Intervention de Christian Eckert

Réunion du 16 juillet 2013 à 18h30
Commission d'enquête relative aux éventuels dysfonctionnements dans l'action du gouvernement et des services de l'État, entre le 4 décembre 2012 et le 2 avril 2013, dans la gestion d'une affaire qui a conduit à la démission d'un membre du gouvernement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Eckert :

Certains profitent de leurs questions pour donner leur point de vue. Pour une fois, je vais en faire autant. Lorsque le ministre a évoqué certains documents dont j'ai été le destinataire, et mes déclarations sur le sujet, j'ai entendu des ricanements. Je vais donc rappeler ce que j'ai dit, et même écrit. J'ai en effet commis, la semaine dernière, un rapport dont certains ont pu dire qu'il avait pour objectif de blanchir M. Woerth ou de valider l'action de M. Parini – ce que les gens dotés d'une certaine mémoire pourraient juger surprenant.

J'essaie simplement de me montrer objectif. J'ai analysé les conventions entre la France et la Suisse et les lettres d'échange au sujet de leur application, et j'ai en effet pris connaissance des questions posées aux autorités suisses et des réponses qui y ont été apportées.

Tout d'abord, il fallait que la France prouve son intérêt à agir. Cet intérêt étant fondé sur la possibilité d'effectuer des poursuites et l'hypothèse d'un redressement fiscal, il était nécessaire de tenir compte des délais de prescription, qu'il s'agisse de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur la fortune. C'est pourquoi la période considérée ne pouvait courir qu'à partir de 2006.

Comme j'ai pu le constater dans le cadre d'autres affaires – UBS et HSBC –, les Suisses s'abstiennent de répondre lorsque les conditions d'interrogation ne sont pas respectées. Outre l'intérêt à agir, une de ces conditions est que l'administration nationale ait épuisé ses moyens d'action interne avant de recourir à l'entraide administrative. Tel est l'objet de l'envoi, à M. Cahuzac, du formulaire no 754 : c'était le point de départ du délai d'un mois nécessaire pour qu'une requête soit possible.

Par ailleurs, les textes prévoient que l'administration fiscale requérante – la France, en l'occurrence – fournit à la connaissance de l'administration helvétique toutes les informations permettant d'identifier le receleur des avoirs non déclarés détenus en Suisse. Si le nom de la banque UBS, cité par tous les articles de presse, n'avait pas été mentionné dans la demande, les Suisses n'auraient pas répondu.

Enfin, la demande mentionnait d'éventuels ayants droit. Or cette question – nous l'avons vu au cours des auditions – est assez complexe, car l'obligation de déclarer les ayants droit au moment de l'ouverture d'un compte bancaire en Suisse n'a pas toujours été de même nature. Je vous renvoie sur ce sujet aux déclarations de M. Condamin-Gerbier.

La demande adressée à la Suisse était donc conforme aux accords en vigueur. Rappelons que, dans le cadre de l'affaire UBS, 135 demandes similaires ont été effectuées, et que plusieurs mois, voire plusieurs années après, seule une poignée ont reçu une réponse. Il semble même que les Suisses refusent de répondre lorsqu'une adresse est incomplète, quand bien même ils disposeraient de tous les autres éléments nécessaires.

Je pense donc que tout a été fait pour que la demande d'entraide permette d'obtenir les informations.

Je reviens maintenant à la question posée par Mme Untermaier. En lisant le livre de la journaliste du Point, on sent monter une certaine irritation jusqu'à la date du 16 janvier. En se référant précisément à des entretiens entre le Président de la République, le Premier ministre et vous-même, la journaliste souligne que Jérôme Cahuzac a longtemps fait miroiter une éventuelle réponse des Suisses, et que le Président de la République, notamment, l'a plusieurs fois interrogé à ce sujet.

La deuxième source d'irritation est l'absence de réponse au formulaire no 754. C'est ce comportement, et le fait qu'aucune réponse ne venait de la part des Suisses, qui a conduit à lancer la procédure d'entraide – et je continue à penser que s'abstenir de la lancer aurait été de nature à choquer les membres d'une commission d'enquête. Ma question est donc la suivante : à quel moment votre doute méthodique s'est-il transformé en véritable doute ? Quel a été le déclic ?

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