La cohabitation entre les avions de combat et les drones de surveillance est d'ores et déjà clairement effective. Ainsi, le drone de surveillance Harfang est capable d'éclairer au laser des objectifs au profit de nos avions de combat – c'est ce que nous avons fait pour l'opération Serval. Cette cohabitation existe même entre des équipages éloignés, c'est-à-dire entre des équipages au sol qui pilotent le drone et des équipages de pilotes d'avions de chasse.
Tout cela sera bien plus compliqué avec les drones de combat. La difficulté est en effet qu'aucun pays n'est capable de dire quelles seront les capacités du futur drone de combat et quels seront ses concepts d'emploi. Aujourd'hui, l'industrie produit des prototypes, des démonstrateurs, qui ont ceci pour vertu qu'ils nous permettent de nous ouvrir l'esprit vis-à-vis des capacités qu'offrent les nouvelles technologies. La difficulté vient également du fait qu'à l'horizon 2025, c'est une architecture de combat complète qu'il nous incombe de concevoir, à l'intérieur de laquelle s'intégrera ce futur drone de combat.
Pour votre information, l'armée de l'air compte dans ses rangs un capitaine qui vient d'obtenir un doctorat à Salon-de-Provence, et qui a eu l'idée, dès lors que les drones de combat et les pilotes d'avions de chasse seraient amenés à collaborer ensemble, qu'il faudrait implémenter des « lois humaines » dans la réaction du drone de combat, alors que les drones sont plutôt régis aujourd'hui par des « lois d'ingénieur ». Ce capitaine a fait des évaluations sur une grande quantité de pilotes, et a modélisé avec des algorithmes leurs réactions. Tâche à nous de valoriser ce travail exceptionnel ! Ceci pour vous illustrer le fait que nous avançons progressivement sur tous ces sujets. Une réflexion éthique devra également être menée sur les drones de combat, dès lors qu'il pourrait y avoir autonomie de décision pour donner la mort. Cette problématique éthique est très différente de celle posée par les drones MALE, pour lesquels un pilote reste « dans la boucle » pour prendre lui-même la décision et qui ne diffèrent donc pas fondamentalement des autres systèmes d'armes.
La réserve citoyenne est en quelque sorte une réserve de rayonnement, qui n'a pas d'activité opérationnelle proprement dite. Les trois armées l'appréhendent différemment. L'armée de l'air compte pour sa part de nombreux réservistes issus de la société civile qui viennent de tous horizons – parlementaires, journalistes, industriels… – et qui nous aident à travailler différemment en étant parfois critiques vis-à-vis de nos manières de procéder. Ils nous apportent souvent des idées novatrices : à titre d'exemple, nous sommes en train de réaliser un projet de « base aérienne virtuelle » sur lequel ils ont contribué. En effet, nous nous sommes aperçus que de nombreux aviateurs sont en quête d'une identité propre à leur armée d'origine, notamment ceux qui sont placés dans des structures interarmées. La base aérienne virtuelle est un projet de réseau social de nouvelle génération – existant déjà dans de très grandes entreprises – qui permettra de récréer un sentiment de communauté en rapprochant les aviateurs autour de sujets d'intérêts communs, où qu'ils soient. Cet espace, nous le voulons déhiérarchisé : le caporal pourra échanger directement avec le général au travers de sujets communs.
La réserve opérationnelle de l'armée de l'air compte 4 400 membres et je considère que réviser la manière dont elle est aujourd'hui utilisée doit faire partie de notre projet. Je distingue trois types de réservistes opérationnels : le réserviste qui est utilisé pour le rayonnement de l'armée de l'air et de l'esprit de défense au travers des associations et des cérémonies, le réserviste que l'armée de l'air forme ab initio, destiné à des missions opérationnelles et le réserviste qui est souvent un ancien militaire et qui apporte ponctuellement son concours. Je souhaite personnellement que l'effort se fasse sur les réservistes ab initio. Comme toutes les armées, l'armée de l'air dispense des formations militaires initiales pour les réservistes, mais nous éprouvons des difficultés à fidéliser ceux qui les suivent. Des expériences sur les bases aériennes ont été menées, et l'on s'est aperçu que l'on obtient une bien meilleure fidélisation du réserviste dès lors que l'on lui confie des responsabilités – de formation par exemple – vis-à-vis d'un groupe. On est donc en train d'identifier des fonctions opérationnelles qui nous amèneront à fidéliser non pas un individu mais un groupe.
M. Guilloteau, la question que vous posez sur l'A400 M est celle de la cible finale et de la cible de la LPM. Le ministre l'a réaffirmé à Orléans : la cible finale n'a pas changé, c'est 50 A400M. La cible fixée par le projet de LPM est de 15 A400M, y compris celui que nous possédons déjà et celui supplémentaire que nous aurons cette année. Le calendrier de livraison est le suivant : deux avions cette année, quatre en 2014, quatre en 2015, trois en 2016, et deux en 2017. Nous connaîtrons ensuite quelques années sans livraisons, puis celles-ci reprendront avec une atteinte de la cible finale au-delà des années 2020. Au total, le projet de LPM assure une montée en puissance de 15 premiers appareils.