Intervention de José Cambou

Réunion du 11 septembre 2013 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

José Cambou, secrétaire nationale de France nature environnement :

Depuis plusieurs dizaines d'années, la fédération France nature environnement et les associations de notre mouvement sont impliquées dans le dossier de l'air, en France comme à l'échelon européen.

Dès 1996, la France a joué un rôle précurseur non seulement sur le plan législatif, grâce à la loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, mais du fait de la qualité de son réseau de surveillance, des modalités d'association de ceux qui élaborent les plans régionaux pour la qualité de l'air (PRQA) ou les PPA, et de la composition des AASQA.

Notre pays ne figure plus, cependant, parmi les bons élèves de l'Union européenne. Il ne respecte pas les directives qu'il a pourtant adoptées. Les condamnations qui l'ont sanctionné – pour dépassement du plafond de polluants ou insuffisance des plans d'action – étaient prévisibles. Le 8 janvier, il n'y avait aucun représentant politique français lors de la journée d'ouverture de l'année européenne de la qualité de l'air, en présence du commissaire européen de l'environnement. (Murmures sur les bancs UMP) En outre, la France n'a pas répondu à la consultation de la Commission européenne sur la révision de la stratégie de la qualité de l'air.

Les sources de pollution – chauffage, activités industrielles et agricoles, transports terrestre, aérien et maritime – sont multiples, comme les polluants. Dans un avis du 12 juillet 2012 sur la sélection des polluants à prendre en compte dans l'évaluation des risques sanitaires pour les études d'impact des infrastructures routières, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) indique : « Plus de 380 polluants ont été recensés en lien avec des infrastructures routières. L'identification de ces polluants couvrait différentes origines d'émission, incluant celles issues des véhicules, celles liées à l'usure, au fonctionnement et à l'entretien des véhicules et de l'infrastructure routière. » Dans ce seul domaine, soixante-dix-sept nouveaux polluants ont été recensés depuis 2004, en lien avec de nouvelles technologies ou de nouvelles découvertes.

Les effets sanitaires de la pollution de l'air sont identifiés grâce aux études toxicologiques et épidémiologiques françaises et internationales : problèmes respiratoires ou cardiovasculaires, cancers. On connaît en outre les effets mutagènes et cancérigènes de certains polluants. On peut cependant progresser dans la connaissance des « effets cocktails », ainsi que des interactions entre polluants atmosphériques et agents physiques, comme le bruit et les ondes. Le chiffre de 20 à 30 milliards d'euros, cité par Régine Lange, ne concerne que l'air extérieur et porte uniquement sur la France métropolitaine.

On connaît moins les effets de la pollution sur les milieux – végétation naturelle, forêt, cultures – ou, en zone urbaine, sur la dégradation du bâti, et par conséquent sur le coût d'entretien des bâtiments publics ou historiques.

Pour réaliser l'eurobaromètre de septembre 2012, 25 525 Européens, dont 1 004 Français, ont été interrogés. À la question « La qualité de l'air s'est-elle détériorée au cours des dix dernières années ? », 56 % des Européens et 70 % des Français répondent « Oui ». À la question « Les normes existantes de l'Union européenne en matière de qualité de l'air sont-elles adaptées ? », 58 % des Européens et 74 % des Français répondent : « Non, elles devraient être renforcées. ». À la question « Les plafonds d'émission nationaux existants sont-ils adaptés ? », 51 % des Européens et 69 % des Français répondent : « Non, ils devraient être renforcés. ». Qu'en conclure, sinon qu'il est urgent d'agir ?

L'État doit s'engager sur le plan national et international. Nous souhaitons qu'il renforce et fasse respecter la réglementation sur l'air extérieur, tant par source que de manière globale, en tenant compte des lignes directrices formulées par l'OMS.

Il doit également prendre en compte de manière cohérente les problématiques du climat et de la qualité de l'air intérieur et extérieur, en portant une attention particulière aux polluants atmosphériques, qui sont aussi d'importants forceurs du changement climatique.

Il doit intégrer la protection de la qualité de l'air et sa reconquête dans l'ensemble des politiques publiques. Nous attendons de la France qu'elle s'engage courageusement dans les négociations européennes sur la révision des plafonds d'émission nationaux.

Sur le terrain, il faut mener des actions de correction et de prévention. Même à l'extérieur d'un PPA, on peut travailler sur la mobilité ou éviter de situer une école maternelle près d'une voie à grande circulation.

En matière de recherche et d'expertise, il reste des besoins de financement, afin d'assurer la continuité du travail des équipes.

Enfin, l'information du public et la sensibilisation des jeunes sont essentielles, car il est nécessaire de comprendre pour agir. Il faut mettre en oeuvre une formation initiale et continue des professionnels de santé sur les effets de la pollution, des professionnels du bâtiment sur la nécessité de construire sain, des urbanistes et des ingénieurs, enfin, sur la manière d'intégrer la question de l'air dans leurs réalisations : aménagement urbain, infrastructures, matériels ou process. La formation est le facteur clé qui permettra de faire évoluer la situation à long terme.

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