Intervention de Martial Saddier

Réunion du 11 septembre 2013 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartial Saddier, président du Conseil national de l'air :

La prise de conscience des problèmes autour de la qualité de l'air est aujourd'hui plus vive. Il importe de compléter les connaissances et d'en avoir une parfaite maîtrise. En effet, pour convaincre, il est essentiel que le diagnostic soit irréfutable sur le plan scientifique.

Si je pense qu'il appartient à l'État de veiller à ce que l'ensemble des territoires comme des acteurs publics et privés tiennent les engagements pris par notre pays pour le respect des normes européennes et mondiales, je pense aussi, à titre personnel, qu'il faut laisser une grande latitude aux acteurs locaux. En effet, les bassins de pollution sont locaux et il n'existe pas deux pollutions identiques. Tel est d'ailleurs l'esprit des PPA, dans lesquels le pouvoir de police est partagé même s'il est exercé par le préfet ou le directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL).

Les PPA n'ont pas été mis en place seulement pour faire face aux pics de pollution. Leur optique est également réparatrice : un de leurs objectifs à moyen et long terme est de ramener en-dessous des seuils d'alerte la concentration de l'air en substances polluantes, là où ces seuils sont dépassés de manière récurrente. Sur ce point, d'importants progrès sont possibles.

Le législateur serait bien inspiré – je m'exprime ici à titre personnel et non en tant que président du Conseil national de l'air – d'exiger, lors de la vente d'un bien immobilier, un diagnostic sur le degré de pollution atmosphérique des appareils de chauffage, à l'instar de ceux déjà prévus pour l'installation électrique, l'assainissement autonome ou la performance énergétique. Pourquoi ne pas fixer à l'acheteur un délai pour mettre si nécessaire le chauffage en conformité, comme cela est prévu pour l'assainissement autonome ?

La loi Grenelle II avait conforté les PPA et prévu la mise en place de ZAPA. Il s'agissait, dans les zones de forte circulation, d'identifier et de contrôler les véhicules les plus polluants, voire de leur en empêcher l'accès. Ces restrictions, difficiles à expliquer, étaient impopulaires – ce n'est pas par plaisir que certains roulent dans une vieille voiture qui pollue, mais parce qu'ils n'ont pas les moyens de faire autrement. Ce Gouvernement a donc abandonné les ZAPA, mais les mesures alternatives proposées, encore en cours de discussion avec les collectivités, sous une forme et un nom différents, reviennent au même. Pour réduire la pollution de l'air liée au trafic automobile dans les grandes métropoles, il faut certes faciliter le renouvellement du parc et favoriser les transports collectifs. Mais on ne pourra pas faire l'économie, comme cela a déjà été fait dans d'autres pays européens, de limiter l'accès des véhicules individuels aux hyper-centres villes – ce qui n'est ni populaire, ni simple à expliquer vu l'impact social d'une telle mesure.

Madame Abeille et Monsieur Hutin, je m'associe à votre éloge du travail des AASQA. En 2013, leurs crédits ont augmenté de 5 % dans le budget de l'État. On observerait en revanche un désengagement des collectivités. Sur ce point, je réponds à M. Baupin : on trouvera certes toujours parmi les collectivités des exceptions qui confirment la règle, mais je persiste à penser que le sujet de la pollution de l'air doit être abordé de manière consensuelle, au-delà des clivages politiques ; en tout cas, j'en formule le souhait. Député du seul secteur où un PPA « nouvelle formule » a été élaboré avant la présidentielle et les législatives, celui de la vallée de l'Arve en Haute-Savoie, je puis témoigner que les collectivités du secteur financent beaucoup de mesures concrètes d'amélioration de la qualité de l'air et que leur engagement à ce titre est largement supérieur à leur contribution au fonctionnement des AASQA. Je n'en pense pas moins, comme vous tous, que les AASQA, qui réalisent un excellent travail, doivent continuer d'être soutenues.

