Intervention de Bruno Muret

Réunion du 2 octobre 2013 à 16h30
Commission d'enquête relative aux causes du projet de fermeture de l'usine goodyear d'amiens-nord, et à ses conséquences économiques, sociales et environnementales et aux enseignements liés au caractère représentatif qu'on peut tirer de ce cas

Bruno Muret, directeur du département économie et communication du Syndicat national du caoutchouc et des polymères, SNCP :

La sécurisation des approvisionnements en matières premières est un problème délicat. On peut citer, entre autres alternatives au caoutchouc, la guayule, qui génère de l'isoprène, présent dans le latex de l'hévéa, et le pissenlit cultivé par les Soviétiques au cours de la Seconde Guerre mondiale. C'était l'époque où la route du caoutchouc naturel était fermée, puisque les Japonais occupaient l'Asie du Sud-Est où se concentraient les plantations. Il n'existait pas d'autre solution que le recyclage ou les cultures alternatives. On compte plus de 1 000 plantes laticifères dans le monde. Le pissenlit qui pousse en France fournit aussi de l'isoprène, mais dans une faible proportion.

Si l'hevea brasiliensis reste la seule plante cultivée qui produise du caoutchouc naturel, un programme européen, auquel participe le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), basé à Montpellier, cherche à lui trouver un substitut. Il était difficile de développer la culture de l'hévéa dans sa zone de production, les hauts bassins amazoniens, car l'arbre est victime d'une maladie cryptogamique qui entraîne la défoliation et empêche la production de latex. Les Brésiliens ont toutefois réussi à le faire pousser au sud, dans le Mato Grosso, le reste de la production étant assurée à plus de 90 % par l'Asie du Sud-Est, Thaïlande, Indonésie, Malaisie et Vietnam.

Le CIRAD travaille, en association avec Michelin, sur des clones résistant au microcyclus ulei, champignon qui n'est pas connu dans l'Asie du Sud-Est. Le risque que celui-ci représente, que j'entends évoquer depuis des années, mérite d'être pris en compte, au même titre que d'autres facteurs climatiques ou phytosanitaires propres à toute activité agricole.

L'hévéaculture, qui représentait à l'origine 100 % de la consommation des gommes des manufacturiers de pneumatiques, fournit aujourd'hui 40 % de la consommation mondiale de caoutchouc. Le taux est descendu à 30 % dans les années soixante-dix ; depuis lors, il est remonté, compte tenu de la qualité inégalée de ce matériau.

L'évolution des cours pose un réel problème. Le prix du caoutchouc naturel a considérablement augmenté début 2011, ce qui a généré des surcoûts pour les manufacturiers. Cette situation a pourtant eu un effet positif pour les planteurs, lesquels ont bénéficié d'un prix plus rémunérateur, qui les a amenés à réinvestir. Il faut attendre sept ans avant de pouvoir exploiter une plantation d'hévéas. Le cycle ayant commencé en 2005, nous bénéficierons pendant cinq ou six ans d'un surplus d'offre. Nous n'avons donc rien à craindre à court ni à moyen terme. Un problème pourrait toutefois survenir à plus longue échéance, compte tenu de la croissance du parc automobile mondial.

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