Intervention de Jonas Tahuaitu

Séance en hémicycle du 23 juillet 2013 à 21h30
Élection des sénateurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJonas Tahuaitu :

Or, nous l’avons dit et répété, il n’est pas acceptable qu’une formation politique puisse à elle seule modifier les règles électorales à quelques mois des élections. Hélas, ce projet de loi n’est pas un cas isolé. Voilà un an qu’une grande part de notre travail législatif est consacrée au démantèlement progressif de l’ensemble de notre édifice électoral.

Après avoir modifié le mode de scrutin pour les élections municipales dans les communes de plus de 1 000 habitants, pour les conseillers communautaires, après avoir créé le scrutin binominal pour l’élection des conseillers départementaux, après avoir figé une partie du collège électoral en décalant l’élection départementale et l’élection régionale, puis modifié le mode de scrutin des sénateurs représentant les Français établis hors de France, vous vous attaquez désormais aux élections sénatoriales.

Le moins que l’on puisse dire est que la matière électorale nous aura largement occupés ces derniers mois, sans considération du principe démocratique qui interdit que l’on modifie les règles électorales à moins d’un an des élections.

Un examen des principales dispositions du texte nous permet de constater que les objectifs qu’elles visent ne sont que des prétextes à cette manoeuvre électorale. Tout d’abord, nous sommes opposés à la désignation d’un délégué supplémentaire par tranche de 800 habitants, au lieu de 1 000 actuellement, disposition qui vise selon vous à « adapter le collège sénatorial aux évolutions démographiques ». En 2000, le Conseil constitutionnel a rappelé que le corps électoral devait être essentiellement composé de membres d’assemblées délibérantes des collectivités. Or ces délégués qui ne sont pas élus locaux seront en mesure d’élire deux sénateurs. Dans ces conditions, on peut difficilement prétendre que les sénateurs représentent les collectivités territoriales.

Par ailleurs, en voulant renforcer la prise en compte du poids démographique des collectivités, ce texte nie la spécificité du rôle du Sénat, qui est de représenter les collectivités territoriales. De ce fait, nous craignons pour l’avenir que vous réservez à la Haute assemblée.

Le renforcement de la représentation des communautés urbaines se fera inévitablement au détriment de la ruralité, dont vous n’avez cessé de réduire le poids. En effet, l’élargissement du collège se traduira par une augmentation de 3 175 délégués issus du monde urbain, ce qui aura un réel effet dans certains départements. De toute évidence, vous vous attaquez une fois de plus à la ruralité.

Nous sommes tout autant opposés à l’abaissement du seuil au-delà duquel les sénateurs sont élus au scrutin proportionnel. Nous notons que le Gouvernement se fait, selon les circonstances, le défenseur de modes de scrutin différents : alors que vous faisiez l’éloge du scrutin majoritaire lors de l’adoption du scrutin binominal, vous présentez désormais un texte qui tend à renforcer le poids de la proportionnelle pour l’élection des sénateurs. Vous êtes, monsieur le ministre, bien difficile à suivre…

Le projet de loi entend favoriser le pluralisme en évitant la représentation politique uniforme d’un département. Or cette disposition risque plutôt de renforcer le rôle des partis politiques dans la sélection des candidats, au détriment de celui des élus.

Autre objectif, que bien sûr nous partageons, le renforcement de la parité : rien ne prouve que l’abaissement du seuil permette à un nombre plus important de femmes d’accéder au mandat de sénateur. C’est d’ailleurs à l’Assemblée nationale, où le scrutin est uniquement majoritaire, que l’on compte le plus grand nombre d’élues.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, nous désapprouvons cet énième tripatouillage électoral, dont les objectifs affichés ne servent qu’à dissimuler une manoeuvre électorale. Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe UDI votera contre ce projet de loi.

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