En effet. Nous soutenons donc une approche qui prenne mieux en compte toutes les parties prenantes, notamment les gouvernements. La privatisation de ce secteur d'activité est une menace contre laquelle nous devons nous mobiliser à l'échelle européenne.
Vous avez raison, madame Gallo, de souligner le décrochage de la France. Le phénomène n'est pas nouveau – il remonte à cinq ou six ans – mais il est inquiétant car il porte sur des enjeux d'avenir, qu'il s'agisse de la capacité de l'administration à se réformer ou de la pénétration des nouvelles technologies dans les PME et à l'école. Vous avez aussi raison de souligner notre potentiel : il y a beaucoup d'ingénieurs français dans la Silicon Valley, nos mathématiciens sont reconnus et demandés dans le monde entier ; bref, nous avons les ressources pour inverser la tendance.
J'ai ainsi lancé une réflexion sur les quartiers numériques. Pour en avoir observé les effets dans différents pays et pour en avoir discuté avec de grands investisseurs américains, je crois beaucoup à la proximité géographique, même si cela peut paraître paradoxal à l'heure des nouvelles technologies et de l'Internet. En mettant côte à côte, par exemple, un spécialiste de marketing, un ingénieur et un designer, on suscite d'importantes possibilités de création d'activité. En ajoutant des services en matière de conseil en propriété intellectuelle ou de financement par la Banque publique d'investissement ou par du capital-risque, nous créons des conditions favorables à la formation de cet écosystème. Ce projet bénéficie d'un peu plus de 200 millions d'euros au titre des investissements d'avenir et les appels à candidatures seront lancés à partir d'octobre 2013. Au-delà de la concentration géographique, l'effet de visibilité internationale me paraît important pour attirer les investisseurs étrangers.
Il est nécessaire, comme vous l'indiquez, que l'école permette une acculturation en direction du numérique, de l'innovation et de l'entrepreneuriat. C'est le sens du projet que je mets en place avec M. Peillon.
Les Assises de l'entrepreneuriat ont également permis de préciser les moyens d'améliorer l'environnement dans lequel les start-up peuvent se développer. Outre la réforme de la fiscalité des plus-values mobilières, nous avons pris une disposition visant à encourager le financement des PME innovantes par les grandes entreprises. Nous avons aussi renforcé le statut de « jeune entreprise innovante » et étendu le dispositif du crédit d'impôt recherche aux dépenses liées à l'innovation comme le design ou le prototypage.
Toutes ces mesures ne sont pas d'effet immédiat ; il faudra attendre un certain temps avant qu'elles ne portent leurs fruits. Mais il y a lieu d'espérer. Le président du fonds d'investissement de la société Intel, qui place environ 700 millions d'euros par an en Europe, me disait qu'il obtient son meilleur taux de rendement en France et que notre pays présente le plus de diversité dans les technologies innovantes et disruptives – bien plus que la Grande-Bretagne, par exemple, mais on se refuse à le croire dans la Silicon Valley car notre communication n'est pas très bonne et car l'information entre investisseurs se fait souvent de bouche à oreille. C'est un autre argument en faveur des quartiers numériques. Un investisseur étranger n'a pas forcément le temps de parcourir toute la France pour chercher une pépite. Si beaucoup d'entreprises sont concentrées en un seul endroit, les contacts se trouveront favorisés. Des investisseurs avisés reconnaissent qu'il y a, en France, talents et dynamisme ; il est, quoi qu'il en soit, rassurant de le constater.