Bien entendu, il reste beaucoup à faire pour que les décisions que nous avons prises se poursuivent et se prolongent. Vous savez qu'il était prévu, dès lors que la supervision bancaire serait mise en place, que le Mécanisme européen de stabilité puisse intervenir en recapitalisation directe des banques espagnoles, afin d'éviter que le gouvernement espagnol ne se trouve contraint de financer ses banques en devant affronter des taux d'intérêt extrêmement élevés sur les marchés financiers. Nous nous mobiliserons fortement pour que ce soit le cas, parce qu'une grande partie de la crédibilité des décisions de l'Union face aux marchés et face aux peuples dépend de la capacité des institutions européennes à respecter scrupuleusement les calendriers qu'elles se sont fixés elles-mêmes sur les sujets essentiels.
Le Mécanisme européen de stabilité a été approuvé par la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Son conseil des gouverneurs s'est réuni le 8 octobre et le dispositif est désormais en vigueur ; cette recapitalisation est possible.
De même, la possibilité d'intervenir sur le marché secondaire des dettes souveraines, par le biais de la mobilisation du Fonds européen de stabilité financière, a permis de faire baisser les taux d'intérêt et d'éviter des attaques spéculatives pendant l'été.
Le 6 septembre, la Banque centrale européenne a décidé d'intervenir sans limite sur le marché à court terme des dettes souveraines pour éviter de nouveaux phénomènes spéculatifs, ce qui aura permis de stabiliser la situation en Europe.
Il nous faut aller plus loin encore dans ce dispositif de pare-feu en renforçant la solidarité, et c'est le troisième sujet que je veux évoquer. Cela renvoie à la suite, à la feuille de route préparée actuellement par Herman Van Rompuy et à propos de laquelle nous prendrons connaissance d'un rapport d'étape demain, lors du Conseil européen.
Il nous faut réussir à trouver un équilibre entre trois objectifs.
Le premier, c'est la convergence des politiques budgétaires, garantie que la monnaie unique tiendra dans le temps. La mise en oeuvre des dispositifs résultant du six-pack, et demain du two-pack et du TSCG, garantit qu'au sein de l'Union européenne, la convergence des politiques budgétaires sera rendue possible grâce à l'effort que feront les États pour maîtriser leurs comptes. Mais la maîtrise des comptes n'aura de sens que si elle permet davantage de solidarité, car leur rétablissement sans croissance ni solidarité serait une étape sans issue, une impasse pour l'Union européenne. Dès lors qu'il y a discipline budgétaire, il faut donc qu'il y ait aussi solidarité et croissance. Et si davantage de solidarité justifie demain davantage d'union politique, nous sommes bien entendu prêts, nous l'avons déjà dit, à franchir un pas vers davantage d'intégration.
Dans les documents qui nous ont été transmis figurent des éléments intéressants qui témoignent du fait que le combat que nous avons engagé pour la solidarité, pour la mutualisation, pour davantage de cohérence et de convergence commence à produire des résultats. Je pense notamment à la possibilité évoquée de mettre en place un fonds spécial pour la zone euro, qui permettrait d'alimenter des dispositifs de croissance, sans préjudice d'ailleurs des moyens mobilisés par les États eux-mêmes pour accompagner les politiques de cohésion ou la politique agricole commune à vingt-sept. La création de ce fonds est désormais envisagée comme une possible conclusion du prochain Conseil européen. J'évoquerai également les émissions de dettes à court terme. Celles-ci constituent une étape vers les euro-obligations dont on nous disait qu'elles n'étaient pas envisageables. Or les euro-obligations sont bien profilées comme une hypothèse de travail qui permettrait de conforter la solidarité.
Budget de la zone euro, émissions de dettes communes et mutualisation possible, demain, de ces dettes dès lors que la discipline budgétaire est là, autant de perspectives qui vont dans le sens de la réorientation pour laquelle le Gouvernement s'est mobilisé, et qu'il entend poursuivre en profitant du Conseil européen des 18 et 19 octobre comme d'une opportunité nouvelle.
J'insiste sur le fait, et je conclurai par là, que ce que nous faisons pour que l'Europe approfondisse sa réorientation, qu'elle aille plus loin dans la solidarité et dans la croissance, n'aboutira que si nous parvenons à articuler demain le pilotage de la zone euro en mettant en place des mécanismes permettant une concertation accrue entre les pays qui la constituent. Je pense bien entendu à des sommets plus réguliers de la zone euro et à un renforcement du rôle du président de l'Eurogroupe en vue d'assurer une meilleure coordination des décisions et des politiques.
Mais il faut aussi que ce que nous faisons à dix-sept ne soit pas orthogonal par rapport à ce que nous faisons à vingt-sept dans le cadre du marché unique afin qu'il y ait de la croissance pour tous les pays. Nous devons trouver cette articulation. La feuille de route d'Herman Van Rompuy la profile de façon intelligente et astucieuse, et c'est autour de ses orientations, dans le respect de nos partenaires et dans la volonté d'une relation équilibrée avec l'Allemagne, que nous abordons ce Conseil européen. Ce doit être à la fois un Conseil de consolidation de la réorientation engagée au mois de juin, sous l'impulsion du Président de la République, et une étape annonciatrice de ce qui pourrait se faire demain, à l'occasion notamment du Conseil de décembre. Il s'agira alors, à travers la version définitive de la feuille de route qui nous engagera durablement vers l'avenir, de définir les conditions dans lesquelles nous irons plus loin vers la croissance, vers la solidarité, vers la coordination des politiques économiques et monétaires. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP, et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.)