Intervention de Olivier Faure

Réunion du 16 octobre 2012 à 9h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Faure, Rapporteur spécial :

À l'heure du lancement par le ministre en charge des transports, de la mer et de la pêche de la commission chargée de préciser et de hiérarchiser les projets du Schéma national des infrastructures de transport – SNIT –, les transports ferroviaires constituent un enjeu primordial, dont le financement par l'État est la clé de voûte.

Les transports ferroviaires et collectifs sont l'action phare du programme 203 « Infrastructures et services de transports », lequel se voit doter, en 2013, de 4,05 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 4,07 milliards en crédits de paiement, soit des montants respectivement en baisse de 3,1 % et de 3,2 % par rapport à 2012. L'action 10 Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires représente 79,9 % des autorisations d'engagement et 79,5 % des crédits de paiement de ce budget.

Pour 2013, 3,23 milliards d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement alimentent cette action, ce qui représente une baisse de 9,3 % par rapport à 2012. Cette diminution peut être saluée, dans le contexte d'effort budgétaire auquel participe la politique des transports, dans la mesure où elle n'obère pas le financement des grands projets d'infrastructures ferroviaires déjà lancés et concourt au financement des transports du quotidien, axe prioritaire de la politique des transports.

Dans le détail, les crédits de cette action sont répartis entre, d'une part, la subvention d'équilibre versée à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France – AFITF –, établissement chargé de porter la part de l'État dans le financement des grands projets d'infrastructures ferroviaires, fluviales, maritimes et routières et, d'autre part, la subvention versée à Réseau ferré de France – RFF – en vue de concourir à l'équilibre financier du gestionnaire d'infrastructure.

La subvention versée à l'AFITF est de l'ordre de 700 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement pour 2013, soit une diminution de près de 38 % par rapport à 2012. Toutefois, cette diminution sera largement compensée par la mise en oeuvre de l'écotaxe poids lourds en juillet prochain. Le budget de l'AFITF connaîtra de ce fait, un bond significatif, passant de 2 041 millions d'euros de ressources en 2012 à 2 322 millions en 2013, soit une augmentation de près de 14 %. Je ne peux ainsi que me réjouir de cette croissance, étant donné que l'AFITF porte les grands projets d'infrastructures ferroviaires qui constituent près de 80 % des projets qu'elle finance. Par ailleurs, je tiens à souligner que ce nouveau mode de financement répond au souci d'augmenter les moyens de l'AFITF autrement que via le contribuable, ce qui devrait être unanimement salué.

Le budget de l'AFITF devrait permettre de poursuivre le financement des quatre projets de LGV déjà lancés – LGV Est Européenne, Sud-Europe-Atlantique (partie Tours-Bordeaux), Bretagne-Pays de la Loire et contournement ferroviaire de Nîmes-Montpellier – et d'amorcer l'orientation de la politique ferroviaire en faveur des transports du quotidien, via le développement des transports collectifs en site propre – TCSP –, conformément aux orientations fixées par le Gouvernement. En régions, au terme des deux premiers appels à projets en faveur des TCSP, 1,3 milliard d'euros sont engagés par l'État et plus de mille kilomètres de lignes seront construits ou mises en chantier d'ici à la fin de l'année 2013.

L'amélioration des transports du quotidien passe également par la rénovation et la régénération des réseaux. Dans cette optique, la subvention versée à RFF s'élèvera à 2 536 millions d'euros pour 2013, soit une augmentation de 5,4 % par rapport à la subvention finalement perçue en 2012. À cela s'ajoutent près de 3,6 milliards d'euros de péages payés par les opérateurs et, à titre principal, par la SNCF. L'entretien du réseau existant, assuré pour le compte de RFF par la SNCF en tant que gestionnaire délégué de l'infrastructure, devrait faire l'objet d'un effort de 1,2 milliard d'euros en 2013, conformément au contrat de performance signé en 2008.

Ce contrat fixait une trajectoire économique de référence dans une perspective de maîtrise de la dette de RFF, héritée lors de sa création en 1997, et s'élevant, à l'époque, à 20,5 milliards d'euros. Or, l'évolution du contexte économique couplée à des dotations de l'État inférieures à ses engagements, a provoqué une forte hausse de cette dette, laquelle atteignait 28,6 milliards d'euros fin 2011. Les concours publics versés permettent de limiter à un peu plus d'un milliard d'euros le déficit économique pour RFF, mais conduisent à une augmentation régulière de sa dette.

Cette situation est éminemment préoccupante, d'autant que les études menées l'an dernier dans le cadre des Assises du ferroviaire ont évalué le déficit du système ferroviaire de 1 à 1,5 milliard d'euros par an. En effet, le coût complet du réseau, estimé à 7 milliards d'euros par an, est à peine couvert pour moitié par le produit des péages facturés aux utilisateurs. Dans ce contexte, il convient de réfléchir de façon urgente à la manière dont la dette de RFF pourrait être traitée. Cette question, ainsi que celle relative au regroupement du gestionnaire d'infrastructures et du gestionnaire d'infrastructures délégué, devrait être abordée dans le cadre des discussions concernant la réforme de la gouvernance ferroviaire qui s'ouvriront prochainement.

La SNCF constitue, quant à elle, un opérateur dynamique dont le chiffre d'affaires pour 2012 est de 20,2 milliards d'euros pour l'EPIC SNCF et de 34,3 milliards pour le groupe. Le montant des subventions de l'État devrait avoisiner 615 millions d'euros en 2013. Toutefois, presque la moitié de ces subventions n'est pas versée dans le cadre du programme 203. Au sein de ce programme, figure la compensation du manque à gagner pour la SNCF résultant de la mise en oeuvre des tarifications sociales nationales, dont le montant s'élève à 70 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement dans le projet de loi de finances pour 2013. On compte également la subvention d'exploitation versée dans le cadre de la convention relative aux trains d'équilibre du territoire – TET –, via le compte d'affectation spéciale Services nationaux de transports conventionnés de voyageurs, lequel s'élève à 325 millions d'euros pour 2013.

Je défendrai en séance publique un amendement tendant à réaménager le compte d'affectation spéciale, qui est aujourd'hui alimenté par la taxe sur les résultats des principales entreprises ferroviaires – TREF – soit, pour l'essentiel, la SNCF –, par la contribution de solidarité territoriale due par les entreprises de services de transport ferroviaire de voyageurs et par une fraction de la taxe d'aménagement du territoire acquittée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes. Au cours des dernières années, la part de la SNCF a augmenté régulièrement et je considère que la clé de répartition doit être revue, de manière à ce que la contribution versée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes progresse de 0,60 euro pour 1 000 kilomètres parcourus, ce qui permettrait de dégager 45 millions d'euros. À l'évidence, ces 45 millions pourraient utilement être mis à profit par la SNCF au service des transports du quotidien.

Je salue l'effort de désendettement de la SNCF puisque l'endettement financier net du Groupe a diminué de 170 millions par rapport à la fin de 2010. Toutefois, dans un contexte d'ouverture à la concurrence, l'endettement du système ferroviaire, sa gouvernance ainsi que l'adaptation de son cadre social doivent faire l'objet de discussions approfondies. Ainsi, après la libéralisation totale du fret intervenue le 1er janvier 2007 – au mois d'avril 2006 pour la France – ainsi que l'ouverture des transports internationaux de passagers le 1er janvier 2010, ce sera au tour du transport ferroviaire régional de voyageurs d'ici le mois de décembre 2019.

Les contrats de projets État-Région – CPER – sont un levier primordial pour le financement des infrastructures de transport et, notamment les trains du quotidien. Le volet transports en constitue le principal élément. Il correspond à un engagement global sur sept ans de 3,3 milliards portant sur l'ensemble des modes de transports massifiés, auxquels s'ajoutent 400 millions pour le matériel roulant Transilien en Île-de-France.

Par ailleurs, le bilan d'étape qui peut être tiré de l'exécution de cette nouvelle génération de contrats est positif. Au terme de l'exercice 2012, le taux prévisionnel de réalisation du volet transports sera globalement proche de 87 %.

Pour le volet ferroviaire des CPER 2007-2013, l'engagement de l'État représente environ 1 780 millions après révision à mi-parcours. L'enveloppe 2012 disponible pour les infrastructures ferroviaires s'élève à environ 101 millions. Elle permettra un taux d'exécution prévisionnel en AE, à la fin de 2012, d'environ 77 % du volet ferroviaire des CPER 2007-2013.

S'agissant du volet transports collectifs, la réalisation du transport commun en site propre – TCSP – de Strasbourg et de Valenciennes est prioritaire. À cette fin, 14,7 millions sont prévus en AE et 30,6 millions ont été engagés en CP en 2012.

En Île-de-France, la part « État » inscrite au CPER 2007-2013 s'élève à 766 millions, hors matériel roulant, et sera notamment utilisée pour la rénovation des lignes RER selon les schémas directeurs fixés avec le Syndicat des transports d'Île-de-France – STIF.

Par ailleurs, concernant les opérations de transports collectifs, 234 millions d'AE sont prévus en 2012 pour le financement de la gare Rosa Parks du RER E ou, encore, le prolongement de la ligne 12.

Enfin, concernant le volet transport combiné, 335 millions sont contractualisés dans le cadre des CPER 2007-2013, dont 137 millions de part « État », ce qui représente près du triplement de ses engagements par rapport à la précédente génération de contrats de plan. Ces crédits sont concentrés sur les autoroutes ferroviaires et la consolidation des aménagements nécessaires au développement des services de transport combinés et des dessertes terrestres portuaires.

La contribution de l'État au projet d'autoroute ferroviaire atlantique pourrait être complétée à hauteur de 46,7 millions en fonction des arbitrages à venir au début de l'exercice 2013, effort louable dans le contexte pesant de crise du fret ferroviaire que nous connaissons. Un soutien accru au transport intermodal et la mise en oeuvre de solutions immédiates – telles que le coup d'arrêt de l'abandon des gares de triage – ou de plus long terme – liaison des ports aux autoroutes ferroviaires – doivent devenir une priorité.

Pour les transports du quotidien comme pour le fret, il importe certes de dresser un constat mais il faut aller plus loin car il en va de la vie quotidienne de nos concitoyens et de la pérennité économique d'une activité. L'heure a été à la réflexion ; il est désormais temps d'agir. C'est précisément ce que permet ce budget qui inaugure un changement de regard et de priorités pour le ferroviaire. La dynamique est lancée : qu'elle ne s'essouffle pas et que ce budget constitue une étape importante dans l'affirmation encore plus forte des priorités affichées par le Gouvernement pour ce quinquennat !

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