Le bilan est tout aussi catastrophique pour notre industrie qui ne représente plus que 13 % de la valeur ajoutée en France. Vous étiez prompts à vouloir faire des comparaisons. Pour ma part, je vous en livre une : en Allemagne, l'industrie représente 23,7 % de la valeur ajoutée – 18,5 % en moyenne pour les pays de l'Union européenne. Même en Grande-Bretagne, dont on disait pourtant qu'elle avait sacrifié son industrie, elle est de 15,6 %.
Avec votre politique, notre balance commerciale a atteint un déficit jamais connu. Vous resterez la majorité de tous les tristes records pour notre pays : économiques, sociaux, moraux et financiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Et que dire de l'état dans lequel se trouvent nombre de nos services publics, et notamment le plus fondamental d'entre eux, l'éducation, qui est laissée exsangue par votre majorité. La France est ainsi devenue l'une des lanternes rouges de l'OCDE pour l'encadrement en primaire, tandis que notre pays est l'un de ceux où les inégalités sociales ont l'impact le plus fort sur les inégalités scolaires.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, il y a là une chose pour laquelle il est urgent d'agir : la grandeur de la France et sa capacité à donner le savoir à toutes ses générations. De ce point de vue, la façon dont nous avons décroché ces cinq dernières années est porteuse de tristes lendemains si nous ne savons pas y remédier rapidement. C'est pour cela que l'effort qui vient d'être confirmé par le Premier ministre de création de 60 000 postes sur ces cinq années, l'effort qui vise à faire en sorte que l'éducation nationale redevienne une priorité sera porté ici à chaque fois que vous en aurez besoin par tous les députés de la majorité, tant l'éducation est essentielle à la vie même des valeurs de notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Au bilan, je dois aussi mentionner, monsieur le Premier ministre, le sort d'une justice précarisée et fragilisée par l'enchaînement des mesures incohérentes et inefficaces, ou encore la sécurité. Je ne donne aucun quitus sur ce point à l'ancienne majorité. Treize lois ont été votées lors de la dernière législature, alors que les résultats montrent qu'agitation n'a jamais rimé avec efficacité. Les effectifs sont inférieurs aujourd'hui à ce qu'ils étaient en 2002 et les conditions de travail des policiers et des gendarmes se sont dégradées tandis que les violences n'ont cessé d'augmenter. Il y aura là, monsieur le ministre de l'intérieur, un chantier prioritaire que vous aurez à coeur de mener à bien le plus vite possible.
Voilà, les chers collègues, la situation devant laquelle se trouve le nouveau Gouvernement. Vous comprenez mon étonnement face à certaines déclarations, alors que ce bilan, je l'ai dit, devrait amener les responsables de l'actuelle opposition à plus de modestie. Monsieur le Premier ministre, c'est à vous maintenant d'y faire face. Cela exigera du courage bien sûr – vous en avez toujours fait preuve – mais surtout de la justice. Vous vous y êtes engagé et je vous ai déjà dit que vous trouveriez toujours le soutien de notre groupe dans cette exigence de justice.
Face à la difficulté de la situation, nous avons un unique devoir : réussir. Réussir le redressement de notre pays, réussir le changement.
Il y a, monsieur le Premier ministre, dans les décisions que vous avez prises comme dans les orientations que vous venez d'exposer, les mesures qui nous permettront d'y parvenir. Et ces mesures contribueront non seulement à redresser notre pays mais également à répondre aux attentes de nos compatriotes.
Je prendrai ici quelques exemples.
L'accès au logement dont vous venez de parler est aujourd'hui une priorité fondamentale pour nos concitoyens. Pouvoir se loger à un prix abordable dans des villes qui ne soient pas des ghettos de pauvres ou des ghettos de riches mais au contraire des espaces où le vivre ensemble soit rendu possible : c'est ce que vous vous êtes engagé à faire et nous agirons avec vous massivement pour augmenter l'offre de logements sociaux et réduire les égoïsmes territoriaux. Je partage avec vous, toute la majorité partage avec vous, monsieur le Premier ministre, l'objectif d'une France de citoyens bien logés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Nous vous accompagnerons en soutenant le renforcement des dispositions de la loi SRU. Nous ne supportons pas que certains maires parient contre cette loi de mixité sociale et que certaines villes assument aujourd'hui ouvertement leur choix de verser une pénalité plutôt que de construire des logements sociaux.
Parallèlement, il nous faudra poursuivre le programme de rénovation urbaine. À cet égard, nous ne pourrons pas nous contenter, pour les cinq millions de Français qui vivent dans les quartiers populaires, d'avoir une approche exclusivement urbaine. Si celle-ci marque une avancée, nous savons qu'elle doit être complétée par un volet humain qui a été littéralement sacrifié ces cinq dernières années.
Quartiers populaires, mais aussi villages de la France rurale, zones périurbaines frappées par la crise économique, notre majorité devra engager une action résolue en faveur d'une égalité territoriale à laquelle nous sommes profondément attachés, rompant ainsi avec la confrontation entre l'État et les collectivités locales dans laquelle se complaisait le pouvoir précédent.