Quelques mots sur le diesel. Nul ne prétend plus qu'il ne serait en rien responsable de la pollution atmosphérique : ce serait insensé. Mais il le serait tout autant de la lui imputer en totalité. Chacun sait comment les moteurs diesel sont devenus prédominants dans notre parc automobile. Deux grands constructeurs nationaux étaient les champions du monde de la motorisation diesel, de surcroît à une époque où la seule pollution identifiée et mesurée était celle des émissions de CO2, plus faibles pour les moteurs diesel que pour les moteurs essence. Avant 2007-2008, on ne pouvait pas mesurer la concentration en particules fines à un instant t. Les études épidémiologiques sur l'incidence sanitaire de cette pollution ne remontent pas non plus à trente ans en arrière ! Oui, les moteurs diesel anciens polluent. Il faudrait donc trouver le moyen d'accélérer le renouvellement du parc. L'entrée en vigueur des normes européennes anti-pollution Euro 5 le 1er janvier 2011, et Euro 6 en 2014, conduira naturellement à rééquilibrer les motorisations de notre parc. Les constructeurs prévoient qu'à l'horizon 2022, la part des véhicules essence devrait être remontée à 55% et celle des véhicules diesel descendue à 45%. Le respect de ces deux normes induit en effet un tel surcoût qu'il ne sera plus possible économiquement d'équiper un petit véhicule d'un moteur diesel. Je ne prends pas position davantage sur ce sujet du diesel. En tant que président du Conseil national de l'air, je me limiterai à dire que si nous pouvions faire disparaître d'un coup de baguette magique tout le parc de véhicules diesel non équipés de filtres à particules, nous le ferions… et que cela serait bénéfique pour la santé de nos concitoyens. Mais nous n'avons pas de telle solution.

En dépit des critiques dont il fait l'objet, le chauffage au bois demeure un mode de chauffage vertueux. La filière bois est une filière écologique. La combustion de bois sec dans un appareil labellisé « Flamme verte » ne dégage quasiment pas de particules. Il n'y a d'émissions nocives que lorsqu'on brûle du bois encore humide – il convient donc de mener tout un travail en amont avec la filière – ou dans un appareil défectueux.

Monsieur Pancher, oui, il est toujours possible de durcir les normes. Mais essayons déjà de respecter les normes actuelles.

Monsieur Krabal, le parallèle que vous avez établi entre l'eau et l'air, qui devraient chacun avoir leur police, est en effet pertinent.

Monsieur Favennec, je laisserai le directeur général de l'énergie et du climat vous répondre.

Monsieur Chevrollier, un vaste plan de mesure de la qualité de l'air intérieur est en train d'être élaboré pour la période 2015-2023.

Monsieur Falorni, le plan Particules a eu des incidences tout à fait positives.

Monsieur Lambert, il faudrait en effet « circuler autrement ». Les solutions ne sont pas faciles. Mais à terme, nous n'aurons pas d'autre choix.

Monsieur Sermier, les ministères de l'environnement et de l'agriculture travaillent actuellement à ce que l'agriculture prenne toute sa part – mais rien que sa part – dans la lutte contre la pollution par les particules fines, l'ammoniac et les précurseurs de l'ozone pouvant résulter du travail du sol, des effluents d'élevage, de l'épandage ou du brûlage de résidus organiques. Un important volet agricole figure à l'ordre du jour de la prochaine réunion du Conseil national de l'air, le 24 septembre prochain.

Monsieur Vigier, il serait effectivement impératif d'harmoniser les réglementations et les législations en Europe. L'agglomération lilloise, par exemple, est polluée par des particules fines émises dans des pays du nord de l'Europe. Il est donc important que tous les pays européens collaborent et qu'une cohérence minimale soit trouvée en matière de production énergétique.

Monsieur Bricout, je regrette que l'on mette davantage en lumière au niveau européen la norme CO2 que les normes relatives aux particules fines. Les acheteurs d'un véhicule neuf, encore aujourd'hui, ne prêtent attention qu'au niveau d'émissions de CO2 !

Monsieur Bénisti, les trajectoires de décollage et d'atterrissage des aéronefs sont déterminantes pour le niveau de pollution, tant atmosphérique que sonore. Existe-t-il une solution à Orly ? Je n'en sais rien, je l'espère. Je signale qu'on ne s'est longtemps préoccupé que de la concentration en polluants sur les tarmacs et des risques qu'elle représentait pour les personnels des aéroports.

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