J'ai pris note de vos nombreuses questions. Soyez sûrs qu'elles recevront une réponse, si ce n'est orale ce soir, du moins écrite dans les prochains jours.
M. Jean-Yves Caullet s'est interrogé avec justesse sur la portée de notre projet écologique. Il est certain qu'une transition écologique imposée à l'ensemble des territoires serait vouée à l'échec. Pour mener à bien ce projet, il est indispensable de coordonner l'action à l'échelon national et à l'échelon territorial. Ce sera précisément l'une des missions du Conseil national de la transition écologique. Les représentants des collectivités territoriales et les parlementaires qui en sont membres seront les premiers contrôleurs de l'application dans les territoires de la transition écologique. Je mesure le rôle des collectivités locales, qui n'ont souvent pas attendu l'État pour s'engager dans cette transition. Qu'il s'agisse des énergies renouvelables, de la rénovation thermique ou de la lutte contre la précarité, nous n'atteindrons pas les objectifs nationaux sans l'implication des territoires. Je sais, pour y avoir travaillé en tant que président de conseil général, combien un projet de transition écologique qui ne serait pas décentralisé serait dépourvu de sens. Cette question, qui sera abordée dans le projet de loi relatif à la transition énergétique, constitue le fil rouge de notre projet.
Monsieur Jean-Marie Sermier, vous avez fait l'éloge du Grenelle de 2007. Je le fais aussi. J'ai d'ailleurs plaidé à l'époque pour que le groupe socialiste vote le texte. Je reconnais volontiers que le Grenelle fut un moment important, voire un déclic dans lequel je salue le rôle de Jean-Louis Borloo. Je serai en revanche plus réservé sur la fin du quinquennat et sur la constance de l'implication du Gouvernement et du Président de la République en matière environnementale.
Le développement des énergies renouvelables serait selon vous à l'arrêt. Je le conteste : je citerai l'appel d'offres pour relancer la filière du solaire, le second appel d'offres pour les éoliennes en mer ou encore le plan « énergie méthanisation autonomie azote » ; nous expérimentons également le permis unique environnemental afin de simplifier les procédures. Il est anormal que le développement des énergies renouvelables soit entravé par des questions de procédure. Après le débat national sur la transition énergétique, nous avons aussi à fixer un cap à long terme sans toutefois interrompre l'action.
Je rappelle en outre que le deuxième programme d'investissements d'avenir prévoit un soutien plus actif à l'innovation en matière d'énergies renouvelables : 50 % des investissements seront dédiés à la transition écologique tandis que l'ensemble des projets sera soumis à l'écoconditionnalité. Nous lancerons prochainement un appel à projet pour les hydroliennes en mer. Enfin, nous définissons une stratégie pour le solaire et pour l'hydrogène.
Vous regrettez le manque de réalisations concrètes en référence au précédent gouvernement. Le choc de simplification réglementaire en faveur des énergies renouvelables est en marche, avec la suppression de la notion de zone de développement de l'éolien et l'introduction de procédures d'autorisation simplifiées et de délais d'instruction raccourcis. Le permis unique environnemental, qui fond trois législations en une, est actuellement expérimenté pour des éoliennes offshore en Bretagne et des éoliennes terrestres en Champagne-Ardenne.
Monsieur Yannick Favennec, le Gouvernement a choisi la méthode de la concertation, en aucun cas celle de l'affichage. Les projets de loi que vous évoquez en sont la preuve.
