« De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace ! », disait Danton ; si l'on veut avancer en matière de construction européenne, il vaut mieux en avoir…
Le problème que posent les eurobonds, c'est « l'aléa moral » ; pour ma part, je crois qu'il n'y a aucun risque si, d'une part, on contrôle au préalable les finances publiques – tel est l'objectif du « two pack » et du « six pack », et je serais quant à moi favorable à ce que les recommandations de la Commission soient contraignantes – et si d'autre part, on fixe à 60 % du PIB la limite au-dessus de laquelle la dette d'un État membre ne pourrait plus être mutualisée, à charge pour lui d'émettre des obligations nationales, payables après les obligations européennes : cela fonctionnera comme un couperet.
Pour accéder au financement par les eurobonds, il faudra donc avoir rempli ses devoirs en matière de déficit, de dette et d'équilibres macroéconomiques. Cela n'est pas immatériel ! Comme dit Shakespeare : « Le bien et le mal ne sont pas dans les étoiles, mais au-dessous ».
Une crise comme celle que nous avons connue coûterait en réalité bien plus cher, y compris à l'Allemagne. Les mécanismes actuels ne marchent pas : nous sommes arrivés en retard en Grèce, à Chypre, au Portugal – et vous verrez qu'après les élections allemandes, il y aura un troisième paquet d'aides pour la Grèce !
Il faut donc mettre en place un cadre complet, comprenant des mécanismes de contrôle, une limitation de la dette susceptible d'être mutualisée, ainsi que des taux, des garanties et des conditions variables suivant la situation économique et financière du pays.
Bien sûr que les États-Unis sont nés d'abord parce qu'ils en avaient assez des Britanniques ! Mais si l'on fait les eurobonds, il faudra un Trésor, et si l'on a un Trésor, il faudra un responsable et c'est ainsi que l'on aboutira à un gouvernement économique.
J'ai bien conscience que mes propositions concernant le service extérieur ne sont pas porteuses électoralement, mais si nous ne faisons rien, nous resterons impuissants au plan international. Aujourd'hui, l'Europe ne compte pas : les Israéliens et les Palestiniens se tournent avant tout vers M. Kerry, et, en Syrie, on nous raconte des histoires. Pourtant, l'Europe aura besoin de contrôler les zones que les Américains délaisseront. Au Mali, ceux-ci n'ont pas participé à la coalition, non plus qu'en Libye. S'ils quittent le Moyen-Orient ou l'Afrique, ce sera à nous de décider ce qu'il faudra faire.
Si l'on veut un service extérieur, il faut être capable de définir une véritable politique extérieure commune. Pour l'instant, nous n'arrivons même pas à nous mettre d'accord à propos de l'embargo sur les armes pour l'opposition syrienne ! Il faut donc aussi une politique de défense commune, et donc une industrie d'armement : autant de pas vers un État fédéral ; à défaut, nous resterions impuissants, et nous risquerions de le devenir également sur le plan économique, car le monde bascule vers le Pacifique. À un moment donné, il faut bien décider d'avancer – peu importe à quelle vitesse !
Pour le siège du Parlement, j'ai toujours voté en faveur de Strasbourg.
Aujourd'hui, 500 millions de personnes parlent l'espagnol ; il s'agit de la deuxième langue apprise dans le monde et, avec 50 millions de locuteurs, de la deuxième langue parlée aux États-Unis. Nous avons déjà un pape qui parle espagnol ; nous aurons probablement bientôt un président des États-Unis qui parlera espagnol.
Le problème, c'est la puissance de la langue. Le français est devenu une langue optionnelle. Moi, je l'ai appris à neuf ans, quand j'étais à Lorient, en Bretagne. Aujourd'hui, c'est l'anglais qui s'impose. Quand nous sommes arrivés à Bruxelles en 1994, on parlait français et anglais ; depuis l'intégration des pays du nord et de l'est, on ne parle plus qu'anglais.
Quant aux interconnexions, je crois qu'en ce moment les difficultés viennent surtout du côté français. Le corridor central, au milieu des Pyrénées, soulève des difficultés financières – il faut creuser un tunnel long de 40 kilomètres – et environnementales. Le corridor méditerranéen est très important pour nous : 40 % des exportations espagnoles transitent par cette voie. Il faudrait le faire.
Nous sommes leader mondial pour l'énergie solaire et numéro deux pour l'énergie éolienne. Que faudrait-il faire pour avoir une vraie politique industrielle européenne, pour éviter les délocalisations et pour conserver une industrie importante en Europe – car je suis convaincu qu'on ne peut pas vivre avec seulement une économie de services ? La seule solution, c'est l'intégration européenne. Il faut nous protéger contre les pratiques déloyales : cela n'a aucun sens d'importer des marchandises qui ne sont pas produites dans des conditions raisonnables du point de vue de l'environnement. Et puis il faut revoir nos systèmes fiscaux pour ne pas favoriser le dumping. Bref, décidons d'être européens !
Je suis un européiste convaincu, je le reconnais. Je suis fédéraliste, car je crois que, dans le monde de demain, même les grands pays européens pèseront un poids négligeable face aux États-Unis, à l'Inde, à la Chine ou à la Russie. Nous n'avons pas assez de surface, de population, de ressources naturelles ; nous n'avons que de l'intelligence et, je l'espère, de la volonté.