S'agissant de la secrétaire du CCE, son élection s'explique par le fait que le groupe GDTF regroupe les sites d'Amiens-Nord, de Montluçon et de Riom, ainsi que le siège social. Si l'encadrement domine largement au siège social, Amiens-Nord est composé pour deux tiers d'ouvriers et pour un tiers d'agents de maîtrise et de cadres. Si nous représentons le plus gros site du groupe, la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi – DIRECCTE – de Nanterre, qui détermine la composition du CCE, ne donne pas à Amiens-Nord plus de moyens qu'au siège social. Selon les voeux du personnel, les deux élus titulaires d'Amiens-Nord appartiennent à la CGT. Comme la CGT de Montluçon n'a pas de candidat au deuxième collège, elle perd le siège qui lui était attribué dans le cadre du CCE au profit de la CFDT, qui est, par ailleurs, toujours majoritaire sur le site de Riom – ce qui lui fait un siège. Enfin, Mme Charrier, qui appartient à la CFE-CGC, est la seule et unique candidate pour le siège social – elle est élue au deuxième tour car le quorum n'est jamais atteint. Il existe des accords historiques entre les organisations syndicales. La CFDT, pour obtenir le poste de secrétaire du CE de Montluçon, fait alliance avec la CGC. C'est pourquoi, un service en réclamant un autre, Reynald Jurek n'obtient pour le poste de secrétaire du CCE que les deux voix de la CGT, contre Mme Charrier, qui en obtient trois – la sienne plus les deux voix de la CFDT.
Quant au salaire moyen d'un ouvrier de Goodyear, il tourne autour de 2 200 euros toutes primes et le treizième mois confondus. C'est moins que chez Continental, mais supérieur au salaire moyen de la région.
Un salarié qui incorpore les matières premières nocives perçoit un salaire de base équivalent au SMIC plus des primes – noir, douche, salissure, claustrophobie, bruit, environnement, etc. Ce salarié quitte son poste une demi-heure avant les autres car c'est le temps qu'il lui faut passer sous la douche pour que les pores de sa peau rejettent le noir ingéré durant la journée de travail. Il repart également tous les jours avec un pot d'huile d'amande douce pour se frotter les yeux et finir d'en extraire le noir qui en sort. Les rémunérations ne sont pas correctes, mais elles sont conformes aux conditions de travail des salariés.
S'agissant des HAP-CMR, Goodyear connaît d'autant mieux les règles que l'inspection du travail n'a pas cessé de les lui rappeler. Je suis allé jusqu'au ministère du travail et une plainte au pénal est en cours contre les anciens et les nouveaux dirigeants du groupe – M. Rousseau ainsi que les dirigeants d'Akron. Nous avons créé une structure qui mène une class action aux États-Unis contre le groupe Goodyear, puisque toutes les décisions concernant l'utilisation des produits ont été prises par la maison mère.
Sans compter une bonne information, la législation prévoit, en cas d'utilisation de produits nocifs, trois types de mesures. Les premières consistent dans la substitution des produits. Michelin, Contintental et Bridgestone ont soit prévu des produits de substitution en Europe, soit délocalisé les productions dans des pays où la santé au travail n'est pas prise en considération. La deuxième obligation, c'est de capter à la source la dangerosité du produit via des moyens de protection collectifs, tels que des aspirations collectives. Enfin, le troisième type de mesures consiste en des équipements de protection individuels (EPI) : gants, masques, lunettes. Eh bien, Goodyear n'a appliqué aucun de ces trois types de mesures. Si vous venez à Amiens-Nord, la direction devra vous fournir des moyens de protection élémentaire pour que vous ne couriez pas le risque d'attraper les mêmes maladies que les salariés du site. Je tiens, par exemple, à vous signaler qu'à la suite d'un prélèvement d'urine qui a été effectué sur un salarié, celui-ci a été immédiatement changé de poste : il est passé des presses, c'est-à-dire de la vulcanisation, qui dégage des vapeurs toxiques, aux finitions, car les résultats de son prélèvement révélaient un taux de HAP-CMR dix fois supérieur à la moyenne. La direction a pourtant refusé notre demande d'une réunion extraordinaire du CHSCT, nous assurant qu'elle respectait ses obligations légales en matière de santé au travail et que Goodyear n'utilisait plus de produits cancérogènes, ce qui est faux.
Si la direction de Goodyear use du mensonge depuis de nombreuses années et a même réussi à tromper d'autres organisations syndicales, elle n'a pas réussi à enfumer la CGT. Les documents que je vous transmets aujourd'hui contiennent les preuves de ce que nous avançons. J'en ai d'autres à votre disposition.
Si nous nous battons avec autant de détermination, c'est que nous savons que nous ne retrouverons jamais de travail dans cette région sinistrée si Amiens-Nord ferme.