Ayant été membre de votre assemblée pendant plus de dix années, j'attache au Parlement une importance particulière. En tant que ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, il me revient de mettre en oeuvre la feuille de route que le Président de la République m'a confiée. Cette feuille de route, c'est l'excellence environnementale, et je veux l'accomplir avec vous. Nous sommes à la veille de la tenue de la deuxième conférence environnementale, aussi comprendrez-vous aisément que je laisse la primeur de certaines annonces au Président de la République et au Premier ministre, d'ici la fin de cette semaine. Pour ma part, je me suis exprimé cet après-midi même devant la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire sur les orientations générales de mon ministère et m'attacherai donc plus particulièrement ce soir, devant votre commission, à exposer l'état de la réflexion gouvernementale s'agissant des ondes, puis dans un second temps de l'hydroélectricité.
Les risques sanitaires et environnementaux constituent un sujet important et je tiens à rappeler les initiatives qui ont déjà été prises dans ce domaine : tout d'abord, l'adoption de la proposition de loi du député Gérard Bapt concernant l'interdiction totale du Bisphenol A dans les contenants alimentaires, ensuite le lancement d'une stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, dont le rapport du groupe de travail associant l'ensemble des parties prenantes est actuellement en cours de consultation publique, enfin l'adoption d'une proposition de loi, dont l'initiative revient aux parlementaires écologistes, donnant un véritable statut juridique aux lanceurs d'alerte.
Le sujet des ondes fait partie intégrante de la problématique de santé environnementale. C'est depuis la première conférence environnementale un axe de travail prioritaire pour le Gouvernement, et ce pour tout le quinquennat. Le développement des communications s'est en effet accompagné de l'équipement des communes et des particuliers par des antennes relais et des terminaux sans fil générant un rayonnement électromagnétique. Des inquiétudes sont rapidement apparues quant à l'impact sur la santé de ces ondes électromagnétiques.
En 2009, le précédent gouvernement avait lancé plusieurs initiatives pour mieux connaître les risques et chercher à les maîtriser. Comme vous l'avez rappelé dans votre présentation, monsieur le Président, c'est ainsi que vous aviez été amené à présider un comité opérationnel d'expérimentations (COMOP) chargé, d'une part d'examiner la faisabilité technique d'un abaissement de l'exposition du public aux radiofréquences émises par les antennes-relais de la téléphonie mobile, d'autre part de définir et d'expérimenter de nouvelles procédures de concertation et d'information locales pour accompagner les projets d'implantation d'antennes-relais.
Grâce à une ténacité et une force de conviction qu'il n'est pas nécessaire de rappeler, votre action à la tête de ce comité a permis de franchir un cap décisif en mettant autour de la table des parties prenants jusqu'alors peu habituées à discuter sereinement. Ces travaux ont fait l'objet d'un rapport d'étape en août 2011, qui constitue encore aujourd'hui un document de référence.
Au cours du mois d'août dernier, les deux rapports de synthèse du COPIC sur la poursuite de ces expérimentations m'ont été remis, ainsi qu'à la ministre déléguée chargée de l'économie numérique. Ces deux rapports nous disent qu'environ 90 % des niveaux d'exposition sont inférieurs à 0,7 Volt par mètre et 99 % inférieurs à 2,7 Volt par mètre, en deçà donc des limites réglementaires comprises entre 40 Volt par mètre et 61 Volt par mètre.
L'étude met aussi en évidence l'existence de quelques points géographiquement isolés, dits points « atypiques », où l'exposition est sensiblement plus élevée que la moyenne, tout en restant en deçà des seuils réglementaires. Ces points doivent être regardés spécifiquement et il me semble possible d'en impulser un recensement plus sérieux que celui actuellement prévu par la loi, qui n'a même pas été publié à ce jour alors qu'il aurait dû intervenir avant le 31 décembre 2012. Il serait du reste utile de publier un tel recensement chaque année et de doter l'Agence nationale des fréquences (ANFR) des moyens de s'assurer que les points atypiques sont traités de façon adaptée par le ou les opérateurs concernés, ainsi que dans des délais raisonnables. Il s'agit d'une question de sobriété et en même temps d'un moyen pour l'opérateur d'optimiser son réseau.
Au-delà de ces points atypiques, pour l'ensemble de la population cette fois, si l'on n'étudie que la valeur de 0,6 Volt par mètre, on aboutit à la conclusion qu'il faudrait augmenter notablement le nombre d'antennes, jusqu'à trois fois plus dans certaines communes, selon les modélisations, pour rétablir une couverture réseau équivalente. D'autres valeurs, moins basses, n'aboutiraient pas aux mêmes résultats. À noter, enfin, que le basculement vers la technologie 4G pourrait augmenter de 50 % en moyenne l'exposition des populations. La qualité de ces travaux mérite d'être soulignée. C'est pourquoi Fleur Pellerin et moi-même souhaitons que ces réflexions se poursuivent dans une nouvelle instance d'échanges placée sous l'égide de l'ANFR et associant l'ensemble des parties prenantes.
Lors de la première conférence environnementale, le Gouvernement s'est par ailleurs engagé à mettre à jour l'expertise de l'Anses sur les effets sanitaires des radiofréquences. Je peux vous indiquer que nous disposerons de ce rapport pour le 15 octobre prochain. En outre, comme vous l'avez rappelé, monsieur le Président, à la suite de l'examen de la proposition de loi de Mme Laurence Abeille, une mission dite « ALARA » a été installée sur la mise en oeuvre du principe de sobriété dans les ondes de téléphonie mobile, dont nous attendons également le rapport pour cet automne. Il me semble légitime que la population souhaite ne pas être exposée à des niveaux d'émissions supérieurs à ceux qui sont nécessaires à son usage.
Le Gouvernement disposera donc d'ici la fin de l'année des éléments scientifiques, expérimentaux et juridiques indispensables à la prise de bonnes décisions. D'ores et déjà, certains principes consensuels me semblent pouvoir être dégagés, concernant la gouvernance autour des projets d'installations d'antennes-relais : l'information du maire par écrit en amont de l'implantation, dès la phase de recherche, la transmission systématique d'un dossier d'information relatif aux futures installations un mois avant le dépôt de la demande d'autorisation d'urbanisme ou de la déclaration préalable, l'information préalable du maire lors de la modification d'une ou plusieurs installations radioélectriques existantes nécessitant une nouvelle demande d'autorisation auprès de l'ANFR. En effet, s'agissant de ce dernier point, le déploiement de la 4G ne passe pas forcément par l'implantation de nouvelles antennes mais parfois uniquement par la modification des propriétés d'antennes existantes.
Il me semble également nécessaire de prévoir une information très en amont des occupants d'un bâtiment d'habitation en cas d'implantation future d'antennes ainsi, de façon plus générale, que l'animation dans chaque département d'une instance de concertation visant à assurer une mission de médiation relative à toute installation radioélectrique existante ou projetée dont elle serait saisie.
Enfin, la publication par l'ANFR de lignes directrices nationales en vue d'harmoniser les outils de simulation de l'exposition générée par l'implantation d'une installation radioélectrique est le dernier principe que je veux évoquer devant vous. Cet outil pourrait ensuite amener toute personne souhaitant exploiter une installation radioélectrique sur le territoire d'une commune à réaliser une simulation dès lors que le maire de la commune concernée le souhaite.
Telles sont, monsieur le Président, mesdames et messieurs les Députés, les informations que je souhaitais porter à votre connaissance sur la question des ondes, même si nous devons encore continuer de travailler pour progresser sur le sujet.