Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à saluer ce soir l'initiative du Gouvernement qui, par ce projet de loi, tend à améliorer les conditions de vie dans les territoires ultramarins. La problématique de la vie chère et la question du monopole sur les produits pétroliers sont autant de facteurs qui contribuent, depuis de nombreux mois, à fragiliser notre tissu économique et social.
Je voudrais donc porter de nouveau à votre connaissance les principaux facteurs de l'appauvrissement de nos compatriotes d'outre-mer.
Le taux de chômage ne cesse de croître. Alors qu'en France hexagonale, l'on s'émeut à juste titre d'avoir franchi la barre symbolique des 10 % de chômeurs, dans les territoires de France d'outre-mer nous serions heureux de redescendre à ce taux. À La Réunion, le taux de chômage dépasse 30 % en 2012, dont 65 % chez les moins de vingt-cinq ans.
Le marché du travail métropolitain et européen est peu accessible à nos jeunes du fait, notamment, du prix trop élevé des billets d'avion, ce qui réduit les perspectives de mobilité.
Autre facteur déterminant : des entreprises en grandes difficultés économiques, conséquence directe de l'arrêt des grands chantiers et d'une économie locale en récession.
À cela s'ajoute une érosion du pouvoir d'achat, qui nourrit un sentiment d'injustice, avec des produits alimentaires jusqu'à 60 % plus chers qu'en France hexagonale et une augmentation continue du prix des carburants, qui vient grever encore plus le revenu des ménages dans une île en mal de transports collectifs performants.
L'urgence sociale va grandissant avec de plus en plus de factures d'eau et d'électricité impayées, de loyers non honorés et de familles expulsées. La plupart des retraités touchent le minimum vieillesse, soit moins de 450 euros par mois.
Enfin, plus inquiétant encore, nous devons faire face à un accroissement du nombre des violences intrafamiliales, essentiellement dû à la détresse sociale.
Chacun de ces éléments contribue à la paupérisation de notre île. Ce que je viens de vous énoncer à l'instant nous prouve à tous combien cette loi est attendue par la population : elle doit absolument être efficace et apporter des résultats probants dans les mois qui suivent sa promulgation.
J'ai bien conscience du fait que le coût des matières premières est soumis aux fluctuations des prix sur les marchés. Pour autant, la cherté de la vie à La Réunion est liée à son histoire car en réalité nous avons conservé la culture de l'économie de comptoir. Si le monopole de droit est banni, un monopole de fait existe bel et bien : il est le fruit de cette histoire coloniale. Quand je dis monopole de fait, il s'agit en réalité d'ententes illicites.
Certains cherchent à justifier ces marges par le coût des transports et la distance. Or, avec la mondialisation, l'offre des transports s'est accrue. Pourquoi dès lors les prix des produits restent-ils élevés ? Il est important que le législateur intervienne pour rapprocher les marges réalisées en outre-mer de celles pratiquées en France hexagonale.
Prenons l'exemple des aubergines, non soumises à l'octroi de mer, qui sont vendues dans un supermarché à Annemasse 99 centimes d'euro le kilo contre 1,45 euro le kilo dans un supermarché de Saint-Pierre, soit plus de 46,46 % d'écart !
Pour rendre plus efficace le présent projet de loi qui doit lutter contre la vie chère, je propose quatre amendements.
Le premier a pour objectif de permettre à l'Autorité de la concurrence, dès que la loi sera votée, d'agir concrètement pour que les marges pratiquées en outre-mer ne soient plus supérieures à celles pratiquées dans la France hexagonale.
Un deuxième amendement vise à permettre à l'Autorité de la concurrence, par décret en Conseil d'État, de réglementer le prix des billets d'avion sur les trajets entre la France d'outre-mer et la France hexagonale.
Le troisième tend à autoriser l'Autorité de la concurrence à encadrer les tarifs des établissements bancaires, anormalement élevés dans la France d'outre-mer.
Le quatrième, enfin, vise à favoriser l'abaissement des coûts et l'amélioration de la qualité des télécommunications en outre-mer, dans l'intérêt des consommateurs.
Pour conclure, je dirai que la production locale reste l'un des grands sujets que nous devrons aborder dans les prochains mois afin d'aller encore plus loin pour redresser le pouvoir d'achat. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et SRC.)