Intervention de Michel Issindou

Séance en hémicycle du 7 octobre 2013 à 16h00
Garantir l'avenir et la justice du système de retraites — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Issindou, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Après la conférence sociale de juillet 2012, le Conseil d’orientation des retraites a produit deux rapports sur l’état des lieux et les perspectives à l’horizon 2060. La commission d’experts, présidée par Mme Moreau, a ensuite préparé des pistes de redressement pour sortir du déficit prévisible de 20 milliards d’euros à l’horizon 2020. Enfin, les partenaires sociaux ont été consultés, et même s’ils ont exprimé des désaccords, ils ont fait avancer la réflexion sur les mesures de justice contenues dans le projet de loi. Je pense notamment aux mesures de pénibilité.

Le dialogue social est devenu une réalité dans ce pays. C’est la bonne méthode pour préparer les réformes majeures. Cette réforme est nécessaire, elle a été méthodiquement menée, encore faut-il qu’elle soit efficace et juste. Madame la ministre, je voudrais saluer l’équilibre global, l’architecture réussie de votre réforme.

Dans un premier temps, elle prend en compte l’impératif de rétablissement des comptes à l’horizon 2020, car on ne peut bâtir sur du sable ! Le régime général doit donc être remis à flot dans les sept ans à venir. Cela passe par un effort partagé de tous les acteurs de la retraite.

En premier lieu, parce que notre système est très fortement contributif, l’effort est demandé sous forme d’augmentation des cotisations, et par part égales, aux employeurs et aux salariés. L’effort est progressif et modéré : 0,3 % à l’horizon 2017, soit 4,50 euros en 2017 pour un salarié payé au SMIC. Cette augmentation modeste des cotisations répond à deux objectifs, essentiels dans la période : ne pas amputer le pouvoir d’achat des salariés et ne pas alourdir les charges des entreprises.

Les retraités, eux aussi, seront mis à contribution, de façon toutefois modeste. Notre système remarquable ne fonctionne que grâce à la solidarité intergénérationnelle. On ne peut demander aux seuls actifs de financer le déficit. Là aussi, l’effort demandé aux retraités est modéré. Le décalage de la revalorisation des pensions, sauf pour les bénéficiaires du minimum vieillesse, au 1er octobre représente entre 6 et 9 euros par mois, pendant six mois, pour les pensions inférieures à 1 000 euros. Cet effort, pour ceux qui touchent de petites retraites, est réel, et d’autres mesures devront le compenser.

Mais le Gouvernement n’a pas suivi les pistes évoquées, comme la suppression de l’abattement de 10 % de frais professionnels – dont on conviendra qu’il est, dans son intitulé, ubuesque –, l’alignement de la CSG sur celle des actifs, ou la désindexation durable, comme elle est pratiquée dans les régimes complémentaires.

La fiscalisation de la majoration de 10 % pour trois enfants est une mesure de justice, et elle complétera le dispositif. Les recettes à court terme, qui s’élèvent à 7 milliards d’euros, constituent le premier étage de la fusée « sauvetage du système par répartition ».

Le second étage est constitué par l’allongement progressif – là aussi, modéré – de la durée de cotisation. Il s’agit de la faire passer progressivement de 41,5 annuités à 43 annuités à l’horizon 2035, à raison d’un trimestre tous les trois ans, à compter de 2020. Ce sont ceux qui ont aujourd’hui 40 ans, la génération de 1973, qui devront justifier les premiers de 43 annuités pour une retraite à taux plein. On mesure, là encore, la progressivité du dispositif, et l’anticipation de l’annonce.

Ces deux étages de la fusée sont étroitement liés et ne peuvent être déconnectés. L’équilibre en 2040 en dépend. C’est toute l’architecture de la réforme qui apparaît : l’augmentation des cotisations peut être modérée parce que l’allongement de la durée de cotisation prend le relais à compter de 2020.

Ce n’est qu’au prix de l’effectivité de ces deux mesures que l’objectif premier de la réforme sera atteint : préserver un niveau de vie digne et satisfaisant à ceux qui vivront de plus en plus longtemps leur retraite. À partir de 2040, les papys boomers auront laissé la place à une population active nombreuse, et notre système retrouvera son équilibre.

C’est la première fois qu’une réforme essaye de voir aussi loin ! Bien sûr, les incertitudes économiques sont de nature à contrarier cet équilibre, mais les hypothèses retenues sont réalistes, avec un taux de productivité en progression de 1,5 % et un chômage qui redescendrait fortement, grâce aux politiques que nous menons.

Pour autant, la réforme est prévoyante. Elle instaure un comité de suivi des retraites, qui, par son expertise annuelle, saura alerter les gouvernants des dérives structurelles du système, notamment de l’éloignement des objectifs poursuivis.

Au-delà de ce rétablissement des comptes, préalable et indispensable à la pérennisation du système, ce sont les mesures de justice qui caractérisent votre réforme, madame la ministre. Jamais les réformes antérieures n’ont accordé autant d’importance à la réparation des injustices, à la résorption des inégalités, à des avancées sociales aussi fortes.

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