Madame Le Callennec, je comprends que vous continuiez à faire référence aux accords compétitivité-emploi : il s'agissait en effet des termes utilisés par M. Nicolas Sarkozy au début de l'année 2012. Mais la loi nous oblige dorénavant à parler d'accords de maintien de l'emploi. Cette appellation exprime d'ailleurs bien leur caractère défensif, puisque l'objectif est de cesser de réduire le nombre de salariés dès que surviennent des difficultés économiques. Il faut dorénavant agir sur d'autres variables, telles que l'organisation du travail ou les rémunérations, à l'exemple de ce qui a été fait dans le secteur automobile en Allemagne : chez Volkswagen, lors des creux de l'activité, le temps de travail et les salaires ont été réduits en contrepartie du maintien de l'emploi. Le redressement de la situation ayant ensuite permis le versement de primes, il s'avère que les salariés sont au total gagnants sur les quatre dernières années.
Depuis l'entrée en vigueur de la loi, compte tenu des délais légaux, deux accords de maintien de l'emploi seulement ont été signés : ils sont le fait, en Loire-Atlantique, de l'entreprise Walor où étaient précédemment prévus des licenciements, mais où les salariés ont pu conserver leur emploi en échange d'une nouvelle organisation du travail, et, en Alsace, de l'entreprise Behr. Mais beaucoup d'autres accords de ce type sont en cours de négociation.
La dimension offensive de la politique de l'emploi repose sur la volonté que manifeste l'entreprise d'anticiper, y compris en acceptant d'ouvrir le débat sur les évolutions prévisionnelles de son activité. Renault a adopté cette stratégie en négociant un plan visant à prévenir des difficultés. La loi favorise ces démarches en privilégiant l'accord majoritaire.
S'agissant de la mobilité, l'objectif réside, là encore, dans la sécurisation de l'emploi ; il s'agit de prévoir les mouvements, d'implantation ou de regroupement d'activités, et de préparer – « à froid », bien entendu – des accords de mobilité pour répondre à ces évolutions. Ces accords peuvent être signés par des organisations représentant au moins 30 % des salariés, à condition que ne s'y opposent pas d'autres organisations représentant une majorité de ces mêmes salariés – ce mode de ratification différant de celui des accords de maintien de l'emploi qui, compte tenu des contreparties salariales qui peuvent être requises, doivent recueillir l'agrément de syndicats ayant obtenu les suffrages d'au moins 50 % des personnels. Très attendu par les entreprises et souhaité par les syndicats, le dispositif a néanmoins été critiqué par certains comme susceptible de déboucher sur une obligation de mobilité ; tel n'est pas son objet, qui est d'accompagner les mobilités en les anticipant.
Quant à la question du logement, elle ne peut être résolue par la loi mais nous devons en effet réfléchir aux moyens de lever ce qui est un des principaux freins à la mobilité – et je sais que les organisations patronales s'en préoccupent aussi de leur côté.
Monsieur Vigier, je ne peux qu'approuver une bonne part de vos réflexions et suggestions.