L'acte III de la décentralisation sera engagé par votre Gouvernement, permettant ainsi à notre pays de renouer avec l'esprit de 1982 et la belle prophétie de François Mitterrand : « La République a eu besoin de la centralisation pour se faire, elle a besoin de la décentralisation pour ne pas se défaire. »
Quant à la santé, autre préoccupation majeure des Français, nous soutiendrons bien entendu votre volonté d'instaurer une réforme de la tarification qui permette de conforter l'hôpital dans ses missions de service public, tout en assurant, à travers des pôles de santé de proximité, un véritable accès aux soins.
J'ai cité ces quelques exemples, alors que la priorité nous la connaissons tous ; elle est pour nous la même que la vôtre, monsieur le Premier ministre ; notre priorité c'est l'emploi, l'emploi et encore l'emploi. Il doit être au coeur de toutes les politiques.
Le dernier quinquennat a vu le nombre de chômeurs augmenter d'un million : le chômage concerne près de 3 millions de personnes et atteint 10 % de la population active. Il nous faut agir.
La mise en oeuvre du contrat de génération sera un message fort adressé aux jeunes pour qui le taux de chômage atteint près de 25 %, et aux seniors dont le taux d'activité n'excède pas les 40 %.
Quelle belle idée que celle d'un ancien qui tend la main à un jeune ! Quelle belle idée que celle de la transmission des savoirs entre générations ! Quelle belle idée que de dire à la jeunesse de notre pays : vous êtes la priorité de l'action publique, vous êtes celles et ceux dont le pays n'accepte plus que vous restiez de si longues années à attendre, à attendre avant de pouvoir mettre votre énergie au service de la communauté nationale !
Oui, monsieur le Premier ministre, contrat de génération, emplois d'avenir pour des jeunes qui sont encore trop éloignés du travail et de l'activité : voilà encore un signe donné à notre jeunesse, encore un engagement que nous soutiendrons, marquant en cela la priorité donnée par le Président de la République dans sa campagne électorale à la jeunesse.
Cet engagement pour la jeunesse, monsieur le ministre de l'éducation nationale, nous souhaitons qu'il soit tourné très directement vers l'école et vers l'éducation.
Je salue l'effort que l'ensemble du Gouvernement engage pour permettre la création indispensable de postes dans l'éducation nationale. On n'éduque pas les enfants au rabais. On ne forme pas une nation en déclassant ses maîtres. C'est par la transmission du savoir, par l'élévation de son niveau de connaissances et de formation que la France s'écrira un avenir. Encore faut-il, monsieur le Premier ministre, que l'école de la République soit protégée, qu'elle soit sanctuarisée. Depuis trop longtemps, on exige d'elle de régler tous les problèmes de la société : l'insécurité, le communautarisme, la déstructuration familiale, les fractures urbaines.
Notre devoir c'est de l'aider, c'est de nous mobiliser vers elle, c'est de lui restituer sa raison d'être : l'éducation, la formation, en d'autres termes la construction intellectuelle et civique des nouvelles générations. C'est ce sur quoi ont porté les premiers engagements du Président de la République le jour même de son investiture. Vous trouverez là encore, dans cette Assemblée, sur la priorité à l'éducation, une majorité toujours prête à se mobiliser à vos côtés, quelles que soient les difficultés de votre tâche, monsieur le ministre de l'éducation nationale.
Mais l'enjeu, vous l'avez noté, monsieur le Premier ministre, c'est aussi celui de la croissance. C'est la condition essentielle sans laquelle il n'y a pas de redressement possible. C'est la raison pour laquelle, nous tiendrons demain un débat sur l'Europe qui permettra d'échanger sur le pacte pour la croissance que vous avez porté devant les chefs d'État et de gouvernement de l'Union européenne, en particulier ceux de la zone euro. Nous ne souhaitons pas que le Parlement soit dessaisi de ces questions européennes.
Le Conseil européen des 28 et 29 juin dernier a marqué un tournant. Il a validé les objectifs qui avaient été fixés par le Président de la République : l'adoption d'un pacte de croissance et de mesures pour relâcher la pression des marchés, la définition d'une feuille de route pour l'avenir d'une Union monétaire et politique, la base d'une intégration solidaire en Europe.
Nous aurons l'occasion d'en débattre dès demain, mais je veux en dire ici quelques mots aujourd'hui.
Nous ne céderons jamais à la facilité de faire reposer sur les autorités bruxelloises la responsabilité des maux de notre société, mais nous serons des acteurs vigilants de la position de la France en Europe. Nous connaissons les origines de la crise européenne : après la crise des subprimes, l'absence de contrepartie demandée aux acteurs des marchés qui ont été sauvés par les États et surtout le choix aveugle de l'austérité imposée aux économies européennes au lendemain de la crise.
C'était là une grave erreur qui avait été commise par les gouvernements précédents. C'est même presque une méconnaissance de l'histoire. Chacun sait ici que la récession ne permet pas le redressement de l'économie. Nous savons aussi que l'austérité érigée en dogme et administrée en purge a pu conduire dans le passé aux pires conséquences économiques, sociales et même républicaines pour notre pays. La façon dont vous avez repoussé dans ce sommet ce spectre de l'austérité pour essayer de replacer la croissance sur la trajectoire est aujourd'hui un profond encouragement pour notre Parlement à se saisir de ces questions, à nouer des relations dans toute l'Europe et à faire en sorte d'accompagner l'effort qui est le vôtre et celui du Président de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)