Il est impossible de penser la question de l'organisation sociale sans aborder celle de son empreinte environnementale. Or, si nous sommes amenés aujourd'hui à nous interroger sur notre responsabilité sociale et environnementale, c'est que nous traversons une crise si profonde qu'elle remet tout en cause, et plus particulièrement les désordres et les bouleversements dont nos activités sont à l'origine. C'est à la demande de la société civile, en particulier des associations écologiques, que le concept de RSE s'est charpenté depuis le début des années 2000, avant d'être consacré par le processus puis les lois du Grenelle de l'environnement.
Comment faire ? C'est tout ce à quoi se résume la question. Comment assurer une meilleure prise en compte des effets environnementaux et sociaux des activités des entreprises ? C'est le sens de vos vingt propositions. La première partie du rapport montre bien que la prise de conscience n'est pas acquise puisqu'aujourd'hui encore vous posez la question de la crédibilité. Il reste encore à persuader l'ensemble des acteurs. À cet égard, la proposition n° 2 me semble apporter une piste de réponse. Le dialogue social est la clef de voûte de l'appropriation par tous les acteurs. Tant que cette appropriation collective ne sera pas acquise, nous aurons bien du mal à faire de la RSE une réalité globale.
Les PME bénéficient d'un régime dérogatoire, car elles n'ont pas forcément les moyens d'améliorer leur RSE. Compte tenu de l'hétérogénéité du tissu des PME, vous préconisez la mise en place d'un cadre réglementaire simplifié et adapté, et la diffusion de guides d'élaboration de démarches RSE. Sans doute avez-vous raison de ne pas préconiser des contraintes supplémentaires, car elles pourraient constituer des freins et engendrer une perte de temps que les dirigeants de PME doivent consacrer à leur activité. Vous rejetez une RSE au rabais, mais il me semble qu'un minimum de règles, ni trop chronophages ni trop contraignantes, seraient plus efficaces pour obliger à améliorer les démarches RSE des PME.
Au niveau de la sphère publique et des États, dans tous les domaines, confirmant ce dont chacun peut se rendre compte, les accidents, les drames, les rapports alarmants se multiplient sans que l'on change jamais de perspective pour appréhender ce qu'il y a réellement lieu de faire. On qualifie aussitôt les rapports d'alarmistes, quand on ne cherche pas à les discréditer ou à les clouer au pilori. Il en est ainsi de l'étude du professeur Séralini sur l'introduction des OGM dans l'alimentation humaine, de celle du professeur Belpomme sur les dangers des ondes électromagnétiques, de celle du GIEC sur le réchauffement climatique, sans parler de celle sur l'exploitation des gaz et huile de schiste. Ces études se fondent pourtant sur quelque chose. Alors que les États ont beaucoup de difficultés à écouter ces recommandations, que certains ferment les yeux, comment sensibiliser nos entreprises ? Nous devons inverser les valeurs, remplacer le quantitatif par le qualitatif pour satisfaire nos besoins fondamentaux, favoriser la protection et le déploiement de la sphère non-marchande pour produire les services que sont la santé, l'éducation, la recherche, la culture.
J'ai conscience que ces différentes mesures ne sont possibles qu'à condition de coordonner le développement qualitatif à l'échelle globale, puisque c'est à ce niveau que se posent nos problèmes. L'instauration d'une responsabilité sociale et environnementale passe par une coopération fondée sur les principes d'égalité et de réciprocité, d'équité et de justice. La détermination de normes de gestion de ressources socio-éco-responsables ne peut se faire qu'à l'issue d'une délibération mondiale. Il n'y a de développement durable que dans cette perspective. Pouvez-vous nous indiquer, alors que vous dites la RSE incontournable au niveau mondial, ce qu'il en est au niveau de l'Europe et dans le reste du monde ?