En matière de mutualisation, les procédés qui fonctionnent sont ceux qui ne font pas prendre de risques politiques aux pays qui possèdent l'équipement ou la capacité auxquels on fait appel. Ces risques peuvent être plus ou moins élevés : il apparaît ainsi moins dangereux de fournir du transport aérien militaire que de fournir du transport aérien tactique avec largage de parachutistes au-dessus d'une zone d'opérations. De même, s'il est assez facile d'obtenir des ravitailleurs pour l'entraînement, les choses se compliquent s'il s'agit de les faire voler au-dessus du Mali. En somme, la mutualisation marche, mais avec des limites, même si certains pays peuvent parfois décider de ne pas en fixer – comme ce fut le cas pour les avions belges et danois dans l'opération Serval. Mais avoir accès au matériel mutualisé pour l'entraînement représente déjà un avantage, car cela permet de préserver du potentiel.
La mutualisation des drones est particulièrement simple, à condition de posséder le même modèle : comme ils sont commandés à partir d'une station au sol, une heure et un accord diplomatique suffisent pour faire voler un appareil sous la cocarde française. Or nous avons entrepris de nous équiper en drones Reaper, les Italiens et les Anglais utilisent le même modèle, et les Allemands y viendront sûrement aussi.
La mutualisation avec les Britanniques concerne aujourd'hui le transporteur aérien A400M et le programme de missile antinavire léger (ANL) ; elle suppose d'avoir accès aux mêmes chaînes de fabrication, voire de disposer d'un lieu de stockage unique. Des progrès restent possibles dans bien des domaines. Sans être spectaculaire, le procédé se révèle relativement efficace ; mais il exige d'avoir la garantie de pouvoir accéder à l'équipement nécessaire au moment voulu, donc de disposer d'un accord politique et – avant tout – de partager la même vision du monde.
Enfin, les lignes bougent en matière de prépositionnement. En effet, en opérations extérieures comme ailleurs, nous essayons d'alléger le poids des structures. Mais la taille du théâtre des opérations et les conditions météorologiques peuvent compliquer la tâche.
Nous devons travailler non seulement au Mali, mais sur l'ensemble de la bande sahélo-saharienne – de l'Atlantique à la mer Rouge, du Nord du Mali au Sud libyen. Nous coopérons étroitement avec les Mauritaniens, les Maliens, les Nigériens et les Tchadiens. Le Sud libyen souffre d'un problème de stabilité gouvernementale et administrative ; si les Libyens sollicitent notre aide, le changement incessant des interlocuteurs rend le travail difficile. Quant à la Tunisie, accaparée par ses problèmes intérieurs, elle s'est rapprochée de l'Algérie. Notre prépositionnement – à géométrie variable – est donc appelé à évoluer ; en 2016, il sera tout autre qu'aujourd'hui.
S'agissant de la République centrafricaine, la situation dans ce pays fait en ce moment l'objet d'une tentative de résolution auprès des Nations unies, qui pourrait devenir une première étape dans le règlement du conflit. Début décembre, les chefs d'État africains - que le Président de la République réunira au sommet de Paris - pourront aborder ensemble la question de la sécurité dans la région.