Intervention de Meyer Habib

Séance en hémicycle du 20 juin 2013 à 9h30
Déblocage exceptionnel de la participation et de l'intéressement — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMeyer Habib :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, nous examinons à nouveau aujourd’hui, en deuxième lecture, la proposition de loi du groupe socialiste portant déblocage exceptionnel de la participation et de l’intéressement.

Ce texte n’a rien de révolutionnaire. Des opérations de déblocage exceptionnel de l’épargne salariale ont en effet déjà été mises en place sous la précédente majorité afin de relancer la consommation en libérant le pouvoir d’achat des ménages. Cela avait été fait notamment en 1994, puis en 2004, en 2005, et plus récemment en 2008.

Les députés du groupe UDI ont été et sont toujours favorables à de telles mesures, qui permettent effectivement de redonner un peu d’oxygène aux ménages.

Nous nous félicitons d’ailleurs que les députés socialistes se soient ralliés à cette idée, alors qu’ils avaient auparavant fortement critiqué les précédents déblocages exceptionnels, en allant jusqu’à déposer des amendements de suppression de cette mesure en 2008.

Fidèles à nos positions, et dans la logique d’opposition constructive qui anime le groupe UDI depuis le début de cette législature, nous apporterons donc notre soutien à cette proposition de loi.

Pour autant, permettez-moi de relever l’incohérence dont est empreinte l’action du Gouvernement et de sa majorité.

Alors que vous faites aujourd’hui la promotion de l’intéressement et de la participation, il y a à peine un an vous avez choisi dans le projet de loi de finances rectificative pour 2012 d’augmenter de 8 % à 20 % le forfait social, soit une augmentation de 150 %. Vous conviendrez qu’une taxation aussi forte de ce mécanisme n’aura pas pu contribuer à le promouvoir.

Je tiens d’ailleurs à rappeler que les députés du groupe UDI s’étaient opposés à une telle hausse du forfait social. Ainsi, des amendements avaient été déposés visant, sinon à supprimer cette augmentation, à la lisser dans le temps afin de ne pas pénaliser exagérément et brutalement les salariés, ni de dissuader trop fortement les entreprises de mettre en place des dispositifs d’intéressement ou de participation.

Dans le contexte de l’adoption de cette hausse drastique du forfait social au mois de juillet dernier, nous trouvons particulièrement étonnante la proposition de loi visant à autoriser un déblocage exceptionnel de la participation et de l’intéressement, à peine un an après.

Nous tenons également à souligner qu’une telle mesure de déblocage exceptionnel ne peut pas constituer, à elle seule, un plan de relance du pouvoir d’achat des ménages et de la consommation.

C’est pourtant ce que le Gouvernement semble vouloir faire croire aux Français, si l’on se fie aux déclarations du Président de la République lors de son intervention télévisée de mars dernier, lors de laquelle il avait fait la promotion de cette opération de déblocage exceptionnel.

Il est absolument nécessaire que d’autres mesures cohérentes soient prises en parallèle de celle que nous discutons ici.

Pour la première fois depuis 1993, le pouvoir d’achat des ménages est en baisse, hélas ! Il y a urgence à agir.

Il est donc regrettable de constater que ce déblocage exceptionnel de la participation et de l’intéressement soit la seule solution à laquelle le Gouvernement ait pensé pour améliorer le pouvoir d’achat des ménages, alors que le matraquage fiscal n’a pas cessé depuis l’arrivée au pouvoir de la nouvelle majorité.

La suppression de la défiscalisation et de l’exonération de charges sur les heures supplémentaires, le gel du barème de l’impôt sur le revenu, l’augmentation de la CSG, l’augmentation de la redevance audiovisuelle, ou encore la suppression du forfait applicable au versement des cotisations sociales pour les salariés intervenant au domicile des particuliers sont autant de mesures qui n’ont cessé de ponctionner le pouvoir d’achat des ménages depuis bientôt un an, à hauteur de 28 milliards d’euros.

