S'agissant des restructurations, les armées ont étudié plusieurs plans, mais la décision finale appartient naturellement aux autorités politiques. S'agissant de Varennes sur Allier, nous savions qu'en cas de réduction du format de l'armée de l'air, ce site de stockage constituerait un doublon de celui de Romorantin, ce qui nous a conduits à concentrer les stocks de l'armée de l'air sur ce dernier site.
Monsieur Dhuicq, soyez sûr que ce n'est pas de gaîté de coeur que je conduis la réduction du format de l'armée de l'air ! Mais compte tenu des orientations fixées par le Livre blanc, aux travaux duquel j'ai participé, et des contraintes budgétaires qui pèsent sur nous, nous nous devons de poursuivre une démarche responsable d'adaptation de notre format qui vise avant tout à maintenir la cohérence indispensable de notre outil de défense. Les choix budgétaires sont des choix politiques, et les premières options qui avaient été évoquées, avant d'être heureusement écartées, représentaient de véritables scénarios de rupture. S'agissant de la gestion des ressources humaines, vous avez parlé de « casse humaine », terme qui ne me convient pas. Nous avons besoin de recruter en assez grand nombre des aviateurs et de les former correctement. Je note d'ailleurs que la qualité de nos formations est appréciée au-delà même du milieu militaire : ainsi, l'École de l'air, que j'ai eu l'honneur de commander, a mis en place des partenariats avec des grandes écoles de commerce notamment comme l'école des Hautes études commerciales (HEC) ou avec Sciences-Po Paris, pour partager nos savoir-faire en matière d'apprentissage du leadership, et ce avec un bilan très positif. Les écoles d'ingénieurs pourraient utilement s'inspirer de ces expériences concluantes. Notre projet consiste à la fois à ne pas diminuer la base de notre pyramide, dont la qualité est reconnue, et à offrir à certains de nos officiers de carrière, comme de nos sous-officiers, des moyens d'exercer leurs compétences en dehors des armées dans la dernière partie de leur carrière, et pas seulement dans les industries de défense. Leurs valeurs et leur aptitude au leadership sont appréciées par tous types de grandes entreprises, avec lesquelles nous tissons des liens. Mettre en place ce nouveau modèle de gestion des ressources humaines constitue une mission essentielle pour nous. Nous ne nous séparerons pas brutalement de nos officiers lorsque nous n'aurons plus besoin d'eux. Je souhaite bannir le terme de reconversion et préfère parler de progression, sachant pertinemment que nous ne pouvons pas offrir à tous nos officiers et sous-officiers une progression au sein du secteur de la Défense. Les jeunes officiers le comprennent d'ailleurs très bien, et nous avons pu le vérifier à l'occasion d'expériences que nous avons mises en oeuvre, consistant à insérer des officiers prometteurs dans des entreprises partenaires – en dépit d'ailleurs du risque qu'il y a de les voir nous quitter plus tôt que nous ne le souhaitons.
Pour moi, offrir des pécules d'incitation au départ pour les personnels du haut de la pyramide n'est pas une politique d'avenir pour la gestion des ressources humaines. C'est le seul levier dont nous disposons aujourd'hui, mais je crois qu'il est plus intéressant, pour l'État comme pour nos officiers, de leur financer un MBA plutôt qu'un pécule.
S'agissant des missiles air-air, le programme Meteor est en bonne voie, et les évolutions de nos Rafale vers le standard F3R permettent de l'intégrer.
Pour ce qui est des missiles air-sol, je ne crois pas aux missiles électromagnétiques. Cette conception de la guerre aérienne remonte à la guerre du Vietnam. Aujourd'hui, les radars sont dissociés des missiles : notre système de défense doit donc viser à attaquer l'ensemble des systèmes adverses, y compris ses capteurs, par des moyens qui reposent aussi sur des outils de guerre électronique. C'est plus complexe, mais nécessaire.
Madame Récalde, l'exercice de Cazaux a vu treize nations européennes coordonner leurs forces autour d'une mission de récupération de personnes en zone hostile. Il est à noter que ce type d'opération ne fait l'objet d'aucun référentiel de l'OTAN. Les Européens ont ainsi développé une compétence, en créant en juillet dernier un centre européen et en mettant en place des standards d'interopérabilité que reprendra l'OTAN – c'est là une première.
S'agissant de la réorganisation du MCO des forces aériennes, deux propositions sont sur la table. Celle de la DGA, qui propose de reprendre une grande partie des missions de la SIMMAD en faisant valoir son expertise dans la négociation de contrats avec les industriels. Ce n'est pas notre approche car, pour nous, les activités de MCO ne relèvent pas d'une logique de contrats mais d'une logique d'activité, au plus près des forces. On peut certes déléguer le MCO de certaines flottes à la DGA, mais pas celui de toutes nos flottes. Les efforts que nous avons faits depuis un an sur la base de Saint-Dizier nous ont par exemple permis d'améliorer considérablement notre activité à coûts constants : c'est donc flotte par flotte qu'il nous faut examiner ce qui est le plus pertinent en étant au contact des problématiques de terrain.. Il faut aussi rappeler que certains opérateurs industriels du MCO n'ont pas d'activité de construction de matériels aériens : la DGA n'a pas de relation privilégiée avec eux, à la différence de la SIMMAD, dont c'est le métier. Au-delà de cette question qui doit être tranchée d'ici la fin de l'année, il me semble que le plus important est de mettre en place une véritable filière des achats au sein du ministère, au sein de laquelle les acheteurs suivraient des parcours variés, passant par la DGA comme par la SIMMAD. En résumé, il faut travailler non pas projet contre projet mais ensemble avec tous les acteurs du MCO.
Madame la présidente, la question des standards et des normes est un sujet qui me tient à coeur et pourrait certes utilement être étudiée au Conseil européen, mais je crains qu'il ne soit trop tard pour que les membres du Conseil se voient soumettre des projets concrets et suffisamment avancés d'ici le mois de décembre. Néanmoins, des progrès sont possibles : ainsi, à l'instar de ce qui se fait dans l'aviation civile, nous essayons de mettre en place, dans le cadre du soutien de l'A400M, des projets avec les Britanniques, qui nous permettent de développer ensemble des normes communes pour la mise de pièces détachées, avec l'appui de l'Agence européenne de défense (AED). Et si les Européens s'équipent tous des mêmes drones américains, cela peut également constituer une occasion d'harmoniser les normes applicables en la matière. Enfin nous devrions travailler à un « ciel unique » européen qui intègre la dimension militaire