Vous parlez de report des urgences environnementales. Je ne considère pas que le projet de loi sur la transition énergétique soit reporté. À l'issue d'un débat inédit et difficile qui s'est déroulé pendant huit mois dans tous les territoires, nous entrons dans la phase d'élaboration du projet de loi à partir de la synthèse des travaux. Nous devons en outre saisir pour avis le Conseil économique, social et environnemental ainsi que le Conseil d'État, ce qui allonge nécessairement les délais avant la présentation au Parlement. Ce report n'indique nullement notre intention de ne pas prendre à bras-le-corps ce sujet, le Président de la République le confirmera lors de la conférence environnementale. Nous travaillons à une adoption la plus rapide possible en Conseil des ministres. Il n'y a aucun renoncement à faire de ce texte un marqueur de la transition écologique que nous souhaitons conduire. La synthèse de ce débat identifie quinze enjeux et 173 actions. Des consensus importants ont été obtenus. Quant au nucléaire ou à l'exploitation du gaz de schiste, sur lesquels nous savions le consensus impossible, le cadre a été fixé par le Président de la République.
L'écocontribution sur les meubles est le fruit d'une décision consensuelle du Grenelle de 2007. Aujourd'hui, 40 % des meubles sont jetés à la décharge alors que le bois et les métaux qui les composent pourraient être réinjectés dans l'économie. Nous devons passer de l'économie linéaire – produire, consommer, jeter – à l'économie circulaire. Néanmoins, nous sommes attentifs aux préoccupations des professionnels : les vendeurs de meubles peuvent répercuter le montant de l'écocontribution sur le prix de vente et l'entrée en vigueur de cette taxe a été reportée à deux reprises.
Enfin, concernant l'agence de la biodiversité, le Président de la République a toujours affirmé qu'elle serait mise en place le 1er janvier 2015. Nous souhaitons qu'elle soit dotée des moyens de fonctionnement et d'intervention lui permettant d'être, à côté de l'ADEME, l'autre bras armé du ministère.
Monsieur Patrice Carvalho, je ne souhaite pas vous répondre sur la question du diesel. Celle-ci fait en effet l'objet d'arbitrages dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances et je laisse aux ministres de l'économie et du budget le soin de rendre ces arbitrages publics dans quelques jours.
Le Grenelle avait décidé l'augmentation jusqu'en 2015 de la taxe générale sur les activités polluantes pour les déchets sur les décharges et les incinérateurs. Cette taxe est néanmoins modulée pour encourager la valorisation des énergies issues de l'incinération. L'éventualité d'une poursuite de l'augmentation de la TGAP et d'une hausse de la TVA applicable à la collecte des déchets sera débattue lors de la table ronde sur l'économie circulaire de la conférence environnementale qui fera une large place au problème des déchets et à laquelle je participerai personnellement avec M. Arnaud Montebourg.
Les décharges recevant des déchets amiantés doivent désormais faire l'objet d'une autorisation. À la suite de la condamnation par la Cour de justice de l'Union européenne, nous avons dû, en 2012, nous mettre en conformité. Les décharges existantes ont néanmoins pu continuer leur activité sans formalité particulière.
Monsieur Denis Baupin, je ne répondrai pas non plus à votre question sur le projet de loi de finances. Vous m'excuserez de me réfugier derrière les ministres de l'économie et du budget auxquels je tiens à laisser la primeur de la présentation. Chat échaudé… (Rires)
Nous simplifions. Cela peut sembler anecdotique mais j'ai désigné, au sein de mon cabinet, un collaborateur chargé de la simplification du droit de l'environnement : ce droit, au demeurant très complexe, suscite d'innombrables recours mais donne étrangement lieu à un faible nombre de sanctions. La simplification n'est pas nécessairement synonyme de moindre exigence en matière de protection de l'environnement. Pour la création d'unités de méthanisation, l'Allemagne parvient à accomplir en six mois ce que la France fait en trois ou quatre ans. L'Allemagne n'est pourtant pas moins soucieuse que nous du respect de l'environnement. Des améliorations sont donc possibles : le permis unique environnemental en est un exemple. Nous soutenons, grâce aux appels d'offres, le solaire et l'éolien, dont je connais les difficultés, ainsi que l'hydrolienne, au travers de l'appel à manifestations d'intérêt.