Après cela, le Gouvernement, qui avait promis la stabilité fiscale après 2013, a annoncé aux Français qu’il manque 20 milliards d’euros pour boucler le budget pour 2014. Augmentation de la TVA au 1er janvier 2014, abaissement du quotient familial, mesures à venir sur les retraites, les impôts continueront donc hélas d’augmenter.

Les Français sont inquiets, et selon un sondage publié récemment par 60 millions de consommateurs, 77 % d’entre eux s’attendent à ce que leur pouvoir d’achat diminue encore en 2013.

Or le déblocage exceptionnel de la participation et de l’intéressement ne constitue pas véritablement un coup de pouce supplémentaire au pouvoir d’achat : les salariés auront juste la possibilité d’utiliser plus rapidement que prévu ces sommes qu’ils ont épargnées.

C’est pourquoi les députés du groupe UDI ont proposé concrètement plusieurs mesures complémentaires au déblocage exceptionnel de la participation et de l’intéressement, pour le pouvoir d’achat des Français. Ces mesures, que nous vous avions soumises en première lecture, s’inscrivaient dans l’esprit de la loi de 2008 pour le pouvoir d’achat. Nous déplorons qu’elles aient toutes été rejetées par le Gouvernement.

En premier lieu, nous proposions de pérenniser la possibilité pour les salariés de monétiser leurs journées de réduction de temps de travail et les droits stockés sur leur compte épargne-temps.

Il s’agissait de permettre aux salariés et à leurs employeurs qui souhaitent augmenter leur activité de convertir un certain nombre de droits à congés en argent.

Il aurait été particulièrement approprié de remettre en place cette mesure de manière pérenne dans le contexte très difficile dans lequel se trouvent de nombreux salariés aujourd’hui, et notamment les 9 millions de salariés de condition souvent modeste qui ont perdu entre 450 et 500 euros par an à la suite de la suppression de la défiscalisation et de l’exonération de charges sur les heures supplémentaires.

En outre, et dans un souci d’équité, nous proposions de mettre en place une autre mesure de soutien du pouvoir d’achat en direction des salariés des petites entreprises qui ne sont pas assujetties à l’obligation de versement de la participation, ainsi que des salariés des entreprises du secteur de l’économie sociale et solidaire.

Il s’agissait ici d’ouvrir, pour ces entreprises, la possibilité de verser aux salariés une prime exceptionnelle dont les partenaires sociaux pourront décider du principe, du versement et des modalités d’attribution.

Nous espérions que les députés socialistes, qui ont découvert sur le tard les vertus du déblocage exceptionnel de la participation et de l’intéressement, verraient également les bienfaits de ces mesures pour le pouvoir d’achat, et soutiendraient leur mise en place.

Force est de constater qu’il vous reste malheureusement, mes chers collègues, un chemin considérable à accomplir.

Nous sommes toutefois heureux que notre amendement sur le bilan de cette mesure de déblocage ait été adopté à l’unanimité, et nous en remercions M. le rapporteur. En effet, aucun bilan de cette mesure n’avait été fait en 2004 ni en 2008, ce qui était à nos yeux regrettable.

Je le redis : le déblocage exceptionnel de la participation et de l’intéressement est une mesure qui peut constituer un complément utile de pouvoir d’achat, mais elle ne peut en revanche être la seule perspective offerte aux Français alors que le Gouvernement ne cesse d’augmenter leurs impôts.

C’est pourquoi les députés du groupe UDI ne s’opposeront pas à cette mesure, qui est bien la première prise par ce Gouvernement en faveur des salariés.

Enfin, nous renouvelons notre appel solennel au Gouvernement afin que celui-ci répare les erreurs commises depuis son arrivée au pouvoir et mette en place immédiatement un véritable plan pour le pouvoir d’achat des Français et la compétitivité des entreprises de notre pays.

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