarifs. Ce modèle ne peut qu'aboutir à une hausse constante et continue de ceux-ci. Le bien-fondé de cette exception au principe de désindexation des prix a déjà été contesté par la Cour ; à tout le moins, celle-ci recommande qu'un acte réglementaire fixe un plafond d'évolution des hausses de tarifs qui puisse s'appliquer même lorsqu'un contrat de plan a été signé, avec des montants différenciés.

Les hausses tarifaires des dernières années sont fortes. Entre 2009 et 2012, pour les véhicules légers, la progression s'est établie à 2,2 % par an pour la SAPN, ASF et ESCOTA, à 1,9 % pour Cofiroute, à 1,8 % pour APRR et AREA, soit des montants systématiquement supérieurs à l'inflation annuelle – 1,6 % –, à la seule exception de la SANEF. En 2010, le choix de retenir une inflation nulle alors qu'elle était négative a nourri cette augmentation.

Ces augmentations visent à prendre en compte des investissements nouveaux, à hauteur de 1,2 milliard d'euros. Ce niveau et la composition des investissements retenus soulèvent trois critiques. La demande d'investissements supplémentaires n'émane pas principalement de l'État, mais des sociétés ; la question de leur opportunité se pose, en particulier pour la mise en place du télépéage sans arrêt – très présent dans le contrat de Cofiroute, alors que ce type d'investissement serait réalisé même en l'absence de compensation tarifaire.

Compte tenu de l'état de maturité du réseau, les investissements proposés par les concessionnaires possèdent une ampleur plus faible et sont donc plus nombreux. L'administration, qui ne dispose pas d'une doctrine s'agissant des investissements éligibles à la compensation, négocie au cas par cas et ne parvient pas toujours à éliminer ceux qui relèveraient des obligations normales d'entretien du réseau. La Cour recommande une plus grande fermeté dans la limitation des projets éligibles, afin de ne retenir que les plus utiles ; pour ce faire, il convient d'élaborer une doctrine et de l'appliquer.

Enfin, la documentation des coûts prévisionnels des investissements s'avère insuffisante ; les montants retenus se rapprochent plus souvent des estimations des concessionnaires que de celles des experts du ministère. La Cour recommande qu'une contre-expertise soit systématiquement réalisée, formalisée et documentée. Par ailleurs, l'État a très peu mis en oeuvre le dispositif lui permettant de récupérer l'avantage financier découlant des hausses de péages déjà perçues lorsque les investissements concernés sont retardés. L'annexe 7 du rapport consacrée à l'analyse de la renégociation des contrats de plan de Cofiroute et d'APRR illustre – page 96 – ces constats.

La Cour relève également des distorsions au profit des concessionnaires, qui concernent le « foisonnement » et le modèle économique et financier sur lequel reposent les contrats. La notion de foisonnement désigne une pratique conduisant à répartir – en respectant la hausse du tarif kilométrique moyen fixé dans le contrat – les augmentations des péages en fonction du trafic sur les différents tronçons du réseau, afin d'optimiser le chiffre d'affaires.

La Cour avait vivement dénoncé cette pratique qui aurait disparu en 2011. Celle-ci a conduit par le passé à des dérives, notamment en 2006, année où l'excès de recettes procuré par le foisonnement avait représenté près de 1 % du chiffre d'affaires. Le rapport montre que la récupération du foisonnement de 2006 n'a été mise en oeuvre que tardivement et très partiellement ; Cofiroute a obtenu une compensation tarifaire avantageuse de 234 millions d'euros hors taxes en échange de l'introduction d'une clause anti-foisonnement dans son contrat de plan 2010-2014.

L'une des conséquences des pratiques de foisonnement passées réside dans l'hétérogénéité des tarifs au kilomètre entre les différentes possibilités de trajets. Ainsi, 212 parcours en France affichent un prix kilométrique qui est soit supérieur de moitié, soit inférieur de moitié au tarif moyen. La moitié de ces distorsions concernent APRR. Les efforts pour les réduire ont été insuffisants et elles ont même augmenté récemment chez ASF.

Un autre déséquilibre à l'avantage des concessionnaires a trait aux hypothèses sur lesquelles s'appuient les contrats. Les prévisions de trafic se sont presque toujours révélées sous-estimées, au profit du concessionnaire ; l'effet bénéfique de la nouvelle écotaxe sur les poids lourds qui empruntent le réseau non concédé n'a pas été pris en compte dans les contrats de plan les plus récents, alors qu'il devrait entraîner, selon l'estimation du ministère, un surcroît de chiffre d'affaires de 450 millions d'euros hors taxes.

