Intervention de Jérôme Lambert

Réunion du 2 octobre 2013 à 16h15
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Lambert, président :

Madame la ministre, la Commission des affaires européennes est heureuse de vous recevoir, pour la première fois depuis votre nomination au Gouvernement. Mme la présidente Danielle Auroi, empêchée de vous accueillir car elle accompagne le Président de la République en visite dans sa circonscription, m'a prié de vous transmettre ses regrets de ne pouvoir être présente à cette audition.

Les trois dossiers qui constituent votre portefeuille font l'objet de nombreux chantiers européens, qu'ils soient de nature législative, en vue de l'adoption de dispositions à court terme, ou plus prospective.

Dans le cadre de la programmation budgétaire pluriannuelle 2014-2020, la Commission européenne a manifestement souhaité renforcer les actions en faveur des PME. Cette volonté se traduit notamment par le nouveau programme COSME de soutien à la compétitivité des PME ou encore le futur programme Eurostars-2, qui a pour objectif de promouvoir les activités de recherche transnationales menées par les PME. Plus significatif en termes d'engagement politique et de volume de financements, le huitième programme-cadre européen pour la recherche et l'innovation, Horizon 2020, met l'accent sur les PME, avec trois catégories de financements fléchés.

Estimez-vous que cet arsenal communautaire répond bien aux attentes du tissu des PME européennes ? Ces 20,7 millions d'entreprises, rappelons-le, constituent une source majeure de la croissance économique et de la création d'emplois, avec 58 % de la valeur ajoutée brute des Vingt-huit et plus de 67 % des emplois du secteur privé.

Nous souhaiterions également des informations sur l'économie générale du paquet législatif Horizon 2020, qui a fait l'objet, en avril dernier, d'un rapport d'information de nos collègues Audrey Linkenheld et Jacques Myard. Dans leurs conclusions, les rapporteurs avaient insisté sur la nécessité, en dépit du resserrement du cadre financier pluriannuel, de « sanctuariser » les crédits du programme-cadre, eu égard au caractère hautement stratégique de la recherche et de l'innovation, afin d'éviter des « arbitrages hasardeux » entre thématiques scientifiques.

Six mois plus tard, l'enveloppe budgétaire totale accordée à Horizon 2020 vous semble-t-elle suffisante et la répartition entre priorités scientifiques vous semble-t-elle adaptée, pour soutenir l'innovation en réseau à l'échelle du continent tout en garantissant les intérêts de l'appareil industriel français, notamment de ses secteurs d'excellence comme l'aéronautique, l'espace, la sécurité, la santé ou l'énergie ? Avec Horizon 2020, pensez-vous que l'Europe est bien armée pour fluidifier le continuum recherche-innovation, afin de faciliter la mise sur le marché de produits innovant développés grâce à la recherche collaborative européenne ?

Enfin, à trois semaines du premier Conseil européen consacré à l'économie numérique, je souhaiterais évidemment vous interroger sur ce sujet stratégique, qui recèle de multiples enjeux.

La commissaire européenne à la stratégie numérique, Neelie Kroes, a présenté, le 12 septembre, une proposition de règlement sur les télécommunications, dont l'ambition affichée est d'éliminer les barrières freinant l'émergence d'un marché unique numérique. Vous avez émis des réserves à propos de ce texte, regrettant qu'il soit tourné vers la régulation des réseaux plutôt que vers la promotion de l'innovation. Quelles sont les propositions alternatives de la France ?

Un consortium de trois grands réseaux bancaires français vient d'annoncer le lancement d'un service de paiement en ligne baptisé PayLib, destiné à concurrencer la solution américaine PayPal, actuellement détentrice d'un quasi-monopole mondial. La Gouvernement affiche la volonté de faire émerger des entreprises européennes leaders dans le secteur du numérique. PayLib pourrait constituer l'amorçage d'un tel « champion ». Et l'enjeu est identique pour toutes les catégories de services numériques. Mais votre volontarisme politique ne risque-t-il pas de se heurter à la réglementation européenne de la concurrence ?

L'affaire Prism a d'ailleurs démontré combien l'économie numérique contribue aujourd'hui à la puissance géopolitique d'un État. Cette considération a poussé la Commission européenne à préparer une « Charte européenne de l'informatique en nuage », contenant des normes harmonisées susceptibles d'inciter les entreprises européennes à développer leur offre de services de stockage de données. Il s'agit non seulement de protéger les données des internautes européens mais également d'exploiter un gisement gigantesque de croissance et d'emplois. Ce document sera-t-il examiné lors du Conseil européen d'octobre ?

Le rapport Colin et Collin ainsi que celui du Conseil national du numérique mettent en évidence l'inadéquation du droit fiscal international, européen et national aux réalités de l'économie numérique, entraînant une érosion des bases préjudiciable aux États. Vous avez pris l'initiative d'organiser un « mini-sommet » à ce sujet avec six de vos homologues européens. Quelles mesures entendez-vous porter face à vos homologues européens ?

Je n'ai évidemment pas pu aborder la totalité des enjeux afférents à l'économie numérique. Je vous invite à nous faire part de vos réflexions sur d'autres thématiques qui vous sembleraient essentielles, notamment s'il est prévisible qu'elles soient traitées lors du Conseil européen des 24 et 25 octobre. Nos collègues Axelle Lemaire et Hervé Gaymard, qui, vous le savez, préparent une proposition de résolution européenne à ce sujet, seront particulièrement attentifs à vos réponses.

Avant de vous céder la parole, madame la ministre, je salue la présence parmi nous de Mme Nathalie Chiche, rapporteure, au nom de la section des affaires européennes et internationales du Conseil économique, social et environnemental, de la saisine consacrée à « Internet et sa gouvernance dans un monde globalisé », et celle de Mme Marielle Gallo, députée européenne, très engagée sur le sujet du numérique.

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