Après la loi de 2007, après l’instauration du service minimum dans les écoles, après l’accord national interprofessionnel retranscrit dans la loi de sécurisation de l’emploi, nous avons affaire à une proposition de loi qui poursuit l’oeuvre de réduction des droits des salariés et de leurs représentants tout autant que du droit constitutionnel de grève. L’article 1er prévoit qu’un préavis de grève ne peut être déposé qu’après concertation ; or, comme vous le savez, ce sont souvent les employeurs, quelle que soit la branche d’activité, qui refusent la négociation et celle-ci ne s’ouvre souvent qu’après un déclenchement de mobilisation. Au lieu de stigmatiser les syndicats et les salariés, pourquoi ne pas faire une autre lecture du dialogue social ? En donnant, par exemple, plus de droits aux salariés dans l’entreprise, comme nous le proposons, avec une véritable représentation de ceux-ci au sein des conseils d’administration. Qui penserait ici, ne serait-ce qu’une seconde, que les salariés font grève par plaisir ? Qu’ils perdent des journées de salaire sans conséquences, alors qu’elles sont souvent lourdes pour eux-mêmes et leurs familles ?
L’article 2, qui reprend des dispositions déjà connues, propose un arsenal d’obligations pour les salariés mais également des sanctions individuelles pour celles et ceux qui n’auraient pas fait connaître leur intention de participer à la grève au moins vingt-quatre heures à l’avance. Il introduit une notion particulièrement dangereuse puisque « le niveau minimal de service doit permettre d’éviter que soit portée une atteinte disproportionnée à la liberté d’aller et venir, à la liberté d’accès au service public […] ».
Qui va définir la notion d’atteinte disproportionnée ? Si ce sont les mêmes qui ne supportent pas qu’un seul salarié puisse utiliser son droit de grève, je crains que l’atteinte soit en effet vite disproportionnée !
Je pourrais décliner l’ensemble du texte de la même manière tant est manifeste la volonté de stigmatiser et de montrer du doigt ce droit dont bénéficie les salariés et qu’ils ont obtenu au prix de leurs luttes. Permettez-moi tout de même de mentionner encore l’alinéa 25 de l’article 2 qui dispose qu’« en cas de perturbation du trafic, tout usager a le droit de bénéficier d’une information gratuite, précise et fiable sur le service assuré […] ».