Nous allons avoir l’occasion de communiquer quelques témoignages, car j’ai effectivement lancé un appel et j’en ai reçu plusieurs dizaines. Je me limiterai, donc, à vous en lire un parmi d’autres. « Les quarante-trois ans de cotisations, qu’est-ce que cela veut dire ? J’ai vingt-neuf ans. Je travaille depuis un peu plus de cinq ans. Pour moi, c’est une projection bien lointaine. On nous parle de l’allongement de l’espérance de vie. Mais cela me projette à un âge canonique dans lequel je ne suis pas capable de m’imaginer. Quarante-trois ans, soixante-sept ans l’âge de départ. C’est à peu de chose près l’âge auquel mon grand-père est décédé.
Je cherche dans mon entourage des gens qui ont ces âges-là et j’essaie de me dire que je leur ressemblerai, mais que je travaillerai encore. Je pense à eux, mais je ne m’imagine pas comme eux. Je suis trop jeune, c’est impossible. Je les regarde. La totalité sont retraités. Certains ont la forme, d’autres pas. La plupart me paraissent avoir beaucoup travaillé au cours de leur carrière en donnant beaucoup à leur travail et pas nécessairement à l’usine ou dans des tâches difficiles. Je m’imagine travailler avec ces gens. Dans mon boulot, la Territoriale, un secteur qui ne connaît pas le concept de travail pénible, je ne vois pas comment ils pourraient tenir le coup.
Soixante-sept ans, augmentons encore plus ! Travailler jusqu’à la mort, nous forcer à travailler jusqu’au bout pour subvenir à de maigres besoins. »