Intervention de Jacques Krabal

Réunion du 2 octobre 2013 à 16h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Krabal :

La modernisation de notre droit de l'environnement est une nécessité, afin de le rendre plus clair, plus compréhensible, plus stable. C'est une condition pour assurer la sécurité juridique de l'ensemble des parties prenantes. Comment ne pas souscrire à une telle ambition ? Néanmoins, ainsi que le rappelait encore hier notre excellent président dans le cadre de la discussion générale sur le projet de loi d'habilitation à prendre par ordonnances diverses mesures de simplification et de sécurisation de la vie des entreprises, « il faut rester vigilant afin que le souci de simplification ne se transforme pas en échappatoire aux obligations » (Sourires).

On ne peut qu'adhérer à ce propos. La simplification ne doit pas avoir pour conséquence de détruire ce qui, auparavant, nous protégeait. De ce point de vue, la décision prise par France nature environnement, le 13 septembre dernier, de mettre fin à sa participation aux États généraux de modernisation du droit de l'environnement, témoigne d'un réel malaise : jusqu'où aller dans la simplification sans remettre en cause l'acquis du droit existant ?

Il est vrai que la France croule sous les normes, mais encore faut-il en comprendre la raison. Le droit actuel de l'environnement est aujourd'hui, à 80 %, d'origine communautaire. Il faut y ajouter les dispositions contraignantes issues des démarches de normalisation sectorielles : dans le cas de l'éolien, par exemple, il n'existe pas de certification propre, mais il existe une norme EN50308, qui s'apparente à la norme internationale CEI61400-1, laquelle fait elle-même référence à près d'une trentaine d'autres normes. Ces dernières sont, pour l'essentiel, le fruit du travail des ingénieurs, derrière lesquels on perçoit à la fin la pression des grands groupes industriels.

Il faut simplifier notre droit, dès lors que cette simplification vise à soutenir le développement de filières environnementales. Mais simplification et protection de l'environnement doivent rester pleinement compatibles.

S'agissant de la QPC remettant en cause la loi du 13 juillet 2011 sur les hydrocarbures non conventionnels, le Conseil constitutionnel devrait se prononcer le 11 octobre prochain. Sa décision pourrait nous laisser désarmés face à la fracturation hydraulique et le vide juridique ainsi créé ouvrirait la voie à la reprise de l'exploitation du sous-sol avec cette technologie. Que pensez-vous de cette problématique d'ensemble ?

Par ailleurs, il faut regretter que le principe de précaution se trouve trop souvent remis en cause. Il rendrait impossibles la recherche, la découverte et la mise en oeuvre de procédés innovants. Notre lecture en est radicalement opposée : le principe de précaution a pour objectif premier de favoriser, voire d'exiger, la recherche dès lors qu'un doute existe. C'est un principe stimulant et moderne.

À l'heure où le Gouvernement cherche, avec raison, à réaliser toutes les économies possibles, la commission présidée par le professeur Yves Jegouzo s'est penchée sur les modalités d'indemnisation du préjudice écologique et vient de présenter son rapport. Elle propose la création d'un établissement public national, chargé de réclamer et gérer les sommes dues au titre de la réparation de ce préjudice. Les citoyens français ne risquent-ils pas d'être doublement perdants, dépossédés, d'une part, par les associations ou les collectivités territoriales du droit de réclamer cette réparation, et privés, d'autre part, de la possibilité de voir indemnisés les dommages causés à leurs patrimoines individuels ?

Pouvez-vous nous garantir que le principe de précaution et celui de la participation du public sortiront bien, en pratique, renforcés des États généraux de la modernisation du droit de l'environnement ?

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