Cela aurait été possible, mais ç'aurait été une mauvaise chose : pour qu'une demande d'entraide internationale soit efficace, particulièrement dans le domaine fiscal ou parafiscal, il faut qu'elle soit solidement étayée pour pouvoir avancer rapidement. Nous sommes sur des terrains très sensibles, où la coopération pénale internationale n'a pas toujours la même efficacité qu'en matière de droit commun : nous avons donc pour habitude d'éviter d'irriter nos partenaires étrangers par des demandes incomplètes, qui entraînent des demandes complémentaires. Au début de l'enquête, en concertation avec la DNIFF, nous avons d'abord imaginé faire cette démarche rapidement, puis nous avons changé d'avis et préféré attendre.
Le 12 mars, nous disposions d'éléments suffisants pour que notre demande soit complète : nous pouvions alors tirer les conséquences des auditions et viser, non seulement des délits comme la fraude fiscale ou le blanchiment de fraude fiscale, mais aussi le délit de blanchiment lié à des revenus versés par des entreprises pharmaceutiques. Cela permettait notamment de sortir du champ strictement fiscal et d'éviter des difficultés. J'ai alors appelé mon collègue de Genève.
Comme c'est toujours le cas, nous avons envoyé cette demande à Genève directement, avec copie par la voie hiérarchique. L'information judiciaire a été ouverte une semaine plus tard : la demande d'entraide a été jugée tellement bien faite que le juge d'instruction n'a pas estimé utile d'en faire une nouvelle ; il l'a laissé prospérer telle quelle.