Le taux d'actualisation utilisé pour mesurer la rentabilité des investissements est fixé autour de 8 %, soit un niveau supérieur à celui que retiennent les analystes financiers pour ces entreprises, qui se situe autour de 6 %. Ce choix conduit à une survalorisation du contrat de plusieurs dizaines de millions d'euros au bénéfice du concessionnaire.

Ces avantages mettent en évidence un déséquilibre dans la négociation à l'avantage des concessionnaires. En conséquence, les derniers contrats de plan ont permis aux sociétés d'obtenir la compensation de 1,2 milliard d'euros d'investissements. Le modèle économique ainsi retenu place les entreprises dans une situation très favorable : leur chiffre d'affaires s'est accru en moyenne de 4 % par an entre 2006 et 2011 et leur profitabilité est devenue nettement supérieure à celle des autres entreprises françaises.

Le troisième message du rapport met en lumière un déséquilibre de la position de l'État dans la négociation avec les concessionnaires et propose des pistes pour y mettre fin. Au sein du ministère des Transports, la sous-direction chargée du réseau autoroutier concédé négocie presque seule les contrats de plan et les avenants aux contrats de concession, et il est rare que le ministère de l'Économie et des finances soit associé aux discussions ; or, les sociétés concessionnaires appartiennent à des groupes importants – Vinci et Eiffage notamment. Pour ces groupes, les tractations tarifaires s'inscrivent dans un ensemble plus large d'interactions avec l'État sur d'autres projets à forts enjeux, notamment ferroviaires ou de construction et de concession de bâtiments dans le cadre de partenariats public privé ; la négociation séparée de ces sujets par les différents ministères ne peut que placer l'État en situation défavorable. Dans les rares cas où le ministère de l'Économie et des finances est associé aux pourparlers, la Cour a constaté que la négociation devenait plus équilibrée, si bien qu'elle recommande que soit définie et formalisée une procédure interministérielle de négociation et de prise de décision. Cette procédure pourrait prévoir l'élaboration d'un mandat précis de négociation, avec une définition des besoins des usagers et de l'État en matière d'investissements nouveaux. Un suivi interministériel régulier des discussions devrait être organisé, et le Premier ministre devrait en approuver formellement le résultat.

Pour des raisons juridiques contestables, les hausses de tarifs négociées dans les contrats de plan interviennent avant l'issue de la négociation et l'approbation par décret en Conseil d'État. Ainsi, les concessionnaires atteignent leur objectif principal de la négociation au milieu des discussions, ce qui place l'État en position de fragilité pour la suite des échanges ; il importe de remédier à cette situation.

En conclusion, la Cour des comptes relève que les conditions actuelles d'encadrement des concessions autoroutières ne permettent pas que les intérêts des usagers et de l'État soient suffisamment pris en compte. Dans un contexte où les besoins d'extension et de modernisation du réseau autoroutier sont moindres et où l'amortissement des autoroutes anciennes progresse, il convient de faire évoluer un cadre qui conduit à une hausse continue et importante des tarifs autoroutiers. Cette préoccupation rejoint le souci de préserver le pouvoir d'achat des ménages et de réduire ce qui représente, pour les entreprises utilisatrices du réseau autoroutier, un coût de production qui pèse sur la compétitivité de l'économie.

L'opportunité de conclure presque systématiquement des contrats de plan rassemblant un nombre croissant de projets de faible ampleur – dont l'utilité est souvent contestable et le coût surestimé – doit être discutée ; on pourrait réserver ces contrats aux seules situations nécessitant des investissements lourds. Ainsi, l'absence de contrat de plan deviendrait la règle, ce qui aurait pour conséquence un ralentissement de la hausse des péages, en particulier dans les secteurs amortis et modernisés.

L'outil autoroutier – en concurrence avec d'autres modes de transport – trouve sa finalité dans l'optimisation des flux de transport qui animent le pays, et les sociétés qui concourent à le mettre en oeuvre n'ont pas d'autre vocation que de servir ce dessein. Il faut concevoir la politique tarifaire en ce sens, afin d'allouer les ressources aux emplois les plus pertinents. Une remise en cause du cadre juridique et un changement de modèle économique pour les sociétés concessionnaires s'avèrent nécessaires ; une telle évolution requiert une sélectivité plus stricte des projets d'investissement et une attention plus grande portée au bon entretien des infrastructures, afin de disposer d'autoroutes en bon état à l'issue des contrats de concessions.

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