Merci, monsieur le président. Je voudrais, à mon tour, remercier le président-rapporteur et souligner le bon esprit qui a présidé à cette mission. Je regrette simplement que la majorité n'ait pas fait le choix de donner la présidence ou le rapport à l'opposition. J'observe aussi que, pour éviter les contestations sur les chiffres, il serait bon que l'Assemblée nationale puisse avoir un « droit de tirage » vis-à-vis de l'administration pour des analyses chiffrées plus légères que celles de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) ou de l'INSEE. Cela nous aurait été utile concernant les 55 000 contrats qui ont déjà, semble-t-il, été conclus.
Je crois que les constats relevés lors des auditions sont partagés. Contrairement à notre collègue Isabelle Le Callennec, nous sommes, quant à nous, assez en phase avec les propositions émises, qui reprennent en partie les nôtres.
La situation de l'emploi des jeunes est grave. Comme l'a souligné notre collègue Monique Iborra, il faut tenir bon sur l'esprit de la loi, qui est de viser les jeunes les moins qualifiés et de prévoir de la formation. Le dispositif n'est certes pas parfait mais il a le mérite d'exister. Il constituait d'ailleurs un engagement fort de la campagne de l'actuel chef de l'État. On voit bien toutefois qu'il y a une pression pour détourner la loi de son esprit afin d'atteindre des objectifs chiffrés et d'inverser la courbe du chômage.
Lors des débats, vous nous aviez expliqué que le dispositif était destiné seulement aux associations et au secteur non lucratif. Nous étions opposés à cette limitation. Vous vous êtes manifestement trompés. L'idée nous paraît judicieuse d'ouvrir aujourd'hui le dispositif au secteur marchand, pour qui le contrat de génération n'est pas l'alpha et l'oméga.
Pour ce qui est des propositions, nous sommes attentifs à la formation. Le groupe UDI appelle le Gouvernement, les régions et les partenaires sociaux à mettre en oeuvre un grand plan de formation, axe fondamental s'il en est pour l'adaptation du marché du travail. Il importe, à ce sujet, de réformer la gouvernance de la formation professionnelle et de réorienter les moyens vers les personnes les plus éloignées de l'emploi.
En attendant six mois dans les faits pour ouvrir largement le dispositif au secteur privé, le Gouvernement et la majorité ont fait perdre beaucoup de temps aux jeunes en grande difficulté.
S'agissant des moyens, je m'interroge sur le point de savoir si les 25 ou 30 millions d'euros donnés aux missions locales sont suffisants pour assurer le succès d'une telle politique publique.
Pour ce qui regarde le chiffrage, il est clair que l'objectif du rapport est de donner satisfaction au Président de la République. Je pense que vous arriverez aux 100 000 emplois d'avenir. Il est permis toutefois de s'inquiéter de la pression peut-être excessive mise sur les missions locales pour atteindre ce but. Il importera aussi de regarder attentivement s'il s'agit de conventions signées, d'intentions de contrats ou de contrats réellement commencés. La prescription des contrats est certainement le chiffre le plus honnête intellectuellement, comme le président-rapporteur l'a reconnu.
J'en viens aux propositions émises par le président-rapporteur. Il est suggéré d'assouplir le dispositif pour être moins exigeant en matière d'embauche de jeunes issus de ZUS. Ce point a donné lieu à débat au sein de la mission. Il nous paraît nécessaire d'amodier l'esprit de la loi, mais il convient de rester très ferme quant à l'objectif d'embauche de ces jeunes, qui constituent le public le plus éloigné de l'emploi.
Après la sortie de la première circulaire en novembre 2012, il y a eu, à mon sens, un « trou d'air » administratif et réglementaire. Certaines circulaires, par exemple dans le domaine médico-social, ont été publiées trop tardivement. Nous nous sommes rendus dans le département des Hauts-de-Seine, où la représentante de l'agence régionale de santé nous a indiqué que les hôpitaux et les établissements médico-sociaux n'avaient reçu d'instructions émanant de l'agence qu'à la fin de mois de juin, voire même au début du mois de juillet, ce qui est tout de même effarant dans ce secteur d'activités qui sera sûrement pourvoyeur de nombreux emplois d'avenir.
Comme l'a souligné ma collègue de l'UMP, on se rend compte qu'il a souvent été recouru aux emplois d'avenir professeur pour régler des conflits dans les établissements ou mettre en place la semaine scolaire de quatre jours et demi. Est-ce vraiment la vocation de ces emplois d'avenir professeur ? Le choix de les limiter à certaines matières – les mathématiques, l'anglais, l'allemand et les lettres – est-il pertinent ? Le ministère de l'éducation nationale est revenu sur cette doctrine, mais elle nous est apparue trop complexe pour donner une chance au dispositif.
Concernant la formation, la collaboration entre OPCA et missions locales est certes novatrice, mais l'enveloppe du Fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) dédiée aux emplois d'avenir n'a pas été à la hauteur des besoins exprimés par les OPCA dans le cadre de l'appel à projets. Cette question reste donc en suspens, alors que les OPCA s'étaient montrés très volontaristes.
M. le président-rapporteur a parlé d'une montée en charge du dispositif comparable à celle des emplois-jeunes. Nous aurons cette discussion lors de l'examen du prochain projet de loi de finances avec le ministre chargé de l'emploi, pour évoquer notamment les risques de doublons et le nombre de contrats conclus. L'objectif sera, en la matière, certainement atteint, mais à quelles conditions pour les missions locales et le service public de l'emploi ? Les missions locales n'étaient plus habituées à une telle « mise sous pression » depuis le « plan de cohésion sociale ». Il me semble qu'il faut faire attention : il se peut que l'on obtienne de très bons résultats, en termes de nombre de contrats conclus, d'ici à la fin de l'année, mais on peut craindre que le système ne « casse » sous l'intensité de la pression à laquelle il est soumis de la part des préfectures de région. On peut par ailleurs se demander, sans polémique, si le service public de l'emploi en Île-de-France est réellement efficace… J'ai été étonné par le choix de la région Picardie qui, pour rattraper son retard, a décidé d'ouvrir assez largement le dispositif aux emplois marchands, en les subventionnant.
Concernant les réseaux, à savoir l'Union nationale des missions locales (UNML) et le Conseil national des missions locales (CNML), le Premier ministre s'est exprimé. Il est temps d'en tirer les conséquences. Je pense qu'il faudra redéfinir précisément le rôle des missions locales, pour améliorer leur efficacité et réduire leur hétérogénéité.
En conclusion, je suis globalement en accord avec les propositions du rapporteur. Il faut faire confiance aux acteurs de terrain pour la mise en oeuvre de ce type de dispositif et ne pas se lancer dans la production de circulaires absconses. Le risque encouru avec les emplois-jeunes était celui d'ouvrir et dévoyer complètement le système. J'espère qu'il n'en sera pas de même avec les emplois d'avenir, et que le Gouvernement et sa majorité ne feront pas le choix d'une simple « politique du chiffre ».