Nous avons déjà plusieurs fois décrit notre position. Nous partons d'un postulat de base, tiré de l'exemple de Fukushima : un accident est possible en Europe. Notre territoire est densément peuplé : un accident, où qu'il se produise, peut donc avoir des conséquences directes ou indirectes sur les pays voisins.
Nous devons donc nous organiser en prévision d'une crise. Nous devons partager suffisamment de choses avec nos voisins pour pouvoir, en cas de crise, réagir de manière coordonnée. Il s'agit notamment de partager les informations, qui sont difficiles à traiter en cas de crise. Nous l'avons expérimenté nous-mêmes au moment de l'accident au Japon : collecter et analyser les informations est une tâche extrêmement lourde. Pour être clair, nous avons atteint, dans le cas de Fukushima, les limites de nos capacités de gestion de crise. J'imagine donc que dans le cas d'un accident en Europe, qui nous concernerait directement ou qui concernerait nos plus proches voisins, cela poserait problème. Il faut donc mettre en commun, sous l'autorité du pays dans lequel s'est produit l'accident, un certain nombre de moyens. C'est la première chose à faire en cas de crise.
Il est évident que la sûreté des installations frontalières intéresse aussi les pays voisins. Nous parlions tout à l'heure des commissions locales d'information : à Fessenheim, par exemple, le groupe des participants à la CLI s'est progressivement élargi, jusqu'à accueillir des Allemands. Dans d'autre cas, ce sont les Belges qui ont été concernés. Il convient donc de s'attacher à ce que les commissions locales d'information s'ouvrent progressivement aux pays voisins – avec leur accord, bien entendu, car elles sont indépendantes.
Dernier point : l'autorité de sûreté. De mon point de vue, il ne doit y avoir qu'un seul gendarme. On ne peut pas mettre en place un système avec plusieurs gendarmes. Certes, il existe ici ou là des autorités de contrôle très pertinentes, mais il faut que le responsable des décisions – celui qui rendra des comptes le jour venu – soit clairement identifié. Une fois que ce principe est posé, toutes sortes de collaborations sont envisageables, comme la prise d'avis. Nos amis belges nous ont ainsi demandé notre avis à un stade intermédiaire du traitement de la cuve d'une de leurs centrales. Nous leur avons transmis notre avis par écrit, et l'avons même rendu public. Il n'en reste pas moins qu'il leur revient de décider en dernier ressort. Je ne peux pas décider en leur nom.