Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, M. Bartolone a souhaité, dans sa dernière conférence de presse du 25 septembre, ouvrir l'Assemblée nationale au public. Cette initiative tombe à pic, car, bientôt, notre Parlement ne sera plus qu'un musée où l'on se promènera en famille le week-end pour contempler les fresques d'un passé révolu, et non une institution où se décide réellement l'avenir de la Nation…
Dans les ouvrages de droit constitutionnel, on lit qu'un État souverain se caractérise par le droit de battre monnaie, d'avoir des frontières, d'écrire ses lois.
Dans les ouvrages d'histoire, on rappelle également que les États Généraux de 1789 ont été convoqués pour répondre aux revendications sur l'égalité devant l'impôt et le besoin de contrôle des finances de l'État par le peuple.
Aujourd'hui, que reste-t- il de cet héritage juridique et historique, alors que 80 % de nos règles de droit nouvelles sont issues de textes communautaires ?
Que reste-t-il du contrôle de nos frontières après Schengen, l'OMC, et les principes de libre circulation généralisés, englobant autant les hommes que les capitaux, les biens que les services ?
Quel sera notre rôle, lorsque l'Union européenne pourra nous dicter notre budget et par-là même nos grands choix de politiques publiques ?
Alors je sais, vous m'objecterez que la loi organique que nous devons examiner ne prévoit pas, en droit, un tel transfert de pouvoir, qu'elle entend seulement mener à l'orthodoxie budgétaire en imposant une simple norme pluriannuelle de déficit structurel.
En réalité, elle organise une véritable mise sous tutelle du Parlement. Selon moi, se faire dicter des consignes, même s'il vous revient de les enregistrer, constitue effectivement un transfert de souveraineté. On nous encourage à résorber notre déficit, mais pour cela, il faut passer la main. Juste fin, mais dangereux moyens lorsque l'on connaît l'idéologie ultralibérale défendue par notre nouveau gestionnaire !
La notion de déficit structurel, coeur du mécanisme de la loi organique, est déjà un indice de ce danger. En ne définissant pas de manière claire les notions, l'Europe se réserve le soin de déterminer le périmètre de son contrôle. C'est l'Europe qui interprétera elle-même le principe de subsidiarité et définira ce qu'elle sait mieux faire que nous…
Et pour ceux qui trouvent que j'exagère, je les renvoie à ce qui est annoncé pour le prochain sommet européen des 18 et 19 octobre. M. Van Rompuy y proposera que des contrats de réformes structurelles soient signés avec les pays de la zone euro, afin que les enveloppes du futur budget européen ne soient débloquées qu'à la condition que les pays respectent les orientations définies par Bruxelles.
Alors que nous n'avons même pas encore voté le traité et la loi organique, la prochaine étape du dispositif est donc claire. Attendez-vous à la privatisation en cascade des services publics, à la découpe de l'assurance maladie, au délitement des prestations de retraite. La messe est dite, et c'est à marche forcée que l'Europe entend exercer son contrôle sur nos politiques.
On veut nous faire croire que Bruxelles serait plus à même que le peuple souverain de mettre directement fin aux années de déficits excessifs. Vaste supercherie, lorsque l'on sait que ceux qui dirigent l'Europe défendent la même idéologie que ceux qui nous ont conduits à la faillite !
Leur but n'est pas tant d'aider les États à contenir leurs déficits que de faire main basse sur leur pouvoir de décision et d'oeuvrer pour un gouvernement européen, sans légitimité démocratique aucune.
Combien de citoyens sont aujourd'hui capables de citer seulement le nom de trois commissaires européens en exercice ? Chers collègues, faites vous-même le test et demandez-vous s'il est normal que nous ignorions jusqu'à l'identité même de ceux qui, demain, auront une main déterminante sur les politiques publiques de notre pays.
Pour finir, je prendrai à témoin les Français.
Le Front national a toujours plaidé pour la maîtrise et l'équilibre des comptes publics. Qu'on ne s'y trompe pas ! Nous sommes pour la discipline budgétaire, mais pas à n'importe quel prix !
Ce sont les majorités de droite et de gauche qui se sont succédé depuis trente-cinq ans qui ont enfoncé la France dans la spirale du déficit et de la dette, bientôt lourde de 1 800 milliards d'euros. Elles l'ont fait en succombant à la facilité de la dépense publique et en transformant l'État providence en un open bar pour toute la misère du monde.
Et pour en sortir, ce sont les mêmes qui, sans vous consulter par référendum, sans pour autant admettre leurs erreurs, vous disent aujourd'hui comment faire pour résorber cette dette : confier le pilotage de notre budget à d'autres.
En définitive, c'est le crime parfait : l'endettement excessif, c'est l'alibi ; le contrôle du déficit structurel, l'arme ; le Conseil constitutionnel, le complice ; la France, la victime !