Intervention de Amélie Verdier

Réunion du 21 mai 2013 à 18h45
Commission d'enquête relative aux éventuels dysfonctionnements dans l'action du gouvernement et des services de l'État, entre le 4 décembre 2012 et le 2 avril 2013, dans la gestion d'une affaire qui a conduit à la démission d'un membre du gouvernement

Amélie Verdier, directrice du cabinet de M Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget :

Je profite de votre question pour établir la chronologie du « dossier Garnier ». Celui-ci, inspecteur des impôts à la retraite, a sollicité un rendez-vous avec le ministre pour évoquer sa situation personnelle et la procédure disciplinaire engagée à son encontre par l'administration fiscale. Afin de préparer la rencontre qui a eu lieu en octobre 2012 dans le Lot-et-Garonne, deux notes, que je tiens à votre disposition, avaient été rédigées, récapitulant les différentes procédures le concernant. Nous n'avions alors connaissance ni du mémoire en défense ni des multiples courriers qu'il avait adressés aux ministres successifs. Sans entrer dans le détail de ce dossier, il s'agit d'un homme sollicitant le soutien du ministre dans les nombreuses procédures qu'il avait engagées contre l'administration et contre ses collègues.

Je n'ai pas assisté à l'entretien – sur lequel M. Fabrice Arfi nous a interrogés – mais je sais que le ministre n'a pas souhaité se mêler de la procédure visant M. Rémy Garnier. Vous le comprendrez, si je vous lis quelques extraits de la lettre adressée par M. Garnier au ministre le 16 mai 2012 : « Vive la République exemplaire, le règne sans partage d'une droite insolemment décomplexée aura duré deux législatures, dix années d'un saccage sans précédent des services publics dont le champ de ruines s'élargit sans cesse, n'épargnant aucun secteur ; l'administration fiscale en sort doublement meurtrie par la perte progressive de ses moyens matériels et humains et surtout par l'altération de ses valeurs essentielles héritées de la Révolution de 1789. Dès le 14 juillet 2002, je protestais contre mon déplacement d'office d'une brutalité inouïe par un communiqué en octobre 2001 au titre évoquant la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et plus particulièrement le principe d'égalité devant l'impôt… »

M. Rémy Garnier écrit donc à M. Jérôme Cahuzac le 16 mai 2012 pour dénoncer la responsabilité du chef de l'administration dans sa situation. Dans les documents dont nous disposons alors, il n'est nullement fait état d'un supposé compte suisse de M. Cahuzac.

Lorsque l'article de Mediapart paraît, il est demandé au directeur général des finances publiques d'examiner le dossier disciplinaire. C'est à cette occasion qu'apparaît le mémoire produit en défense lors de l'une des nombreuses instances auxquelles M. Rémy Garnier était partie.

À cette date, j'ai eu connaissance de ce mémoire, daté du 11 juin 2008. Sur les douze pages qu'il comporte, une est consacrée à M. Jérôme Cahuzac, les autres à divers collaborateurs ou supérieurs hiérarchiques de M. Garnier. Sous le titre « S'adonner à Adonis », il fait référence à l'application informatique permettant de consulter des comptes. M. Rémy Garnier s'est ainsi affranchi des règles du secret fiscal et des instructions de sa hiérarchie puisque, à aucun moment, le dossier de M. Jérôme Cahuzac ne lui a été confié.

Les informations contenues dans le mémoire ne sont pas celles que l'on trouve habituellement dans le mémoire d'un inspecteur des impôts effectuant un contrôle. On peut y lire : « Il se nomme Jérôme Cahuzac, son statut d'élu semble lui conférer une immunité à vie ». Au milieu d'informations fantaisistes, dont il concède qu'il ne les a pas lui-même vérifiées, et fausses pour certaines, comme il l'a reconnu ultérieurement, est mentionnée l'ouverture d'un compte bancaire à numéro en Suisse.

Je ne sais pas si ce mémoire avait été porté à la connaissance des ministres précédents. Je peux dire que cela n'a pas été le cas pour M. Jérôme Cahuzac.

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