Monsieur Jacques Krabal, les permis de recherche ne sont délivrés que pour les hydrocarbures conventionnels. La position exprimée par le Président de la République sur le gaz de schiste n'interdit pas de réaliser des forages dès lors qu'ils concernent les hydrocarbures conventionnels et sont étroitement contrôlés. La fermeté sur le premier n'est pas incompatible avec le pragmatisme pour les seconds. Les services de l'État s'assurent évidemment de l'absence de fracturation hydraulique.
S'agissant de la question prioritaire de constitutionnalité qui devrait être examinée début octobre, le Gouvernement souhaite que l'interdiction de la fracturation hydraulique soit maintenue. Si toutefois le Conseil constitutionnel devait censurer la loi du 13 juillet 2011 votée à l'initiative de l'ancienne majorité avec le soutien du groupe socialiste, le Gouvernement serait prêt à proposer, selon le degré de censure, une nouvelle législation qui réaffirme l'interdiction d'extraction du gaz de schiste.
M. Thierry Thuot, conseiller d'État désigné pour préparer la réforme du code minier – dont la méthode et les principes avaient été présentés en Conseil des ministres par mon prédécesseur le 16 février 2013 –, a livré ses conclusions au groupe de travail constitué. Au terme d'un travail administratif et interministériel, il doit prochainement remettre ses propositions définitives à M. Arnaud Montebourg et à moi-même. Il s'ensuivra une concertation avec les parlementaires afin de trouver une méthode satisfaisante pour modifier un texte inchangé depuis 1806 et comprenant pas moins de 600 articles. Un texte devrait être présenté en Conseil des ministres au début de l'année 2014.
Monsieur Olivier Falorni, les PPRT ont été créés par la loi Bachelot après la catastrophe de l'usine AZF. Aujourd'hui, 60 % d'entre eux sont élaborés par les préfets. Les industriels ont consenti d'importants investissements de sécurité sur leur site, dont le montant s'élève à environ un milliard d'euros sur cinq ans. Malgré ces investissements, le risque zéro n'existe pas. En dernier ressort, la prévention peut se traduire par des mesures d'ordre foncier – l'expropriation par exemple – comme dans le cas du PPRT de La Rochelle.
La tempête Xynthia, dans la nuit du 27 au 28 février 2010, fut un drame. Je veux saluer la mémoire des personnes disparues. Les dégâts matériels ont été estimés à 2,5 milliards d'euros. Plusieurs mesures ont été prises par les pouvoirs publics à la suite de la tempête. S'agissant de l'avancement des travaux pour les digues, je vous confirme que je vous recevrai pour évoquer cette question. Soyez assurés que la priorité du Gouvernement est bien la protection des biens et des personnes. Le plan « submersions rapides » a été mis en place pour financer les travaux nécessaires. Face au retard pris dans les travaux, une mission d'appui a été confiée au sein du Conseil général de l'environnement et du développement durable à M. Christian Pitié et à Mme Annick Hélias. Cette mission s'est rendue dans les territoires sinistrés par la tempête. Le rapport, qui vient de m'être remis, formule des propositions pour accélérer l'instruction des dossiers et mieux coordonner les procédures. Il préconise également d'expérimenter la simplification des procédures de labellisation des projets. Je veillerai à donner aux préfets les instructions nécessaires pour que les recommandations du rapport soient mises en oeuvre.
L'Île de Ré a été particulièrement frappée par la tempête Xynthia, et deux personnes y sont mortes. Les risques d'inondation y constituent donc une réalité. Le plan de prévention des risques littoraux (PPRL) en cours de révision a précisément pour objectif la protection contre ces risques. Je vous remercie d'avoir accepté de participer au comité de pilotage du projet. Je comprends votre inquiétude, mais le PPRL doit permettre de réduire les risques pour les vies humaines et pour l'économie. Je veillerai à ce que la révision se déroule dans la plus grande transparence et dans un esprit d'écoute mutuelle. Je vous assure de ma disponibilité pour dialoguer sur ces sujets.
