Intervention de Jean-Marie Tetart

Réunion du 23 juillet 2013 à 17h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Tetart :

Oui, madame la ministre, vous innovez ! Vous innovez en donnant aussi peu de temps aux députés pour examiner, en fin de session extraordinaire un ensemble de documents de près de 900 pages présentant en 216 pages les 84 articles du dispositif. Vous innovez également en termes de concertation avec les parlementaires. Près de 900 amendements ont été déposés par les seuls députés de la majorité, ce qui en dit long sur les relations entre la majorité parlementaire et le Gouvernement, et sur le degré de finalisation du texte qui nous est présenté. Vous auriez pu mettre à profit l'été pour mettre au point un texte mieux ficelé, qui ait meilleure allure (Sourires), et ne nous en proposer l'examen qu'à la rentrée.

La densité et la complexité de ce texte ne nous permettent pas de réagir en quelques minutes à tous les articles. Nous souhaitons néanmoins en évoquer quelques-uns.

Nous aurons peu de désaccords s'agissant du titre II qui traite de l'habitat indigne et des copropriétés dégradées. Les travaux de l'ancien sénateur Dominique Braye, président de l'agence nationale de l'habitat (ANAH), et du sénateur Claude Dilain, nous ont confortés dans notre décision. En revanche, le titre premier nous semble dangereux. Vous souhaitez détendre et réguler le marché du parc locatif privé, pacifier les relations entre propriétaires et locataires, assainir les activités professionnelles immobilières, prévenir et encadrer les expulsions, mais vous imposez l'encadrement des loyers en zone tendue, la garantie universelle des loyers, et une avalanche de nouveaux documents et de dossiers types complexifiant les règles. Ce n'est pas avec ce type de dispositions que vous rassurerez les bailleurs privés actuels et que vous attirerez de nouveaux investisseurs !

On peut presque dire que vous voulez mettre en place une sorte de collectivisation du logement locatif privé par laquelle, entre plafonnement du loyer et charges obligatoires liées au foisonnement des dépenses et contraintes s'imposant aux biens loués, vous déterminez en quelque sorte le revenu maximum auquel peut prétendre le bailleur.

La méthode d'encadrement du loyer que vous proposez sera sans nul doute contre-productive car on observera un alignement progressif des loyers vers le loyer médian + 20 %, alignement qui contribuera à augmenter le loyer médian. Quant à la garantie universelle des loyers à la charge du bailleur en lieu et place des cautionnements volontaires, elle déresponsabilisera les locataires, elle conduira à une fiscalité accrue sur les loyers ou à un prélèvement supplémentaire sur Action Logement, et elle fera naître une nouvelle administration.

Nouvelle taxe, nouvelle administration, nouvel empilement réglementaire tout cela pour un niveau d'impayés de 2,5 % ! N'était-il pas plus simple de renforcer les sanctions envers les tricheurs, et la solidarité avec les plus démunis ? On a l'impression que vous préférez de grands systèmes à de petites mesures efficaces pour améliorer la situation des locataires, à l'exception, il est vrai, de certaines dispositions issues du projet de loi dit « Lefebvre », comme le renforcement des sanctions en cas de rétention abusive du dépôt de garantie, l'action en diminution de loyer en cas de sous-estimation de la surface habitable, l'allégement de la solidarité en cas de colocation, ou encore mise en place d'une grille de vétusté. Nous en prenons acte.

Le titre Ier répond aussi à la stigmatisation à l'égard des professionnels de l'immobilier que vous abordez dès les premières lignes de l'exposé des motifs en évoquant, je cite, « tarifs injustifiés et excessifs, non-respect des obligations, opacité… ». Si vous reconnaissez immédiatement que ces mauvaises pratiques sont le fait d'une minorité, vous n'en remettez pas moins en cause le modèle économique d'une profession qui s'adaptera certainement, mais avec quelles conséquences sur l'emploi du secteur ?

Quant au titre IV, il tente de répondre à l'objectif de construction de 500 000 logements tout en respectant les contraintes de la transition écologique des territoires. Nous partageons bien évidemment vos préoccupations concernant ce qui peut réduire la consommation des zones agricoles et des zones naturelles par une mobilisation des friches industrielles et commerciales, par une densification de l'urbanisation. Pourquoi ne pas modifier l'assiette de la DGF, comme vous venez de l'évoquer ? Nous sommes d'accord pour que la hiérarchie des documents d'urbanisme soit revue au profit du schéma de cohérence territorial (SCoT) et que l'intercommunalité joue un rôle de premier plan dans la responsabilité de l'aménagement du territoire et de l'urbanisation, mais nous n'approuverons cette disposition que si elle s'applique sur une base volontaire en ce qui concerne les PLU. Oui au PLU intercommunal (PLUi), mais pour les intercommunalités qui le décident ! Je crois que nous aurons sur ce point un allié précieux en la personne du président Brottes qui s'est vivement opposé au PLUi lors de la législature précédente.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion