Intervention de Étienne Blanc

Séance en hémicycle du 8 octobre 2012 à 15h00
Programmation et gouvernance des finances publiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉtienne Blanc :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce débat aurait pu nous offrir l'occasion d'entendre le Gouvernement sortir d'une certaine ambiguïté. Mais le moins qu'on puisse dire, c'est que, dans ce débat sur la loi organique, le Gouvernement aura eu exactement le même discours que sur le traité européen : un discours parfaitement ambigu.

Voici quelques jours, j'ai apostrophé le ministre délégué chargé des affaires européennes en lui disant : « Monsieur le ministre, dites aux Françaises et aux Français que, dans ce traité, il y a tous les éléments pour priver la France des outils et des moyens de politiques keynésiennes. » Le ministre m'a répondu : « Pas du tout, vous vous trompez ! » Il a même achevé son propos en me disant : « Si vous pensez que, dans le traité, figurent les moyens d'empêcher le Gouvernement de mettre en oeuvre des politiques keynésiennes, surtout ne le votez pas. »

La réalité, monsieur le ministre, vous le savez, c'est que, dans le traité comme dans la loi organique, le Gouvernement sera contraint et que vous ne pourrez plus mener comme vous l'entendez les politiques de dépenses publiques, les politiques keynésiennes qui font encore florès à gauche.

Deuxièmement, lorsque nous avons expliqué que ce traité était d'inspiration profondément fédérale, le ministre nous a répondu : « Pas du tout, le Gouvernement garde l'intégralité de sa souveraineté. »

Voilà qu'aujourd'hui, dans la loi organique qui décline ce traité, les deux sujets se posent à nouveau.

Première question, et c'est là qu'il faut enfin sortir de l'ambiguïté et dire la vérité aux Français : le Gouvernement pourra-t-il continuer, comme nous le faisons malheureusement depuis trop longtemps, à supporter des dépenses publiques, des politiques sociales, avec des objectifs certes louables, pour soutenir la consommation, générer de la fiscalité, notamment avec la TVA, et du chiffre d'affaires pour nos entreprises, mais aussi à crédit et dans les déficits ? Évidemment non, et quand le Front de gauche affirme que le Gouvernement s'en privera, il a raison. Pourquoi le Gouvernement ne le dit-il pas ? Or c'est une bonne chose pour la France que de revenir sur ces politiques keynésiennes qui ont été catastrophiques pour nos finances publiques.

Second sujet – et là c'est encore plus extraordinaire –, celui de la souveraineté. Nous sommes aujourd'hui dans une situation bien curieuse. Le traité qui nous amène à discuter du présent texte prévoit à son article 8, alinéa 3, un contrôle des dispositions de notre loi organique par la Cour de justice européenne. C'est sans précédent dans l'histoire de notre République ! Nous adoptons une loi organique et, si un État membre de la zone euro – laquelle inclut certes des États importants qui en sont des piliers, comme l'Allemagne ou l'Italie, mais aussi d'autres dont l'influence est bien moindre, par exemple Malte ou Chypre, sans vouloir être péjoratif – si l'un de ces États, dis-je, estime que notre loi organique n'est pas suffisamment contraignante, il pourra saisir la Cour de justice européenne ; celle-ci jugera si cette loi est suffisamment contraignante pour le respect des dispositions de l'article 3. Et, sans rougir, le Gouvernement vient nous dire : « Ce n'est pas du tout un traité fédéral traduisant un quelconque abandon de souveraineté »…

Monsieur le ministre délégué, nous sommes ici depuis quinze heures. Nous attendons du Gouvernement qu'il dise aux Françaises et aux Français la vérité.

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