Intervention de Luc Oursel

Réunion du 10 octobre 2012 à 9h30
Commission des affaires économiques

Luc Oursel, président d'AREVA :

Le travail remarquable effectué par la Cour des comptes au début de l'année a parfaitement montré le sérieux qui entoure l'évaluation des coûts du nucléaire : elle intègre notamment les coûts de démantèlement et les provisions pour retraitement. Pour ma part, j'espère – et nous essayerons d'y contribuer – que le débat qui va s'ouvrir permettra à chacun de connaître les coûts de chaque filière et, à partir de là, de bien comprendre les conséquences en termes de prix des différents choix énergétiques qui seront proposés.

S'agissant de la Commission européenne et de son rapport sur la sûreté nucléaire, je dirai qu'outre que la Commission n'est pas compétente sur le plan administratif et réglementaire en la matière, les approximations, imprécisions et raccourcis relevés dans ce document montrent que, peut-être, elle n'a pas su s'entourer de toutes les compétences techniques qu'aurait exigées ce travail de synthèse.

La sûreté nucléaire n'est pas un concept statique : nous pouvons et devons toujours mieux faire. Chaque entreprise s'y emploie, et y contribuent aussi le contrôle exercé par l'Autorité de sûreté, indépendante, ainsi que les retours d'expérience : celui de Fukushima a conduit à revoir certains concepts de sûreté et à réfléchir à l'organisation dont nous devons disposer pour gérer des incidents de cette nature.

En ce qui concerne les déchets radioactifs, la France considère qu'après son passage en centrale nucléaire, le combustible a encore un potentiel énergétique qui peut être utilisé par la filière de retraitement, la filière MOX. D'autres pays européens, ainsi que par le Japon, pratiquent cette valorisation et l'on commence ailleurs dans le monde à s'intéresser à cette technique qui permet de réduire la consommation de combustible et d'améliorer de ce fait la sécurité d'approvisionnement.

Je souscris tout à fait à ce qu'a dit Henri Proglio : la Chine est probablement, pour nous, le plus gros marché du nucléaire dans les années qui viennent. Jusqu'à présent, nous y avons une position forte grâce au travail effectué depuis trente ans. À l'époque de Daya Bay, une coopération exemplaire entre EDF et Framatome a permis d'imposer une technologie pour les trois décennies qui ont suivi et, grâce à cela, de générer une activité industrielle au profit, non seulement du groupe Areva, mais de dizaines de PME associées à la construction de ces réacteurs, et ainsi conduites pour certaines à s'implanter définitivement en Chine par le biais de joint-ventures.

Aujourd'hui est un nouveau Daya Bay : la Chine va relancer un programme nucléaire de très grande ampleur. Il s'agit de savoir comment nous pouvons en être parties. Nous avons la chance d'avoir été avec EDF à l'origine d'un projet de deux réacteurs EPR à Taishan, projet qui se déroule correctement. D'autres pays, évidemment, ont la même ambition mais l'équipe France est très resserrée pour choisir la meilleure stratégie et continuer à entraîner dans son sillage des dizaines, des centaines de PME et, bien entendu, elle a le souci de protéger les compétences technologiques patiemment accumulées dans notre pays.

À cause de son histoire, et grâce aux choix qu'elle a effectués et à son organisation, la France est un modèle pour ce qui est de l'énergie en général et du nucléaire en particulier. Beaucoup de pays regardent ce que nous faisons avant de prendre leurs propres décisions et il est évident qu'ils vont observer à la loupe le débat de politique énergétique qui s'engage. J'espère donc que, dans le cours de celui-ci, on prendra en considération comme il convient l'intérêt qui s'attache à la consolidation de ce secteur, ainsi que sa contribution à notre balance commerciale – 6 milliards d'euros !

J'en reviens pour finir aux énergies renouvelables. AREVA a développé des technologies pour l'exploitation de la biomasse et le problème se situe donc ailleurs : dans l'organisation de la filière et dans la collecte de la ressource. C'est probablement sur ce point que le plus gros travail reste à faire avec les collectivités locales, en recourant peut-être à de nouveaux mécanismes d'incitation. Et, pour assurer un développement pérenne de cette filière, sans doute faudra-t-il aussi parvenir à organiser la coexistence de grands projets industriels avec le développement de chaudières domestiques.

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