Intervention de Philippe Martin

Réunion du 17 septembre 2013 à 17h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie :

Monsieur Philippe Bies, le Gouvernement est déterminé à fermer la centrale nucléaire de Fessenheim d'ici à la fin 2016. Il s'en donnera les moyens. L'engagement a été pris par le Président de la République et réaffirmé. Nous travaillons avec RTE à garantir la sécurité de l'approvisionnement en électricité de l'Alsace après la fermeture de la centrale. Cette garantie est une obligation envers nos concitoyens. RTE doit remettre prochainement à mes services un dossier présentant les aménagements mineurs qui doivent être réalisés à cette fin, principalement entre les postes de Sélestat et de Fessenheim.

Au-delà de cette première phrase, RTE souhaite rendre cohérent le réseau de la Lorraine jusqu'à la Suisse en le portant partout à une double ligne de 400 kilowatts – le chaînon manquant se situe entre les deux postes précités. Cette cohérence est dictée par la dimension européenne de la ligne. Un débat public pourrait être organisé en 2015 sur ce projet.

Je souhaite rassurer les parlementaires : l'alimentation électrique de l'Alsace ne présente pas de fragilité. RTE a déjà pris en compte la fermeture de Fessenheim dans son bilan prévisionnel : aucun déficit de capacité de production n'est prévu dans les cinq ans à venir.

Quant à la reconversion du site et la préservation des emplois, le diagnostic est en cours : le comité central d'entreprise (CCE) d'EDF a fait procéder à une étude ; de mon côté, j'ai demandé à l'INSEE d'apporter son éclairage. L'étude du CCE recense 1000 emplois directs dont 700 pour EDF. Nous pouvons compter sur le savoir-faire social d'EDF pour proposer des solutions à ces employés, d'autant que nombre d'entre eux sont proches de la retraite et que le démantèlement, qui s'étalera sur une vingtaine d'années, permettra de maintenir environ 150 emplois. La fermeture de Fessenheim nécessite des compétences en matière de sûreté et de sécurité nucléaire. En revanche, la question des sous-traitants nous impose de travailler d'ores et déjà sur les projets locaux qui pourraient voir le jour.

Fessenheim sera la première centrale à être démantelée, mais d'autres devront nécessairement l'être un jour être en raison de leur âge. La filière d'excellence française qu'est l'industrie nucléaire pourrait trouver un prolongement dans le démantèlement qui sera aussi un gisement d'emplois.

Enfin, un bilan des conséquences pour les collectivités territoriales sera présenté prochainement aux représentants de celles-ci afin de parvenir à un diagnostic partagé et à des solutions appropriées pour faire face à la perte de recettes qu'entraînera la fermeture.

Face aux allégations de certains, je réaffirme que la sûreté nucléaire est une priorité absolue. Les moyens budgétaires de l'IRSN pour assurer cette mission seront en 2014 identiques à ceux de 2013. Les efforts que vous évoquez seront absorbés par la bonne santé financière de l'institution et par le report de certains projets de recherche qui ne concernent pas la sûreté nucléaire. Les moyens de la sûreté nucléaire n'ont cessé d'augmenter. Le budget total de l'IRSN et de l'ASN est ainsi passé de 147 millions d'euros en 2011 à 164 millions en 2013. L'économie demandée est donc absorbable.

Je ne dispose d'aucun élément pour attester d'une surpopulation de la buse. Il me semble que la coexistence entre les activités humaines – dont la chasse – et ce rapace est tout à fait possible. Lors d'un entretien avec le président de la Fédération nationale des chasseurs, nous sommes convenu de surveiller l'évolution de l'espèce.

L'Agence française pour la biodiversité sera fortement liée aux établissements gérant des espaces naturels. Mais, pour le loup, ce sont les services déconcentrés de l'État qui sont chargés de la mise en oeuvre du plan national. Je me suis entretenu avec le président de la fédération ovine dans le Mercantour, qui faisait partie des personnes exaspérées par les attaques de loup et qui avait interpellé publiquement le Président de la République. Je lui ai fait valoir que la cohabitation était possible dès lors que le plan d'action national loup était appliqué. Le plan prévoit le prélèvement de vingt-quatre loups dans les deux premières années. Or, à ce jour, seulement deux animaux ont été prélevés. J'ai donc saisi les préfets et leur ai donné les moyens, y compris financiers, pour que le plan soit appliqué. En effet, celui-ci n'a de sens que s'il est appliqué, d'autant qu'il a été accepté par les associations de défense du loup. Je veillerai donc à sa mise en oeuvre.

Monsieur François-Michel Lambert, le décret de 2006 a en effet été annulé. La réglementation sera modifiée comme l'exige la décision du Conseil d'État. Les forages de Shell restent néanmoins encadrés juridiquement.

Le cas de Rexma illustre parfaitement la nécessité d'être attentif aux enjeux miniers et environnementaux. À la suite des nombreuses alertes sur les agissements de cette société, le Gouvernement se devait d'agir dans l'intérêt de l'environnement. Puisqu'il n'était pas possible de retirer le permis délivré, le ministre du redressement productif a donné des instructions afin que l'autorisation d'ouverture des travaux miniers ne soit pas accordée. Par ce geste, nous avons mis un coup d'arrêt au projet. En revanche, d'autres demandes de permis de forage pourront être instruites à condition de réaliser les études et enquêtes nécessaires.

