Bien sûr, c'est mal de mentir, mais le sujet n'est pas le mensonge, c'est la manière dont il a été écouté, et accompagné par une partie du système médiatique. Je ne dis pas qu'il y a Mediapart et le reste de la presse. J'ai travaillé avec des journalistes d'autres rédactions sur cette affaire. Mais, oui, le commentaire et la communication ont tenté de tuer l'information et ce mensonge a été accompagné par une partie de l'administration et des pouvoirs publics. On voit bien les conséquences de l'article « Les Suisses blanchissent Cahuzac ». Le président de l'Assemblée nationale dit stop parce que le ministre n'a pas eu de compte en Suisse. L'affaire a failli être enterrée. La question, c'est l'accompagnement du mensonge et comment cela est possible dans un pays moderne. Pourquoi n'y a-t-il pas suffisamment de contre-pouvoirs pour empêcher quelqu'un qui fraude le fisc depuis plus de vingt ans de devenir ministre du budget ?
Nous ne voulons pas accabler un homme. L'homme Cahuzac n'est pas le problème. Jean-François Kahn a eu une formule qui a fait florès : « D'abord on lèche, ensuite on lâche, et puis on lynche ». C'est exactement ce qui est en train de se passer. On nous dit que c'est la faute d'un homme, mais les faits sont là. D'un côté, on met en cause un individu, mais, de l'autre, on annonce la création d'un super-procureur contre la corruption, d'un office central de lutte contre la corruption, une lutte contre les paradis fiscaux et plus de transparence sur le patrimoine des élus. Bien sûr que ce n'est pas que la faute d'un homme ! L'affaire Cahuzac n'est que la partie visible d'un iceberg poisseux, celui de la corruption, des paradis fiscaux et des montages offshore. Ne pas le reconnaître, ce serait entretenir l'aveuglement et, à mon sens, l'irresponsabilité du monde politique. C'est le résultat d'un système.