En préambule, je souhaite réagir aux propos tenus devant vous par certains représentants de la direction générale des finances publiques et par des responsables de leur ministère de tutelle. À les en croire, personne n'a rien vu, rien lu, rien entendu. Pour ma part, je suis en mesure de vous livrer les noms d'une dizaine de personnes qui étaient au courant, ou auraient dû l'être si elles avaient fait correctement leur travail, depuis 2008, 2011 ou 2012. Pour elles, les révélations de Mediapart le 4 décembre 2012 n'auraient pas dû être une découverte : mon mémoire du 11 juin 2008 est en effet passé entre un certain nombre de mains.
Je souhaite en particulier réagir aux propos méprisants, insultants et mensongers de Mme Amélie Verdier, prononcés ici même sous la foi du serment. Mme Verdier m'a décrit comme un « Columbo autoproclamé ». Je la mets au défi de produire une seule déclaration ou un seul écrit où je m'affuble de ce surnom, plutôt flatteur, que je dois davantage à mes résultats qu'à mon imperméable un peu défraîchi !
Mme Verdier qualifie également mon mémoire de « fantaisiste ». Elle m'accuse d'avoir produit des écrits « incohérents » et me décrit comme un « procédurier » contre sa propre administration et contre de nombreux collègues. C'est un mensonge par action, par omission et par insinuation malveillante. Elle oublie de préciser que j'ai engagé ces procédures contre l'administration pour me défendre contre des sanctions disciplinaires arbitraires, répétées et injustes. Et je la mets au défi de produire la liste des collègues que j'aurais poursuivis : c'est un mensonge pur et simple !
Mme Verdier m'accuse également d'avoir pris des libertés avec le secret fiscal et de m'être affranchi des instructions de ma hiérarchie. La cour administrative d'appel de Bordeaux, dans son arrêt du 30 mai dernier, lui apporte un cinglant démenti : elle reconnaît que j'avais parfaitement le droit de consulter ce dossier en me servant du seul outil qui m'était laissé, l'application informatique Adonis, alors que j'étais dans un placard depuis une dizaine d'années.
Mme Verdier reprend des « éléments de langage » émis par divers communicants du ministre Jérôme Cahuzac, par son avocat, Me Gilles August, ou par une certaine presse satirique paraissant le mercredi, et malheureusement répercutés dans tous les médias. Pendant six mois, j'ai subi le tir croisé de ces attaques odieuses. Mais le pire était à venir : interrogé par un hebdomadaire de Lausanne, L'Hebdo, M. Daniel Richer, président du tribunal administratif de Bordeaux, m'a accusé, dans un courrier électronique publié en partie par la journaliste, de délation et effectue rien de moins qu'une comparaison avec la délation sous l'occupation nazie. Il est heureux que tous les magistrats de Bordeaux ne soient pas de ce bois-là ! Je rends d'ailleurs hommage à ceux qui m'ont donné raison dans les quelque douze procédures que j'ai gagnées devant la justice administrative. J'ai également gagné devant la Cour européenne des droits de l'homme et gagné à deux reprises en cassation.
En matière fiscale, je totalise aujourd'hui vingt-huit dégrèvements faisant suite à des impositions abusives. L'administration n'a jamais été en mesure de me redresser d'un centime !
Je veux donc lancer un cri de colère car, pendant ce temps, les fraudeurs rigolent dans notre dos ! Des vérificateurs comme moi se font quotidiennement insulter et menacer. Il y a deux ans, on a menacé un collègue d'Agen de le tuer à l'arme blanche. Un vérificateur a été assassiné à Marseille dans l'indifférence de la hiérarchie et de la direction générale des finances publiques. Je le dis à M. Parini : c'est une honte pour la démocratie, une honte pour la République, une honte pour la France !
Dans un tel contexte, et au risque de passer pour un provocateur, je vous avoue que M. Cahuzac me paraît sympathique, quelle que soit la gravité des fautes qu'on a pu lui reprocher : il a fait des aveux, il a demandé pardon à ceux qu'il avait offensés – j'en fais partie – et, surtout, il a reconnu le piège que l'administration m'avait tendu en 2001 dans le prolongement de l'affaire France Prune, du nom de cette union de coopératives de pruniculteurs que j'avais vérifiée en 1999. Il l'a déclaré dans le journal Sud-Ouest daté du 30 octobre 2011 et il me l'a répété lors de notre entretien du 26 octobre 2012.
Mon destin a croisé celui de Jérôme Cahuzac en trois occasions.
La première fois, c'était en 1999, dans le cadre de l'affaire France Prune.
La deuxième en 2008, au sujet de l'avertissement disciplinaire qu'on m'avait infligé pour avoir consulté son dossier avec l'application Adonis.
La troisième en 2012, pour un entretien en tête à tête.
J'articulerai mon propos autour de ces trois dates, non sans préciser que je laisse à la disposition de votre commission une série de documents qui apportent des preuves manifestes à l'appui de ce que je dis.
En 1999, après que j'ai notifié des redressements à France Prune en décembre 1998, Jérôme Cahuzac, député du Lot-et-Garonne, intervient au plus haut niveau, celui du secrétariat d'État au budget tenu à l'époque par M. Christian Sautter. La vérification étant en cours, cette intervention est quelque peu intempestive.
Dans une note confidentielle dont je vous remets ici une copie, le service juridique de la direction générale des impôts valide d'abord mon analyse du service sans la moindre ambiguïté : « Les pratiques de l'union de coopératives et de sa filiale s'inscrivent manifestement en contradiction avec les usages commerciaux les plus élémentaires. À cet égard, l'intérêt du groupe ne saurait justifier à lui seul de telles pratiques. » Cela n'empêchera pas ma hiérarchie, deux ans après, d'instruire mon procès en soutenant que j'avais fait une application personnelle de la loi fiscale. Sans doute ignorait-elle que j'avais eu ce document confidentiel entre les mains, ce qui lui permettait de raconter n'importe quoi !