Monsieur Jean-Luc Moudenc, s'agissant de la transition énergétique, il faut du temps pour digérer les propositions issues du débat national, les affiner et éventuellement revenir vers les parties prenantes. Il est dans la raison d'être du Conseil national de la transition écologique d'être consulté sur ce type de texte. L'objectif du Gouvernement, qui est aussi un engagement, est celui d'un examen du projet de loi en Conseil des ministres début 2014 ; ensuite, le calendrier parlementaire est particulièrement contraint en raison des élections municipales.

Sur l'implication de l'État dans les transports collectifs, un appel à projets sera lancé auprès de toutes les autorités organisatrices de transports – 120 dossiers de toute nature ont été déposés le 15 septembre. La liste des projets retenus et le montant des aides accordées seront annoncés à la fin de l'année 2013.

Monsieur Jean-Jacques Cottel, il est vrai que les éoliennes posent des difficultés de compatibilité avec les radars, qu'ils soient militaires ou civils. Des recherches sont menées actuellement pour disposer de mâts éoliens furtifs, comme les avions du même nom. Les éoliennes actuelles gênent les radars, qu'ils appartiennent à Météo France ou à la Défense nationale. Nous essayons de faire en sorte que le maillage des radars ne soit pas un obstacle au développement de l'éolien. J'ai demandé à mes services d'aider les différents acteurs à trouver des solutions techniques à ce problème.

Nous travaillons avec RTE et ERDF pour accélérer le raccordement au poste source. Le ministère vient d'arrêter les règles de planification et de financement des raccordements, ce qui devrait les faciliter.

La place des collectivités locales dans la gouvernance des éco-organismes a été évoquée. Les éco-organismes sont agréés par l'État et les collectivités locales participent à leur gouvernance par le biais des commissions d'agrément. Je ferai des propositions lors de la conférence environnementale pour améliorer cette gouvernance de ces derniers.

Nous cherchons activement une solution pour que la clause de revoyure avec Eco Emballages se traduise dans les faits avant la fin 2013. Une réunion a été organisée par le cabinet à cet effet avec les représentants des collectivités territoriales et de l'entreprise. Nous travaillons aussi sur la fiscalité des emballages afin de ne pas dissuader certaines filières.

Des marges de progression existent pour la filière du papier recyclé. Le renouvellement de l'agrément d'Ecofolio et le partenariat signé cet été avec la presse magazine permettront d'améliorer la collecte et le recyclage. L'objectif est de parvenir à un recyclage de 55 % en 2016 et 60 % en 2018. Quelque 190 millions d'euros ont été versés aux collectivités depuis la création d'Ecofolio. Ces sujets seront au coeur des débats de la conférence environnementale.

Madame Françoise Dubois, nous avons tous le souvenir douloureux d'exploitations minières arrêtées dans de mauvaises conditions, obligeant le ministère à se substituer aux exploitants. L'objectif du code minier est d'éviter une fin d'exploitation dans de mauvaises conditions.

Monsieur Michel Lesage, je sais que vous êtes l'auteur d'un important rapport sur l'eau et que vous participerez à la conférence environnementale, je vous en remercie. La qualité de l'eau entre dans le cadre des 34 plans de reconquête industrielle présentés par Arnaud Montebourg. Cette filière devait déjà bénéficier du programme des investissements d'avenir. Les trois pôles de compétitivité sur l'eau seront mobilisés pour présenter des projets. Cette démarche s'inscrit aussi dans le partenariat européen pour l'innovation sur l'eau.

Madame Florence Delaunay, vous plaidez pour le renouvellement du label du parc naturel régional des Landes de Gascogne. Il convient au préalable de résoudre une difficulté substantielle sur le périmètre du parc : cinq communes risquent d'en être exclues en raison du vote négatif de l'EPCI auquel elles appartiennent. Mes services oeuvrent à une solution juridique sûre permettant d'aboutir au classement du parc malgré cette difficulté. Ce classement n'interviendra pas en tout état de cause avant le congrès national des parcs naturels régionaux de France.

Madame Sophie Rohfritsch, la protection du grand hamster d'Alsace est une obligation européenne. Tant que la population des hamsters n'aura pas retrouvé un niveau satisfaisant, nous sommes sous la menace d'une sanction – 60 millions d'euros d'astreinte semestrielle ; c'est loin d'être négligeable ! Je suis conscient des efforts demandés aux Alsaciens. Dès que les objectifs de préservation de l'espèce seront atteints grâce aux actions conduites avec les agriculteurs, les contraintes seront allégées. Dès à présent, le zonage de l'habitat des hamsters ne bloque pas les projets et n'impose pas de compenser tel ou tel impact.

Je ne suis pas sûr d'avoir répondu à toutes les questions, mais j'espère que cet échange augure de notre relation future.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion