Intervention de Christophe Caresche

Séance en hémicycle du 8 octobre 2012 à 15h00
Programmation et gouvernance des finances publiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Caresche :

Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, l'examen du projet de loi organique relatif à la programmation et à la gouvernance des finances publiques nous permet aujourd'hui d'apprécier la nature réelle de ce qu'impliquent nos engagements européens, et la part importante de souplesse que comporte le traité sur la stabilité examiné la semaine dernière.

Sur ce plan, monsieur Blanc, votre interprétation de la position de la France lorsque vous étiez au pouvoir n'est pas la mienne. Je pense que la France a essayé de peser pour que ce traité garde une certaine souplesse dans son application.

Je ne reviendrai pas sur l'équilibre entre la nécessaire solidarité européenne, l'indispensable discipline qu'elle implique, et l'impérieuse ambition qui doit inspirer la coordination de nos politiques pour conjurer les pièges de l'austérité. Grâce aux importantes avancées de la Banque centrale européenne dans la solidarité envers les plus vulnérables, au respect rigoureux de nos objectifs budgétaires et à la voie désormais tracée d'une politique européenne de croissance assise sur le pacte de juin dernier et la future taxe sur les transactions financières, les pièces du puzzle se mettent désormais en place.

C'est à un autre équilibre que s'attache, de manière fort opportune, le projet de loi qui nous est soumis : l'équilibre entre, d'une part, la coordination et la surveillance européennes et, d'autre part, le droit des nations à déterminer les voies concrètes de leur progrès économique et social, droit auquel nous sommes, au groupe socialiste, extrêmement attachés.

À cet égard, l'inspiration du dispositif proposé peut se résumer aisément : il invite les autorités politiques à assumer – j'emploie le terme à dessein –, sous le regard de nos compatriotes et sous la surveillance de nos partenaires, leurs choix économiques et budgétaires.

Assumer, d'abord, la trajectoire budgétaire, c'est-à-dire in fine notre degré de responsabilité envers les générations futures.

Assumer et non pas contraindre. Le Président de la République a choisi de refuser la camisole de force de l'inscription d'une règle d'or dans la Constitution. Ce n'était pas un choix de circonstance, mais un choix motivé par des raisons de fond, notamment la crainte qu'une telle inscription prive le Parlement et le Gouvernement de toute marge de manoeuvre, de toute appréciation en matière budgétaire. Sur ce plan, nous avons avec l'opposition une différence majeure, qu'il ne faut pas sous-estimer.

Le Président de la République a préféré retenir la solution d'une loi organique, dont la logique est profondément différente. Elle n'est pas moins contraignante mais la contrainte s'exerce différemment. Elle obligera le législateur à clairement mettre sur la table le chemin qu'il retient vers l'assainissement budgétaire. Elle l'obligera à prendre la part de ses engagements européens, en s'appuyant sur la cible de l'objectif à moyen terme, entendu dans le respect du traité sur la stabilité. Et les lois de programmation devront comporter tous les éléments permettant une analyse précise et détaillée de la qualité du chemin proposé.

Pour autant, cette trajectoire, librement fixée, ne s'imposera pas directement aux lois de finances. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision sur le traité, a été parfaitement clair sur ce point. Pas plus qu'il ne reviendra sur sa jurisprudence constante de ne pas contrôler la conformité d'une loi à un traité, il ne censurera une loi de finances au motif qu'elle s'écarte de la trajectoire déterminée par la loi de programmation. Mais, et c'est ici l'innovation décisive, les majorités, certes libres d'adopter les budgets de leurs choix, devront très clairement s'en expliquer et assumer leurs orientations. Elles ne pourront pas se cacher derrière des prévisions biaisées, une stratégie que nous avons bien connue lors de la dernière mandature. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

L'institution du Haut conseil des finances publiques, doté de toutes les garanties d'indépendance nécessaires, vise précisément à mettre en place la transparence indispensable. Il s'exprimera en effet sur la qualité des prévisions macroéconomiques, et sur la cohérence des choix et des perspectives budgétaires au regard des lois de programmation et de nos engagements européens. Il n'exercera certes aucun pouvoir de contrainte, mais en dévoilant la nature réelle des choix proposés, il obligera chacun à prendre, là encore, ses responsabilités.

Ainsi, une loi de finances pourra s'écarter du chemin dessiné dans la loi de programmation. Mais dans ce cas, ses auteurs devront s'en expliquer, tant face à leur opinion publique que face à nos partenaires européens,…

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