L’article 26 vise à lutter contre le non-recours à l’allocation spécifique de solidarité pour les personnes âgées. C’est un bon article que nous voterons. J’en profite pour évoquer la situation des vieux travailleurs immigrés maghrébins, ceux que l’on appelle les chibanis, expression respectueuse que l’on peut traduire par « cheveux gris ». Arrivés dans les années cinquante, ils ont participé au redressement de notre pays, ont eu des carrières hachées, acceptant tous les travaux même les plus pénibles, ils ont des niveaux de pension aujourd’hui très faibles, complétées par l’allocation de solidarité aux personnes âgées, l’ASPA.
Ainsi, sur 422 000 bénéficiaires de l’ASPA relevant du régime général en 2012, environ 100 000 sont originaires d’un pays du Maghreb. Ils sont partagés entre deux pays, la France où ils vivent souvent en grande précarité et leur pays natal. Mais une telle mobilité entre deux foyers, que l’on admet d’un retraité francilien qui retournerait périodiquement en Corrèze ou en Bretagne, est rendue difficile pour les chibanis bénéficiaires de l’ASPA dont un des critères est l’obligation de résider au moins six mois en France. Cette obligation fait peser sur ces vieilles personnes qui vivent souvent en foyer un intolérable soupçon de fraude sociale. Cette suspicion est abordée dans le rapport de la mission d’information sur les travailleurs âgés, présidée par Denis Jacquat et dont le rapporteur est Alexis Bachelay.
Concernant cette question spécifique de l’ASPA, je dois vous avouer une certaine déception à la lecture de ce rapport. En effet, il ne remet pas en question l’obligation de résidence de six mois en France. Tout juste se contente-t-il de quelques considérations d’ordre général et de préconiser une application plus souple de ce principe par les caisses de retraite. Je ne vois du reste pas très bien comment cela peut se traduire concrètement. L’obligation de résidence va donc continuer à être imposée à des retraités qui, pour la plupart d’entre eux, ont travaillé vingt ans, trente ans, quarante ans dans notre pays. Comme l’écrit M. Jacquat dans sa préface : « Cette mission visait à rendre visible ceux qui paraissaient invisibles et écouter celles et ceux qui ont tant contribué à l’histoire économique et sociale de notre pays et auxquels on n’a pas assez donné la parole et qui dans leur digne réserve ne sont pas prompts à s’en emparer. » À ce titre, l’objectif n’est pas atteint.