Intervention de Olivier Appert

Réunion du 10 octobre 2012 à 9h30
Commission des affaires économiques

Olivier Appert, président d'IFP énergies nouvelles, IFPEN :

Pour bien mesurer l'enjeu des biocarburants, il faut rappeler qu'aujourd'hui, dans le monde, en Europe, mais aussi en France, l'approvisionnement énergétique du secteur des transports – y compris le transport ferroviaire – dépend à 95 % des produits pétroliers, auxquels il n'existe pas de substitut massif à court terme. Dans les 5 % restants, les biocarburants pèsent pour 2 % et l'électricité – essentiellement utilisée pour le transport ferroviaire – pour 1 ou 1,5 %.

Les biocarburants sont donc le premier substitut disponible. À la mode il y a huit ans, lorsqu'ils étaient parés de toutes les vertus, ils sont aujourd'hui voués aux gémonies. Il faut pourtant rester mesuré. Les biocarburants de première génération ont un rôle à jouer, mais ne peuvent couvrir qu'une petite partie de l'approvisionnement car, outre les problèmes de coût, on se heurte rapidement à la concurrence entre usage alimentaire et non alimentaire des matières premières. La deuxième génération fait actuellement l'objet de programmes de démonstration ; un projet-pilote de production d'éthanol de deuxième génération est par exemple en cours de construction à côté de Reims, en liaison avec la profession agricole, l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et les industriels. Le temps de la recherche est long : le projet a été lancé en 2007, les travaux se déroulent conformément au calendrier, et s'ils sont couronnés de succès au plan technique et économique, on peut envisager un déploiement de la technologie à la fin de cette décennie. Les choses sont moins matures concernant la troisième génération : le potentiel est évident, mais le déploiement ne peut être envisagé que d'ici à la fin des années 2020.

De même, la réduction de la consommation d'énergie dans le secteur des transports passe par le développement de technologies. La consommation unitaire des véhicules peut être réduite d'environ 50 %, mais la mise au point des modèles prendra du temps – entre dix et vingt ans – et aura un coût.

Si la sécurité de notre approvisionnement est très bonne pour l'électricité, il ne faut pas oublier que celle-ci ne représente que 20 % de notre consommation d'énergie finale. Nous sommes donc dépendants pour 80 % des énergies fossiles. Or les réserves sont inégalement réparties à cet égard : pour le pétrole, elles se trouvent aux deux tiers dans les pays de l'OPEP, l'Iran et l'Irak en détenant une part importante, et, pour le gaz, dans la même proportion entre le cinquantième et le soixante-dixième méridien – en Russie, au Qatar et, une fois encore, en Iran. Il y a donc là un problème majeur, auquel nous pouvons obvier grâce aux investissements de nos opérateurs à l'étranger et à l'action de notre diplomatie en faveur d'un dialogue entre producteurs et consommateurs. Mais cette sécurité passe aussi par l'amélioration de la production nationale, de manière à réduire une dépendance qui est quasi absolue puisque nous importons aujourd'hui 99 % de notre pétrole et de notre gaz. La France dispose d'un potentiel à cette fin, avec le pétrole de Guyane et des ressources d'hydrocarbures non conventionnels. Pourquoi ne pas prendre exemple sur les États-Unis qui, déjà exportateurs de produits pétroliers, deviendront en 2020 exportateurs nets de gaz naturel ? Dès aujourd'hui, ils y ont gagné un regain de croissance qui leur permet de réorienter du tout au tout leur politique.

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