L'attitude du ministre de l'économie est au centre de notre enquête : soyons très précis, même s'il doit y avoir des désaccords entre nous.
Dans l'interview qu'il accorde à Mediapart, vous écrivez : « Il nous a par ailleurs révélé une importante information sur un épisode de cette affaire, qui a fait l'objet de rumeurs ces derniers jours, mais qui n'était pas encore confirmé : dès le 14 décembre, soit dix jours après le premier article de Mediapart, l'administration des impôts a demandé à Jérôme Cahuzac de signer un document attestant qu'il n'avait pas de compte caché en Suisse, mais ce dernier n'a pas donné suite à cette demande. » On peut en tirer l'enseignement que l'administration a fait son travail.
La première question que lui posent Martine Orange et Laurent Mauduit est intéressante : « Une enquête préliminaire a été ouverte le 8 janvier contre Jérôme Cahuzac par le parquet de Paris. Vous avez cependant sollicité par l'intermédiaire de votre administration une entraide avec la Suisse seize jours plus tard. Cette enquête diligentée par vous sur des accusations qui visent un autre membre du Gouvernement n'est-elle pas en soi une atteinte évidente au principe de séparation des pouvoirs puisque la justice avait déjà lancé ses propres investigations ? » À ce moment-là, la critique que vous adressez au ministre, c'est donc de lancer une enquête administrative alors qu'une procédure judiciaire est en cours.
Pierre Moscovici répond très clairement : « Comme ministre, j'accordais ma confiance à mon ministre délégué, qui m'avait juré à de multiples reprises qu'il n'avait pas de compte en Suisse. […] Mais, en même temps, mon devoir était de contribuer à établir la vérité. Quand je lance cette convention d'entraide avec la Suisse, c'est parce que cela fait trop longtemps que la question est posée et est toujours sur la table. Il n'était pas logique de le faire avant : entre le 14 décembre et le 14 janvier, la direction des finances publiques a fait une demande à Jérôme Cahuzac sur d'éventuels comptes à l'étranger, demande à laquelle il n'a pas répondu. Je rappelle que notre convention avec la Suisse prévoit que les voies administratives nationales doivent être épuisées avant de demander l'entraide et qu'en règle générale, c'est nettement plus en aval des investigations de l'administration fiscale que ces demandes sont envoyées et qu'elles prennent environ un an. »
Je pense qu'il n'y a pas là de contestation possible.