Intervention de Rudy Salles

Réunion du 18 septembre 2013 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRudy Salles :

Je félicite moi aussi notre rapporteure pour ce rapport réalisé dans des conditions difficiles. N'ayant pu, faute de son talent, réaliser une synthèse de ce rapport durant la nuit dernière, je limiterai mes observations à l'avenant qui nous est soumis. Celui-ci du reste, si vous me permettez ce jeu de mots, porte bien mal son nom, car je n'y vois rien de très avenant pour le service public de l'audiovisuel et il est en outre bien plus qu'un avenant.

Alors que le COM initial prévoyait une augmentation des ressources de 2 % par an jusqu'à 2015, pour atteindre 2 687 millions d'euros, le projet d'avenant prévoit au contraire une diminution moyenne de l'enveloppe publique de 0,5 % par an. Comme le rappelle le CSA, pour cette seule année, la réduction est estimée à 26 millions d'euros par rapport aux dotations obtenues en 2012. Les ressources publiques affichent une diminution de plus de 200 millions d'euros par rapport au COM initial. À cela s'ajoute la dégradation des prévisions de recettes publicitaires, avec une diminution qui pourrait être de 100 millions d'euros d'ici 2015. Au bout du compte, la diminution des ressources prévisionnelles de France Télévisions correspond à un montant d'environ 340 millions d'euros à l'horizon 2015, soit une diminution de 10,5 % par rapport au contrat d'objectifs et de moyens initial.

En réalité, cet avenant remet en cause l'équilibre général du COM pour la période de 2013 à 2015, avec le risque de dégâts collatéraux sur les missions de notre service public audiovisuel. Est-il besoin de rappeler que l'audiovisuel public joue un rôle de colonne vertébrale de l'exception culturelle, pour laquelle nous nous sommes unanimement mobilisés voilà quelques semaines ? Or, la réduction des coûts pèsera essentiellement sur la grille de programmes, qui représente plus de 80 % des charges opérationnelles. Les investissements dans la production cinématographique et audiovisuelle européenne ou d'expression originale française sont véritablement sabrés – et je ne doute pas que M. Marcel Rogemont y sera sensible. Le manque à gagner pour le secteur représentera 60 millions d'euros en cumulé à l'horizon 2015.

France Télévisions, ce sont 750 millions d'euros versés chaque année à la création audiovisuelle ; c'est l'aide à la fiction française et au spectacle vivant ; c'est aussi le média d'information de référence. C'est une offre diversifiée, ouverte, plurielle, à l'image des territoires et des talents de France. Ce sont des supports nouveaux et nombreux, via notamment les plates-formes numériques. C'est la France en outre-mer et dans le monde entier.

Il sera difficile de nous faire croire plus longtemps que le plan de sauvegarde de l'emploi est autre chose. Ce plan, qui doit ramener les effectifs à 9 750 personnes d'ici à 2015, sera lancé début octobre. On ne peut certes faire abstraction des réalités et la prudence aurait dû d'emblée inspirer nos gouvernants, qui avaient évoqué un peu vite une sanctuarisation des budgets de la culture. L'obligation de réduire la voilure interdit-elle pour autant de dire comment le faire et exclut-elle de fixer un cap ? Or, ce qui ressort des 14 recommandations de l'avis du CSA est un grand flou.

Que de manques identifiés par les sages de l'audiovisuel ! Manque de précision sur le projet Info 2015 concernant le rapprochement des rédactions de France 2 et France 3 – quelles étapes, quelles synergies attendues et, fondamentalement, quels projets pour la chaîne des régions ? Quelle contribution de cette chaîne à la vitalité des territoires, dans cette période où il faut plus que jamais repérer les jeunes pousses et les valoriser ? Quid du contenu exact de la nouvelle ligne éditoriale de France Ô et de France 4, désormais consacrée aux enfants petits et grands et aux jeunes adultes, et laboratoire au sein du bouquet de France Télévisions ? Très joli bouquet impressionniste, à la limite du fauvisme et de l'évanescence !

Le CSA relève encore un manque de clarifications quant au coût de développement des plates-formes en ligne, un manque d'ambition dans les diversifications et le développement des recettes numériques, un manque de précisions sur l'évolution des chaînes, notamment France 3, France 4 et France Ô, ainsi que sur l'évolution des effectifs et de leurs charges, et un manque d'ambition dans le domaine culturel.

Il s'agit donc d'un avenant-rabot, à la lame un peu large et au cheminement dangereusement indistinct, qui risque de ne laisser aucune trace utile, sinon une trace douloureuse pour les personnels de France Télévisions, pour la culture et pour la francophonie.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion