Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 2 octobre 2012 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Jean-Yves le Drian, ministre de la défense :

Je vous avais alerté dès le mois de juillet sur la situation malienne – dès que j'ai pris mes fonctions, c'est elle qui m'a semblé la plus lourde de menaces. Or elle s'est encore aggravée. Des groupes djihadistes divers et variés, forts de centaines de combattants et liés directement ou indirectement à Al-Qaïda au Maghreb islamique – AQMI –ont pris des villes du Mali, où ils commettent des exactions. Provoquant la partition de fait du pays, ils descendent vers le sud, puisque après Tombouctou et Gao, ils ont récemment pris Douentza. Ils n'ont tout d'abord rencontré qu'un gouvernement affaibli et des forces maliennes insignifiantes. La situation est très instable et dangereuse du fait que nous assistons dans la zone, qui est très vaste, à la constitution d'un sanctuaire terroriste, les groupes armés, qui ont une grande connaissance du terrain, jouissant d'une réelle facilité de circulation.

La démarche de la France, qui n'a pas varié, est en voie de concrétisation. Il convient, aux yeux de notre pays, de consolider le gouvernement malien afin que celui-ci puisse demander, sous mandat de l'ONU après délibération du Conseil de sécurité, l'appui de la CEDEAO et, éventuellement, d'autres États de l'Union africaine – on évoque notamment le Tchad – pour former et édifier l'armée malienne, qui est pour l'heure impotente. Elle pourra alors reconquérir le nord du pays, qui, avec son intégrité territoriale, recouvrera sa pleine souveraineté. Tel est le fil rouge de la démarche de la France qui est prête à soutenir cette dynamique sur le plan logistique.

Il y a encore quelques jours, le gouvernement malien, en dépit de la résolution 2056 de l'ONU adoptée en juillet dernier, ne demandait aucune aide et les États membres de la CEDEAO se contentaient de déclarations de bonnes intentions. Mais, après son discours très vigoureux du 25 septembre devant l'Assemblée générale des Nations unies, le Président de la République française a pu, d'une part, rencontrer le Premier ministre du Mali, qui a lui-même demandé une deuxième résolution du Conseil de sécurité pour autoriser l'intervention armée, et, d'autre part, organiser une rencontre avec les pays voisins du Mali, qui ont fait connaître très officiellement leur volonté d'agir. Je me suis parallèlement rendu, jeudi 27 septembre, à la réunion des ministres de la défense de l'Union européenne, pour demander l'organisation d'un dispositif de soutien européen, dans lequel la France jouerait un rôle majeur pour des raisons tenant à l'histoire comme à son positionnement actuel. Cette proposition a été retenue par nos partenaires. Les services de Mme Ashton se penchent actuellement sur la question et une décision politique devra être prise lors de la réunion des ministres des affaires étrangères de l'Union européenne qui aura lieu dans quinze jours. La situation est donc en voie d'amélioration. Je tiens toutefois à préciser que, pour des raisons climatiques, les premières opérations doivent se dérouler avant le début du mois de mars prochain, sous peine d'être repoussées à l'automne suivant, ce qui laisserait toute latitude aux groupes fondamentalistes pour descendre plus bas encore. Le calendrier est donc serré.

Pour des raisons évidentes de sécurité, je ne dirai rien des sept otages français – six au Mali et un septième, officier des services spéciaux, en Somalie. Nous faisons tout pour qu'ils puissent recouvrer la liberté, ce qui n'est pas simple. C'est une préoccupation permanente du Président de la République et du Gouvernement. Je ne répondrai pas non plus sur les forces spéciales, constituées de soldats très aguerris et qui ont une capacité spécifique d'intervention très rapide. Elles n'interviennent à l'étranger qu'à la demande des gouvernements concernés. Les crédits OPEX s'élèveront en 2013 à 630 millions d'euros. Le coût des OPEX a été de 870 millions en 2012 et de 1,2 milliard en 2011, année durant laquelle s'est ajoutée à notre présence en Afghanistan notre intervention en Libye. Ces crédits sont dédiés à toutes les opérations extérieures, et donc à un éventuel soutien au Mali, et ils servent déjà à financer l'hôpital que nous avons installé du côté jordanien à la frontière syrienne – quatre-vingt dix militaires y rendent un service réel à la population et aux forces syriennes de résistance. Le départ des unités combattantes permettra en 2013 d'économiser 90 millions sur le budget des OPEX. Si le coût des opérations extérieures diminue à l'heure actuelle, rien n'empêche qu'il remonte au gré des évolutions géostratégiques.

Monsieur Meslot, le budget pour 2013 est identique au budget de 2012 : celui-ci était-il donc mauvais ?

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