Intervention de Danielle Auroi

Séance en hémicycle du 17 octobre 2012 à 15h00
Débat préalable au conseil européen

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes :

Ce prix souligne – je vous rejoins sur ce point, monsieur Asensi – que tous les devoirs de mémoire comptent.

Résultat d'un travail patient, cet espace de paix, si nous n'y prenons garde, pourrait se défaire sous les coups des nationalismes et des intolérances de tout poil – n'est-ce pas, chers collègues ? – comme sous les coups des spéculateurs. Alors, soyons à la hauteur de cette récompense.

Le Conseil européen de demain prend dans ce contexte une place particulière. Espérons qu'il continuera sur le chemin de la solidarité. Alors que le sommet précédent avait donné beaucoup d'espoir, celui-ci saura-t-il répondre à l'angoisse de nos concitoyens ?

Depuis le mois de juin dernier, les différentes strates de l'Union paraissent moins bousculées, mais nous pouvons regretter que ni la situation de la Grèce ni le sauvetage de l'Espagne ne soient directement abordés lors de ce sommet.

Ce sommet est préparatoire à de grandes décisions. Seront-elles prises d'ici à la fin de l'année ? Nous espérions pour certaines une mise en oeuvre rapide, je pense notamment à la supervision bancaire. Hélas, nos amis allemands ne sont pas pressés d'aboutir sur ce sujet, mais j'espère, monsieur le ministre, que vous pourrez nous rassurer.

Plutôt que de me concentrer sur les désaccords entre partenaires, je souhaiterais insister sur quelques-unes des propositions du président du Conseil européen à propos de la reprise en main de la zone euro, et sur son indispensable corollaire, la démocratisation de l'Union.

Le rapport d'étape du président Van Rompuy contient en effet une perspective d'importance : il propose de transformer l'architecture de l'union économique et monétaire en dotant la zone euro d'un budget central, en complément du budget communautaire. Cette innovation pourrait contribuer à une meilleure solidarité entre nos économies. Il faut donc l'étudier avec attention.

Par exemple, la mutualisation des assurances chômage, évoquée par le ministre de l'économie, pourrait s'inscrire dans cette démarche audacieuse. Cela redonnerait-il aux jeunes qui doutent aujourd'hui de l'Europe une perspective positive ? J'ose l'espérer.

Ce rapport d'étape souligne aussi la nécessité d'examiner plus avant l'émission commune d'instruments de financement souverain, voire l'institution d'un fonds d'amortissement des dettes accumulées par les États. Quoique timidement, c'est bien l'enjeu essentiel des eurobonds, défendus vivement par la nouvelle majorité, qui revient là au coeur des débats, même si, nous le savons, certains de nos partenaires européens y sont toujours hostiles.

Malheureusement, je dois aussi souligner les impasses de ce rapport, qui donne des gages importants aux rudes gardiens de l'orthodoxie libérale.

Nous savons toute la difficulté de votre tâche, monsieur le ministre, vous qui devez rappeler la nécessité d'un équilibre qui respecte les peuples et écarter des formes de tutelle qui se sont révélées non seulement humiliantes mais aussi bien peu efficaces. Il faut cesser de punir les peuples pour des fautes commises par les banques !

Je regrette en particulier que demeure à ce point négligée la question, pourtant cardinale dans une union intégrée, de l'harmonisation fiscale, sociale et environnementale.

La concurrence, pour ne pas dire le dumping fiscal ou social, encore pratiquée par certains États, est une menace mortelle pour l'Union. Dans un esprit comparable, la taxe sur les transactions financières avance très lentement, certes, mais elle avance. Notre gouvernement a montré son engagement sur ce chantier. Souhaitons qu'à brève échéance puissent être lancés aussi les travaux sur une taxe carbone européenne.

Mais il ne pourra y avoir d'avancées budgétaires sans que l'Europe sorte de la panne démocratique qui la paralyse aujourd'hui. C'est ce que souligne aussi le rapport du président Van Rompuy.

Cela ne vient-il pas du déséquilibre actuel entre les rôles respectifs du Conseil, de la Commission et du Parlement européen ? Ne faut-il pas que les Parlements nationaux soient suffisamment associés à la réflexion pour corriger ce déséquilibre, et cela en faveur des citoyens ?

Les rédacteurs des conclusions de ce prochain Conseil européen suggèrent d'ailleurs aux chefs d'État et de gouvernement d'encourager la création de la conférence budgétaire interparlementaire prévue par le traité sur la stabilité. Comme vous le savez, chers collègues, cette idée est née au sein de notre assemblée, et plus précisément au sein de sa commission des affaires européennes.

Nous approchons d'un consensus sur l'idée que les Parlements nationaux devraient mieux faire entendre leurs voix dans le concert européen. M. Antonio Vitorino, que nous avons auditionné ce matin, nous a dit qu'il faudrait peut-être aussi, chers collègues, prêter une oreille plus attentive à l'Union européenne au sein même de cet hémicycle, qui est en effet un peu vide à l'heure de ce débat !

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