Intervention de François Asensi

Séance en hémicycle du 15 octobre 2013 à 21h30
Loi de finances pour 2014 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Asensi :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, les adeptes de la méthode Coué aperçoivent la reprise économique « au coin de la rue ». Nous aimerions que cela soit vrai, mais la réalité est tout autre. La crise du capitalisme financier perdure et s’amplifie. Les Français la ressentent de plein fouet et sont aujourd’hui dans une grande désespérance.

Comment nier la hausse de la pauvreté ? Elle concerne 8,8 millions de nos concitoyens, soit un million de plus qu’il y a dix ans. Voilà la régression sociale à laquelle conduisent les politiques libérales !

Comment nier la poursuite de la hausse du chômage ? Avec près de 11 % de chômeurs, nous sommes revenus à la situation de 1997. Je crains que le Gouvernement n’attende l’inversion de la courbe du chômage comme on attend Godot, faute d’avoir impulsé une politique de relance.

Comment nier qu’il n’y a jamais eu autant de destructions de sociétés ? Avec une hausse de 7,5 %, les liquidations judiciaires connaissent un rythme pas même atteint en 2009, au plus fort de la crise. Les plans sociaux s’accumulent, facilités par l’accord national interprofessionnel.

Ce marasme économique, voilà l’héritage d’années d’ultralibéralisme promues par la droite de cet hémicycle. Nous payons encore le prix de cette politique au service des plus riches.

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013, nous attendions du nouveau gouvernement qu’il réponde à la volonté de changement exprimée dans les urnes, qu’il engage la lutte contre la finance, cet ennemi de l’économie réelle. Cette attente avait été déçue. Elle est aujourd’hui totalement ignorée.

Monsieur le ministre, le Gouvernement s’engage à son tour dans la course folle à la compétitivité et à la baisse des salaires qui ne fait que des perdants, Allemagne comprise. Avec ce projet de loi de finances, votre majorité tourne définitivement le dos au projet social-démocrate pour embrasser l’idéologie libérale et « austéritaire » : réduction des services publics, baisse des salaires, injustice fiscale. Pourtant, partout en Europe, cette politique mène à l’impasse. La dette publique européenne est passée de 88 % du PIB l’an passé à plus de 92 %. C’est un échec cuisant qui montre qu’on fera baisser la dette non pas en comprimant les dépenses, mais en relançant l’activité.

Ce projet de loi de finances peut se résumer à un choix que nous contestons avec la plus grande fermeté : faire payer par les ménages les cadeaux fiscaux accordés aux grandes entreprises. Alors que le CAC 40 se soustrait à l’impôt sur les sociétés, supporté en réalité par les PME, vous entendez augmenter encore les exonérations des grands groupes qui délocalisent la main-d’oeuvre et les profits, grâce au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, dont la très faible efficacité pour créer de l’emploi est unanimement dénoncée, y compris par la Cour des comptes.

Les salariés qui luttent actuellement pour leur emploi n’en peuvent plus de la lune de miel entre le Gouvernement et le MEDEF. M. Gattaz a obtenu sans mal l’enterrement du projet de taxe sur l’excédent brut d’exploitation, une faveur qui s’ajoute au fait que la contribution des entreprises au financement de la réforme des retraites est nulle.

Partout dans le pays, la colère des Français est à la hauteur de l’injustice, une injustice fiscale que seule la droite avait osé imposer jusqu’à présent. En plus de créer de la désespérance, une telle convergence – il faut bien l’avouer – des options économiques de l’UMP et du PS brouille totalement les repères traditionnels de la droite et de la gauche, ce qui ouvre le champ à l’extrême-droite. N’est-ce pas une des explications de la poussée électorale du Front national ?

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