Madame la ministre, vous n’avez certainement pas lu tous les travaux disponibles sur la question des retraites avant de nous proposer cette réforme. Ou alors vous les avez mal lus.
Parmi d’autres, nombreux, Jean-Michel Harribey, professeur d’économie bien connu, nous donne pourtant les raisons objectives de ne pas pousser des cris d’orfraie quant à l’évolution démographique qui, selon vous, permet de justifier l’inacceptable. En effet, l’aggravation des déficits des caisses de retraite – 20 milliards d’euros prévus en 2020 – n’est pas due à l’évolution démographique mais à la crise et au chômage.
C’est confirmé par le rapport Moreau, publié en juin dernier : « La durée et l’ampleur de la crise depuis 2008 affectent fortement le système des retraites et rendent plus exigeantes les conditions du retour à l’équilibre. À long terme, les effets directs de la crise économique sur les ressources du système de retraite ne seront pas atténués mais la crise, en pesant négativement sur les pensions futures des générations touchées, aura pour conséquence de ralentir l’effet de noria sur la croissance de la pension moyenne des retraités, tant que toutes les générations touchées par la crise ne seront pas parties à la retraite. »
Le péril vient donc de la poursuite de politiques d’austérité – dans lesquelles vous nagez et qui aggravent la récession – et de l’accomplissement des réformes structurelles réclamées à cor et à cri par la Commission européenne, le patronat et tous les lobbies de l’assurance.
Presque toutes les dispositions prises en 1993, 2003 et 2010 s’en tiennent aux mêmes remèdes : sous-indexation des pensions par rapport aux salaires, calcul des pensions sur la base des vingt-cinq meilleures années au lieu des dix pour les salariés du privé, et, par-dessus tout, allongement indéfini de la durée de cotisation.
Nous aurions espéré qu’un Gouvernement qui se range à gauche de l’échiquier politique change de credo, qu’il nous propose une autre réforme, en décidant notamment d’assujettir les revenus financiers des sociétés financières et des sociétés non financières à une contribution d’assurance vieillesse. Nous vous demandons de supprimer l’article 2.