Trop de décrets peuvent dénaturer un texte de loi. Si la suppression du Comité de pilotage des régimes de retraite ne m’attristera pas, l’instauration d’un comité de surveillance des retraites me laisse dubitatif malgré les explications reçues en commission. Certaines de ses missions et de ses modalités de fonctionnement sont renvoyées en décret. Il peut rendre au Parlement, au Gouvernement et aux régimes de retraite des recommandations publiques. Celles-ci n’auraient-elles pu être rendues par le Conseil d’orientation des retraites, qui est un outil remarquable et dont le champ aurait pu être élargi à cet effet ? Alors que l’on veut simplifier le millefeuille, on en augmente toujours l’épaisseur.
Simplifier, rendre plus lisible pour l’usager un système de retraite extrêmement complexe a toujours été une de nos préoccupations. Le GIP Info Retraite a été, en ce sens, une réussite car en peu d’années il a créé pour tous les Français un droit effectif à l’information sur ce sujet avec une gouvernance réduite et des frais de gestion extrêmement bas. Dans un pays où plus de trente-cinq régimes de retraite couvrent les Français, où les ressortissants touchent en moyenne 3,5 pensions par personne, la simplification et la lisibilité sont nécessaires pour nos très nombreux polypensionnés qui seront évidemment, compte tenu de l’évolution de notre société, de plus en plus nombreux. Nous ferons tout, madame la ministre, pour que le guichet unique et le simulateur réussissent : c’est la suite logique du GIP Info Retraite que nous avions mis en place.
Rationaliser la gestion des systèmes de retraites est un impératif. Le système français est de loin un des plus coûteux en termes de gestion : les frais de gestion s’élèvent, tous régimes confondus, à près de 25 % des prestations versées là où la moyenne européenne s’établit à 1,2 %. Si la CNAV a des frais de gestion compétitifs, de l’ordre de 1 %, il n’en va pas de même de plusieurs petits régimes pour lesquels ces frais peuvent atteindre 10 % des prestations.
La multiplicité des régimes, donc des dépenses de fonctionnement et d’investissement, est ainsi un facteur d’inflation de ces frais de gestion qui pourraient être pour partie mutualisés. Cela est notamment vrai des modalités techniques de recouvrement, de mise en paiement et des systèmes d’information. La conjonction du départ en retraite d’un quart des 80 000 personnels gestionnaires et du renouvellement des systèmes d’information obsolètes est une opportunité pour rationaliser la gestion des systèmes de retraite. Un tel processus de rationalisation pourrait dégager jusqu’à 2 milliards d’euros par an.
Mes chers collègues, le renvoi en commission est également nécessaire sur la forme, sur la méthode et sur le fond.
Sur la forme, le calendrier est étonnant : le Gouvernement impose un rythme qui nuit aux bonnes conditions d’examen du texte. Quatre jours, weekend compris, entre la présentation du texte en conseil des ministres et l’examen en commission ; trois jours entre le moment où nous avons disposé du texte issu de la commission et le début de l’examen en séance : le Gouvernement est très loin d’avoir respecté le délai réglementaire de six semaines entre le dépôt et le début de l’examen du texte.
L’étude d’impact est surprenante ; Arnaud Robinet y a également fait allusion. En effet, la pression du calendrier se double d’un déficit d’information de la représentation nationale au regard d’une étude d’impact incomplète, qui passe sous silence l’évaluation des principales mesures de la réforme. Sous prétexte d’avoir placé l’examen des hausses de cotisations dans le PLFSS et celui de la fiscalisation des bonus pour trois enfants dans le PLF, le Gouvernement s’est dispensé d’évaluer ces mesures. Pourquoi ? Les députés UMP aimeraient savoir combien de ménages vont basculer dans l’impôt sur le revenu ou devront payer une taxe d’habitation, la redevance audiovisuelle ou la CSG au lendemain de la réforme. Les députés UMP aimeraient aussi connaître les intentions du Gouvernement en matière de compensations des hausses de cotisation employeurs.
J’en viens à la méthode. Nous avons entendu maintes fois nos collègues de la majorité se féliciter de celle qu’a employée le Gouvernement…