Dans ce débat récurrent, mon point de vue est complètement opposé à celui de M. Mariton. J'ai toujours pensé que notre impôt sur le revenu était aberrant. Chez nos partenaires européens, il aboutit en moyenne à prélever 10 % des revenus contre 2,5 % chez nous, où il faut y ajouter la CSG – représentant 8 % du revenu – pour arriver au même taux, mais dans le cadre d'un dispositif mal construit, la CSG étant proportionnelle tandis que l'impôt sur le revenu, seul, est progressif.
En fusionnant ces deux impôts, nous nous rapprocherons de tous les autres pays européens, dont l'impôt est en général individualisé et où les charges familiales sont compensées, non par le quotient familial, mais par un crédit d'impôt ou par des abattements qui peuvent être proportionnels ou fixes.
Pour accomplir cette réforme essentielle, il y a deux méthodes : soit la « nuit du 4 août » que préconise M. Piketty, soit la démarche progressive que M. Didier Migaud recommandait dans un rapport parlementaire de 2008 et que j'ai décrite dans Un impôt citoyen pour une société plus juste. Je crois que la réforme est réalisable en quatre ou cinq ans. La difficulté principale tient à ce que la CSG est un impôt individualisé prélevé à la source tandis que l'impôt sur le revenu est prélevé ex post et familialisé. Pour la résoudre, la première étape consiste à supprimer des niches fiscales, ce que la gauche comme la droite ont commencé à faire, et de soumettre l'intégralité des revenus au barème, ce que nous avons fait l'an dernier.
Certes, comme le souligne le président Carrez, cette transition suppose que l'on soit dans une période de croissance afin que l'évolution des revenus apporte des compensations et des marges de manoeuvre. Mais nous ne devons pas abandonner ce projet qui a un sens dans le quinquennat.