Le président Jean-Paul Chanteguet a évoqué la rumeur de vente d'une partie de RTE. C'est une rumeur qui revient tous les six mois. En outre, je rappelle solennellement que le réseau de transport d'électricité ne peut être détenu que par une entité publique. (Approbations sur de nombreux bancs) De plus, EDF est détenue à 87 % par l'État. Aucune évolution ne peut donc être envisagée sans l'accord de l'État.
Madame Catherine Quéré, je vous concède que le Journal officiel n'est pas une lecture quotidienne, mais le décret relatif à la fusion des associations communales de chasse agréées a été signé le 2 août et publié le 7 du même mois.
Madame Geneviève Gaillard, le Marais poitevin a perdu son label de parc naturel régional depuis 1997. Au vu du travail accompli et de l'attachement unanime des habitants à la reconquête de ce label, le Gouvernement s'est engagé à reprendre la procédure de classement. Le projet de charte élaboré par le syndicat mixte du parc a été soumis à une enquête publique en juin 2013. La consultation des collectivités locales se déroulera à l'automne avant une consultation nationale. La décision de classement en parc naturel régional devrait intervenir en 2014. Les services du ministère appuient la démarche. Ils sont prêts à apporter leur aide aux acteurs locaux qui travaillent à améliorer la qualité environnementale du projet qui a fait l'objet de critiques.
Le projet de règlement européen sur la pêche en eau profonde n'a pas encore été examiné par le Conseil. La position française n'est donc pas encore arrêtée. La fragilité des écosystèmes profonds et les particularités biologiques des espèces vivant dans ces milieux imposent la plus grande prudence. La réflexion sur cette question, qui sera abordée lors de la conférence environnementale, doit être guidée par une approche globale de l'écosystème.
Monsieur Philippe Plisson, les difficultés des énergies renouvelables sont connues. La transition énergétique doit se traduire par une réduction de 75 à 50 % de la part du nucléaire dans le mix énergétique et par une montée en puissance des énergies renouvelables. L'appel d'offres sur le solaire et l'éolien offshore comme la simplification participent de cet objectif. Nous devons continuer dans cette voie. À cet égard, le redressement productif de la France repose pour une large part sur des filières à vocation écologique.
La majoration de la redevance sur les prélèvements d'eau pour l'établissement public territorial de bassin (EPTB) est déjà possible. Elle a été décidée dans le bassin Seine-Normandie pour l'EPTB Seine Grands Lacs. Si les acteurs de l'eau l'acceptent, l'agence de l'eau Adour-Garonne aidera à mettre en place la majoration que vous souhaitez. Je fais là une ouverture.
Madame Laurence Abeille, en matière d'élevage, le Gouvernement a décidé de simplifier les procédures applicables. La région Bretagne connaît régulièrement des déflagrations dans le domaine agroalimentaire, mais elle est dans le même temps montrée du doigt pour ses atteintes à l'environnement. La simplification consiste à remplacer la déclaration par un simple enregistrement pour l'agrandissement des installations porcines comprenant entre 451 et 2 000 animaux équivalents. Le chiffre de 2 000 correspond à la norme européenne qui est moins contraignante que la norme française. Cette simplification que j'assume ne signifie en rien l'abaissement des exigences environnementales. Au contraire, le temps gagné par les services de l'État dans l'instruction des dossiers permettra de renforcer les contrôles sur le terrain. Je serai particulièrement attentif à ce que les prescriptions applicables aux élevages – en cours d'élaboration – soient plus protectrices des milieux, notamment de la qualité des eaux
Le projet de décret qui doit concrétiser cette simplification est soumis aux procédures habituelles. Vous savez en outre que le ministère de l'agriculture a présenté le plan « Energie Méthanisation Autonomie Azote » qui vise à substituer à l'azote minéral de l'azote organique. Votre commission pourrait l'auditionner à ce sujet.