Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame et messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord souligner que ce texte a été élaboré à l’issue d’une très large concertation avec les associations de défense des consommateurs et les professionnels.
La commission des finances s’est saisie pour avis du chapitre III du projet de loi, consacré au crédit et à l’assurance, qui comprend trois articles principaux. L’article 18 prévoit qu’au-delà d’un certain seuil, toute proposition de crédit renouvelable doit être accompagnée d’une proposition de crédit amortissable. L’article 20 améliore les informations des consommateurs souscrivant une assurance affinitaire, afin de limiter le risque de multi-assurance. L’article 21 ouvre, à compter de l’issue de la première année de contrat, la possibilité de résiliation infra-annuelle de certains contrats d’assurance. La consommation de produits d’assurance constitue une dépense contrainte qui grève le budget des ménages pour des montants substantiels. L’INSEE évalue cette charge à 1 400 euros par an pour un ménage moyen et l’évolution du prix des assurances au cours des dernières années a été globalement défavorable aux consommateurs.
Face au constat de dépenses en progression constante sur les dernières années, qui grèvent particulièrement le budget des ménages les plus modestes, le présent projet de loi prévoit deux dispositions tendant à protéger le pouvoir d’achat des ménages en la matière.
Poursuivant le travail engagé lors de l’examen du projet de loi bancaire, la commission des Finances a proposé plusieurs amendements tendant à rééquilibrer le rapport de force entre les consommateurs et les institutions financières, et à améliorer le pouvoir d’achat des ménages.
En rétablissant une forme de symétrie entre assuré et assureur, la faculté offerte au consommateur de résilier ses contrats d’assurance multirisques habitation et responsabilité civile automobile dès la première année vise au même objectif de rééquilibrage. Ce nouveau droit permettra aux consommateurs de mieux faire jouer la concurrence et donc de bénéficier d’offres plus performantes en terme de prix et de services rendus. Je rappelle qu’en dépit du caractère incontestablement concurrentiel de ce marché, les primes d’assurance multirisques habitation ont augmenté trois fois plus vite que l’inflation au cours des trois dernières années. Or, il s’agit là de dépenses contraintes.
Le projet de loi tend également à lutter contre le surendettement des ménages, en favorisant en premier lieu le développement d’offres de crédit alternatives au crédit renouvelable. Pour les achats d’un montant supérieur à mille euros, le crédit renouvelable n’est pas la meilleure des formules et tend à amplifier le surendettement des ménages.
Comme l’a dit le ministre, au cours des cinq dernières années, plus de 200 000 dossiers de surendettement ont été déposés par an en moyenne. Au 31 décembre 2012, 772 000 ménages étaient en cours de désendettement. Or, le crédit à la consommation est présent dans 87 % des cas traités en commission de surendettement, avec en moyenne 4,6 crédits par dossier. Ce qu’il faut, c’est éviter le crédit de trop.
Pour cela, nous voulons davantage responsabiliser les prêteurs par la mise en place d’un registre national des crédits aux particuliers, conformément à l’engagement pris par le Premier ministre lors de la conférence nationale de lutte contre la pauvreté. Cet engagement a été rappelé par le Président de la République devant l’Union nationale et interfédérale des oeuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux.
Conformément aux avis du Conseil d’État, de la Commission nationale de l’informatique et des libertés et de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, ce fichier ne recensera que les personnes ayant des crédits à la consommation, et non les 25 millions de personnes potentiellement concernées.
Le Gouvernement a mis à profit le délai courant entre le dépôt du projet de loi et son examen en première lecture pour travailler sur un dispositif qui assure le respect des libertés publiques sans remettre en cause l’efficacité du registre. La prudence ainsi privilégiée par le Gouvernement doit être saluée, car elle est la condition de la réussite d’une réforme d’ampleur qui doit constituer un élément central de la lutte contre le surendettement.
Je souhaite également insister sur trois évolutions proposées par la commission des finances et adoptées par la commission des affaires économiques.
En premier lieu, l’article 19 bis du projet de loi prévoit la suppression du régime des hypothèques rechargeables, suite à l’adoption d’un amendement porté par le groupe SRC. Ce mécanisme, mis en place par Nicolas Sarkozy, permet de gager du crédit à la consommation sur une hypothèque, c’est-à-dire sur la résidence principale du client. Ce mécanisme a été utilisé de manière intensive aux États-Unis à l’époque des subprimes. Il a abouti à créer un endettement insoutenable pour certains ménages qui sont devenus insolvables dès que le marché immobilier s’est retourné, et à tirer artificiellement la croissance économique par le crédit à la consommation.
C’est donc un mécanisme qui est non seulement critiquable d’un point de vue social, mais également dangereux sur le plan économique. Sa suppression est donc pleinement justifiée. À une hypothèque sur l’avenir, nous préférons une sécurité au présent.
En deuxième lieu, l’article 19 octies prévoit la remise d’un rapport sur la résiliation, en cours de contrat, des contrats d’assurance emprunteur. Nous avons déjà débattu de ce sujet à plusieurs reprises dans cet hémicycle. Nous sommes nombreux à avoir le sentiment qu’une telle évolution pourrait libérer d’importantes réserves de pouvoir d’achat. Le rapport comprendra une étude d’impact qui fournira une base pour légiférer le cas échéant, peut-être en deuxième lecture.
Enfin, l’article 21 bis applique aux assurances collectives de dommages l’ensemble des obligations d’information et de protection du consommateur requises pour les assurances individuelles. Ces assurances se sont fortement développées ces dernières années, par exemple les assurances sur les téléphones portables, sans que le cadre législatif ne se soit adapté.
Là encore, l’objectif est de donner au consommateur la possibilité de profiter d’un rapport de force plus favorable avec la compagnie d’assurance qui lui propose ce type de contrats.
Pour compléter le travail ainsi engagé en commission, je propose, avec nos collègues Razzy Hammadi, Thomas Thévenoud et Régis Juanico, de faciliter la mobilité bancaire, en rendant obligatoire la proposition d’un service de redirection des comptes à tout client souhaitant ouvrir un compte, qu’il soit particulier ou professionnel. Il introduit en outre un dispositif spécifique d’information pour les chèques présentés au paiement sur un compte clos, afin d’éviter les interdictions bancaires qui peuvent en découler. Cette information pourrait être faite par exemple par téléphone, courriel ou courrier.
Nous demandons également au Gouvernement de présenter au Parlement un rapport sur la mise en oeuvre technique et opérationnelle de la portabilité du numéro de compte bancaire, en s’inspirant en particulier des exemples étrangers. Cet amendement, que nous examinerons dans les prochains jours, est guidé par cette même volonté de donner au consommateur une plus grande liberté dans ses choix, de permettre une baisse des prix des services financiers et, partant, d’améliorer le pouvoir d’achat des ménages.
Les consommateurs ont souvent du mal à changer de banque, particulièrement en France. Selon une étude récente, quatre Français sur dix déclarent qu’ils envisageraient de changer de banque s’ils pouvaient le faire simplement, grâce à la portabilité du numéro de compte. Les partisans de la concurrence libre et non faussée, que nous avons eu l’occasion d’entendre à plusieurs reprises, seront sans doute partisans de cet amendement.