Intervention de Dominique Lefebvre

Séance en hémicycle du 8 octobre 2012 à 15h00
Programmation et gouvernance des finances publiques — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Lefebvre :

L'examen de ce projet de loi organique soulève trois questions simples : ce texte est-il utile et nécessaire ? Permettra-t-il au Gouvernement de mieux préparer les lois de finances et de financement de la sécurité sociale ? Donnera-t-il au Parlement les moyens de mieux légiférer, dans le strict respect de sa souveraineté ? La réponse est oui, sans hésitation, d'autant que les travaux en commission ont permis de préciser et d'améliorer le texte. Et c'est, monsieur le ministre, un bon texte.

Partant de l'obligation de mettre en place une procédure de programmation et de gouvernance des finances publiques concourant à l'objectif d'équilibre structurel, vous proposez en effet un dispositif qui renforce la transparence et la crédibilité de la procédure budgétaire et, en ce sens, complète utilement la LOLF, tout en laissant au Gouvernement et au Parlement la pleine responsabilité de leurs choix politiques.

J'entends bien, surtout à l'extrême gauche de cet hémicycle, mais aussi à l'extrême droite, que cette procédure représenterait un « carcan ». Je ne vois pour ma part aucune atteinte à la liberté du Gouvernement ni à la souveraineté du Parlement, le premier ayant toute latitude pour décider et du rythme, et des ajustements nécessaires pour atteindre l'équilibre structurel des finances publiques, le second gardant pleinement son pouvoir d'appréciation et de vote sur la base des propositions du Gouvernement.

La création d'un Haut conseil des finances publiques, qui viendra utilement compléter les travaux déjà réalisés, conformément à sa mission constitutionnelle, par la Cour des comptes sur l'exécution budgétaire et la situation des finances publiques, ne met en rien en cause le pouvoir de proposition du Gouvernement ni celui de décision du Parlement.

Par ses avis, ce Haut conseil rendra le débat démocratique et public plus transparent. Au mieux, cela crédibilisera la procédure budgétaire, au pire cela mettra au jour des divergences dans l'appréciation de la situation économique et des politiques budgétaires à conduire, qui auront alors à être justifiées et assumées.

Que ce soit là une contrainte de transparence, c'est l'évidence. Mais cela ne peut être interprété comme un carcan, sauf à refuser un débat démocratique éclairé devant nos concitoyens !

J'entends surtout, de la part des tenants du « carcan », un refus de soutenir l'objectif d'équilibre structurel des finances publiques ainsi que son corollaire en 2013 : le retour du déficit public à 3 %. Mais cet objectif d'équilibre structurel n'empêche en aucune manière de conduire des politiques contracycliques keynésiennes ou néo-keynésiennes. Ce n'est pas une invention libérale au profit de je ne sais quels intérêts financiers. C'est juste un acte de responsabilité vis-à-vis de notre jeunesse.

Rappelons en effet que le déficit public, c'est de la dette, c'est-à-dire ni plus ni moins que des charges que nous transmettons à nos enfants. Autant la dette qui a pour contrepartie des investissements d'avenir, ou celle qui vise à pallier un manque de croissance ponctuel et à soutenir l'activité, sont légitimes, autant la dette qui transfère aux générations futures des charges qui ne sont pas payées aujourd'hui faute de courage relève d'une totale irresponsabilité.

C'est bien ce qu'a connu la France depuis dix ans, notamment lorsque le précédent gouvernement s'est exonéré de ses obligations, pourtant prévues par une loi organique, et a à nouveau transféré une partie de la dette sociale à la CADES. Cette dette sociale, qui atteint désormais 200 milliards, n'est que la traduction de notre irresponsabilité collective vis-à-vis des générations futures, sur le dos desquelles nous nous payons notre niveau de vie actuel.

Rappeler cela, comme redire encore et toujours le laxisme dont la droite a fait preuve depuis 2002 dans la gestion des finances publiques, laxisme qui s'est traduit par l'explosion de la dette avant même le début de la crise financière et économique et de la crise politique de la zone euro qui en a résulté, permet de relativiser ce que dit la droite de cet hémicycle à l'occasion de ce débat.

Que dites-vous sur ces bancs, et que signifient les amendements que vous avez déposés ? Que vous n'avez pas su faire preuve de volonté et de responsabilité pour maîtriser les déficits et la dette. Que vous n'avez pas su résister à celles de vos clientèles qui exigeaient des baisses d'impôts, qui ont été financées par la dette. Qu'il vous faut donc, faute de responsabilité et de courage politique, vous en remettre à des mécanismes d'ajustement automatiques et brutaux, qui ne permettraient plus de conduire des politiques propres à soutenir la croissance et adaptées à la conjoncture économique. Et que vous êtes prêts pour cela à remettre en cause la souveraineté de cette assemblée. Bref, que vous entendez vous situer au degré zéro de la responsabilité politique !

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